13.07.2015 Views

Télécharger ce livre au format PDF

Télécharger ce livre au format PDF

Télécharger ce livre au format PDF

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

egard noir et son rire se transforme <strong>au</strong>ssitôt en crise de toux.– La moquerie est une réaction puérile, Beatri<strong>ce</strong>. Cela ne te sied guère.– La moquerie est une réaction puérile, Beatri<strong>ce</strong>, répété-je comme un perroquet. Cela ne te sied guère.– Le sérum, réclame Jeanine.Peter s’avan<strong>ce</strong>, fourrage dans une boîte noire posée sur le bure<strong>au</strong>, en sort une seringue déjà munied’une aiguille.Il s’approche de moi et je tends une main.– Vous permettez ?D’un regard, il quête l’accord de Jeanine, qui le lui donne.Je saisis la seringue et j’enfon<strong>ce</strong> l’aiguille dans mon cou en appuyant sur le piston. Jeanine tape sur unbouton, et tout bascule dans l’obscurité.***Ma mère est debout dans l’allée <strong>ce</strong>ntrale du bus, le bras tendu <strong>au</strong>-dessus de sa tête pour se tenir à labarre. Son visage est tourné non vers les gens assis <strong>au</strong>tour de moi, mais vers la ville qu’on traverse encahotant. Des rides creusent son front et les contours de sa bouche quand elle fron<strong>ce</strong> les sourcils.– Qu’est-<strong>ce</strong> qu’il y a ? lui demandé-je.– Il y a tant à faire, me dit-elle en désignant la ville par la fenêtre. Et nous sommes si peu nombreux.Elle n’a pas besoin de me préciser de quoi elle parle. Dehors, les mon<strong>ce</strong><strong>au</strong>x d’ordures s’étendent àperte de vue. On passe devant un bâtiment en ruine. Les ruelles sont jonchées de tessons de verre. Je medemande <strong>ce</strong> qui a c<strong>au</strong>sé toute <strong>ce</strong>tte destruction.– Où est-<strong>ce</strong> qu’on va ?Ma mère me sourit et je découvre de nouvelles rides <strong>au</strong>tour de ses yeux.– On va <strong>au</strong> siège des Érudits.Je ne comprends pas. Depuis que je suis petite, on a toujours évité <strong>ce</strong>t endroit. Mon père disait quemême l’air qu’on y respirait était nocif.– Pourquoi ?– Ils vont nous aider.D’où vient <strong>ce</strong> pin<strong>ce</strong>ment <strong>au</strong> ventre quand je pense à mon père ? Je me représente son visage, marquépar une vie entière de frustrations c<strong>au</strong>sées par le monde qui l’entoure, et ses cheveux coupés court à lamode des Altruistes. Et j’éprouve le même creux à l’estomac que quand je suis restée trop longtemps sansmanger.– Il est arrivé quelque chose à papa ?– Non, répond ma mère en secouant la tête. Pourquoi <strong>ce</strong>tte question ?– Je ne sais pas.Je n’ai pas <strong>ce</strong>tte angoisse <strong>au</strong> ventre quand je regarde ma mère. En revanche, j’ai le sentiment que jedois graver dans ma mémoire chaque seconde passée ainsi à quelques <strong>ce</strong>ntimètres d’elle. Comme si mamère n’était pas permanente.Le bus s’arrête et les portes s’ouvrent en grinçant. Je suis ma mère vers la sortie. Comme elle est plusgrande, j’ai les yeux <strong>au</strong> nive<strong>au</strong> de ses ép<strong>au</strong>les, à la base de son cou. Elle paraît fragile, mais c’est uneapparen<strong>ce</strong> trompeuse.Je pose les pieds sur le trottoir et des débris de verre crissent sous mes semelles. Ils sont bleus et, à en

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!