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“Histoire” livre de Mme Simone Weil au format PDF - Les Classiques ...

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<strong>Simone</strong> <strong>Weil</strong>, Écrits historiques et politiques. 1. Première partie : Histoire 106regret à l'égard <strong>de</strong> l'union sacrée d'<strong>au</strong>trefois, baptisée « socialisme du front » ;ce fanatisme, qu'exaspère une savante démagogie, va parfois, chez les femmes,jusqu'à une fureur presque hystérique contre les ouvriers conscients.Mais, dans l'ensemble du mouvement hitlérien, la propagan<strong>de</strong> nationalistes'appuie avant tout sur le sentiment que les Allemands éprouvent, à tort ou àraison, d'être écrasés moins par leur propre capitalisme que par le capitalisme<strong>de</strong>s pays victorieux ; il en résulte quelque chose <strong>de</strong> fort différent du nationalismesot et cocardier que l'on connaît en France, une propagan<strong>de</strong> qui,essayant en outre <strong>de</strong> persua<strong>de</strong>r que la plupart <strong>de</strong>s capitalistes d'Allemagne sontjuifs, s'efforce <strong>de</strong> poser les termes <strong>de</strong> capitaliste et d'Allemand comme <strong>de</strong>uxtermes antagonistes. On peut mesurer la puissance <strong>de</strong> rayonnement quepossè<strong>de</strong> en ce moment la classe ouvrière alleman<strong>de</strong> par le fait que le partihitlérien doit présenter le patriotisme lui-même comme une forme <strong>de</strong> la luttecontre le capital.Même sous cette forme, la propagan<strong>de</strong> nationaliste touche assez peu lesouvriers allemands, et les ouvriers hitlériens eux-mêmes. Dans leurs discussionsavec les communistes, la question nationale reste le plus souvent <strong>au</strong>second plan ; <strong>au</strong> premier plan se posent les questions <strong>de</strong> classe ; tout <strong>au</strong> plus se<strong>de</strong>man<strong>de</strong>-t-on dans quelle mesure il est sage <strong>de</strong> compter sur les ouvriers <strong>de</strong>s<strong>au</strong>tres pays. Dans l'ensemble, les ouvriers hitlériens sont corrompus par leurparticipation à un tel mouvement be<strong>au</strong>coup moins qu'on ne pourrait s'yattendre. Leur sentiment dominant est une haine violente à l'égard du « système», comme ils disent, haine qui s'étend <strong>au</strong>ssi <strong>au</strong>x social-démocrates, considéréscomme les soutiens du régime, et même <strong>au</strong>x communistes, accusés <strong>de</strong>collusion avec la social-démocratie ; car les ouvriers hitlériens, qui se croientengagés dans un mouvement révolutionnaire, s'étonnent sincèrement que lescommunistes veuillent s'unir <strong>au</strong>x réformistes contre eux. De plus, le régimerusse leur semble avoir bien <strong>de</strong>s points communs avec le régime capitaliste.« Vous voulez une nation <strong>de</strong> prolétaires, disent-ils <strong>au</strong>x communistes ; Hitlerveut supprimer le prolétariat. » Que désirent-ils donc ? Un régime idyllique,où les ouvriers, assurés d'une certaine indépendance par la possession d'unlopin <strong>de</strong> terre, seraient en outre défendus contre les patrons trop rapaces par unÉtat tout-puissant et plein <strong>de</strong> soins paternels. Quant <strong>au</strong> programme économique,ils ne s'en inquiètent guère ; il a pu être modifié considérablement à leurinsu. Ils se reposent <strong>de</strong> tous les soucis <strong>de</strong> réalisation pratique sur celui qu'onnomme « le chef », bien qu'il ne dirige pas grand-chose, c'est-à-dire Hitler. Enréalité, ce qui les attire <strong>au</strong> mouvement national-socialiste, c'est, tout commeles intellectuels et les petits bourgeois, qu'ils y sentent une force. Ils ne seren<strong>de</strong>nt pas compte que cette force n'apparaît si puissante que parce qu'ellen'est pas leur force, parce qu'elle est la force <strong>de</strong> la classe dominante, leurennemi capital ; et ils comptent sur cette force pour suppléer à leur proprefaiblesse, et réaliser, ils ne savent comment, leur rêve confus.*<strong>Les</strong> social-démocrates sont, <strong>au</strong> contraire, <strong>de</strong>s gens raisonnables, que lasituation n'a pas encore réduits <strong>au</strong> désespoir, et qui refusent <strong>de</strong> se lancer dans<strong>de</strong>s aventures. C'est dire que la social-démocratie, bien qu'elle compte dansses rangs <strong>de</strong>s petits bourgeois et <strong>de</strong>s chômeurs, s'appuie surtout sur <strong>de</strong>souvriers qui travaillent. Elle a établi son emprise <strong>au</strong> cours <strong>de</strong>s années <strong>de</strong>prospérité, et principalement par l'intermédiaire <strong>de</strong>s syndicats dont elle n'a

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