opera quae supersünt omnia. - ARCHIVE OUVERTE UNIGE
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507 EPISTOLA 3414 508<br />
3414.<br />
MERLIN A CALVIN.<br />
La Buchesse de Ferrare s'est décidée, sur ses<br />
instances, à demander un ministre à Genève. Il espère<br />
en venir là aussi avec M. de Longueville et sa<br />
mère. Dénonciation d'un certain Denise qui a été<br />
récemment démasqué.<br />
(Autographe de la Bibl. de Genève MS. 196, fol. 145.)<br />
A Monsgr. Monsgr. d'Espeville.<br />
Salut par nostre Seigneur. Monsieur et père,<br />
depuis que ie vous eux escrit par un laqais de<br />
Monsr. VAmiral ie fus a Montargis 1 ) vers Madame<br />
la duchesse de Ferrare, laquelle de sa grace, depuis<br />
la premiere fois que ie fus a la court, me voit<br />
aussi volontiers et me reçoit avec aussi bon visage<br />
qu'il est poussible. J'ai tasche de luy persuader<br />
de servir a Dieu avec hardiesse et de renoncer a<br />
toute idolâtrie. Mais ie l'ay tousiours trouvée merveilleusement<br />
infirme et fort abbatue a cause de<br />
sa chutte après avoir faict profession de la vérité.<br />
Elle m'a mis en avant une infinite de respects et<br />
craintes qu'elle avoit qui lempeschoyent de donner<br />
gloire a Dieu. Je me suis efforce selon la grace<br />
que Dieu m'a faicte de luy remonstrer non seulement<br />
que toutes choses doyvent estre postposees au<br />
devoir duquel nous sommes tenus a Dieu, mais<br />
aussi qu'elle se donnoit crainte de plusieurs choses<br />
en vain et qu'elle s'arrestoit a plusieurs choses de<br />
néant: ce qu'elle faisoit. Au commencement i'y ailois<br />
le plus doucement qu'il m'estoit poussible, mais<br />
voyant que ie n'y prouffitois rien ie oommençay de<br />
luy proposer le iugement de Dieu, singulièrement<br />
quand ie parlois a part avec elle. Mais pour tout<br />
cela ie ne proufitois rien sinon quelque legiere promesse<br />
de le faire quelque fois, tellement que i'en<br />
avois presque perdu toute espérance. Advient que<br />
quelque personnage de grande estime, qui avoit<br />
grande entree vers elle, me dit qu'il avoit entendu<br />
d'elle qu'elle m'avoit en fort grande estime et commence<br />
de m'adiurer que i'eusse a faire mon devoir<br />
pour luy faire quitter l'idolâtrie et servir a Dieu<br />
franchement: me disant qu'il scavoit que si ie n'en<br />
venois a bout personne ne le pourroit a grande<br />
peine obtenir d'elle, et me met en avant les grands<br />
biens qui en viendroyent pour l'édification de l'église.<br />
Et combien que ie luy racontasse ce que<br />
i'en avois faict si ne se contente il point, ains me<br />
3414.1) Dépt. du Loiret, à peu de distance de Châtillon sur<br />
Loing, où était le domaine de la famille à laquelle appartenait<br />
Coligny.<br />
presse de plus fort en plus fort. Gela fut cause<br />
que la premiere fois que ie fus vers elle ie la pressay<br />
si rudement du iugement de Dieu qu'elle m'accorda<br />
qu'elle laisseroit du tout l'idolâtrie et qu'elle<br />
auroit un ministre. Le diable aida beaucoup a ce<br />
que ie pretendois en cuidant l'empescher. Car les<br />
prostrés sachans que i'estois la luy baillèrent divers<br />
assaux, s'aidans du baillif qui faict l'entendeur<br />
et sous ceste couleur a entree vers elle. Elle<br />
qui est fort infirme se trouva a chacune fois en<br />
crainte et perplexité et pour avoir mon avis m'envoye<br />
quérir. Dieu me donna tel conseil qu'il luy<br />
fut bien aise de mespriser tous leurs efforts (qui a<br />
la vérité n'estoyent rien a elle) et de remettre sus<br />
la crainte de laquelle ils la pensoyent estonner.<br />
Gela luy,accrust de beaucoup le désir davoir un<br />
ministre auquel elle se peut conseiller. En somme<br />
elle print resolution qu'elle en auroit un si luy<br />
estoit poussible le trouver, et m'asseura qu'elle persisterait<br />
en la religion et confession de vérité iusques<br />
au bout, et qu'elle defendroit son ministre<br />
iusques a mettre en danger et sa personne et son<br />
estât pour la conservation d'iceluy. Parquoy elle<br />
me commande (il est vray qu'elle usa de prières,<br />
mais ses prières me sont commandemens) que ie<br />
vous escrivisse en son nom pour luy en faire avoir<br />
un. Cependant elle me descrivit quel elle le voùloit.<br />
Premièrement elle n'en veut point de ieune<br />
ny aussi de trop viel, mais un qui soit environ de<br />
mon aage, afin qu'il puisse porter le labeur et ayt<br />
gravité et murté. Elle le veut ayant la crainte de<br />
Dieu a bon essient, grave, n'aimant point a entretenir<br />
femmes ou filles, non causeur ny trop ioyeux<br />
en parolles, craignant que cela ne le fit mespriser.<br />
Item elle veut qu'il soit scavant pour respondre<br />
aux adversaires et pour bien instruire et elle et sa<br />
maison et la ville de Montargis la ou elle faict<br />
maintenant sa demeure ayant laissé la court. Mesmes<br />
elle pretendroit de l'opposer au cardinal de<br />
Lorraine, qui luy a promis de vouloir disputer et<br />
de s'accorder a ce qu'on luy monstrera par l'esoriture<br />
estre véritable (vous ne le croyez pas, aussi<br />
ne fay-je) promettant cependant toute asseurance.<br />
Car elle desire grandement que ceste maison la fut<br />
édifiée a cause de sa fille, 2 ) mais elle ne veut pas<br />
pourtant mettre aucun en danger. Elle vous escrit<br />
son vouloir, se rapportant a ce que ie vous en escriray.<br />
Je vous supplie vous efforcer de luy eà<br />
envoyer un tel. Car vous scaves combien cecy est<br />
de grande importance a levangile. Si Dieu faisoit<br />
sa volonté de la Royne, le gouvernement de la personne<br />
du Roy et de messieurs ses frères viendrait<br />
entre ses mains, pource que celles qui sont plus<br />
proches sont mariées a princes estrangiers. Davan-<br />
2) Anne, mariée au due François de Guise.