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Cinq-Mars (Une conjuration sous Louis XIII) - Lecteurs.com

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éflexion générale sur l’ingratitude et l’inconstance deshommes, pensée profonde et nouvelle, qui ne manque jamaisd’occuper la tête d’une jeune personne à l’âge du premieramour ; mais le sommeil ne lui permettait jamais de l’achever ;et la fatigue de la danse fermait ses grands yeux noirs avantque ses idées eussent trouvé le temps de se classer dans samémoire, et de lui présenter des images bien nettes du passé.Dès son réveil, elle se voyait entourée des jeunes princesses dela cour, et, à peine en état de paraître, elle était forcée de passerchez la Reine, où l’attendaient les éternels mais moinsdésagréables hommages du prince Palatin ; les Polonaisavaient eu le temps d’apprendre à la cour de France cette réservemystérieuse et ce silence éloquent qui plaisent tant auxfemmes, parce qu’ils accroissent l’importance des secrets toujourscachés, et rehaussent les êtres que l’on respecte assezpour ne pas oser même souffrir en leur présence. On regardaitMarie <strong>com</strong>me accordée au roi Uladislas ; et elle-même, il fautle confesser, s’était si bien faite à cette idée, que le trône dePologne occupé par une autre reine lui eût paru une chosemonstrueuse : elle ne voyait pas avec bonheur le moment d’ymonter, mais avait cependant pris possession des hommagesqu’on lui rendait d’avance. Aussi, sans se l’avouer à elle-même,exagérait-elle beaucoup les prétendus torts de <strong>Cinq</strong>-<strong>Mars</strong> quela Reine lui avait dévoilés à Saint-Germain.– Vous êtes fraîche <strong>com</strong>me les roses de ce bouquet, dit laReine ; allons, ma chère enfant, êtes-vous prête ? Quel est cepetit air boudeur ? Venez, que je referme cette boucled’oreilles… N’aimez-vous pas ces topazes ? Voulez-vous uneautre parure ?– Oh ! non, madame, je pense que je ne devrais pas me parer,car personne ne sait mieux que vous <strong>com</strong>bien je suis malheureuse.Les hommes sont bien cruels envers nous ! Je réfléchisencore à tout ce que vous m’avez dit, et tout m’est bien prouvéactuellement. Oui, il est bien vrai qu’il ne m’aimait pas ; car enfin,s’il m’avait aimée, d’abord il eût renoncé à une entreprisequi me faisait tant de peine, <strong>com</strong>me je le lui avais dit ; je merappelle même, ce qui est bien plus fort, ajouta-t-elle d’un airimportant et même solennel, que je lui dis qu’il serait rebelle ;oui, madame, rebelle, je le lui dis à Saint-Eustache. Mais je vois353

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