11.08.2015 Views

“Histoire” livre de Mme Simone Weil au format PDF - Les Classiques ...

“Histoire” livre de Mme Simone Weil au format PDF - Les Classiques ...

“Histoire” livre de Mme Simone Weil au format PDF - Les Classiques ...

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

<strong>Simone</strong> <strong>Weil</strong>, Écrits historiques et politiques. 1. Première partie : Histoire 18les soins <strong>de</strong> la maison, du foyer, <strong>de</strong>s champs, sont laissés <strong>au</strong>x femmes, <strong>au</strong>xvieillards et <strong>au</strong>x faibles. Eux restent dans la torpeur. Étrange diversité <strong>de</strong>nature, qui fait que les mêmes hommes ont tant d'amour pour l'inaction et <strong>de</strong>haine pour la tranquillité. »Dans leur goût <strong>de</strong>s combats, certains se souciaient pourtant <strong>de</strong> la justice,s'il f<strong>au</strong>t croire Tacite ; témoins les Ch<strong>au</strong>ques, qui étaient, il est vrai, alliés <strong>de</strong>sRomains. « Ce territoire immense, les Ch<strong>au</strong>ques ne l'occupent pas seulement,ils le remplissent ; peuple illustre entre les Germains, et qui choisit <strong>de</strong> défendresa gran<strong>de</strong>ur par la justice. Dépourvus d'avidité et <strong>de</strong> cru<strong>au</strong>té, tranquilles etse tenant à part, ils ne provoquent <strong>au</strong>cune guerre, ils ne dévastent rien par lespillages ou les larcins. Le plus grand témoignage <strong>de</strong> leur vaillance et <strong>de</strong> leurpuissance est que, quand ils sont les plus forts, ils n'en profitent pas pour faire<strong>de</strong>s injustices. »Ce qui frappe le plus chez les Germains <strong>de</strong> Tacite, ce qui les met le plusloin et <strong>de</strong>s sujets ou citoyens romains <strong>de</strong> leur temps et <strong>de</strong>s Allemands <strong>de</strong> 1939,c'est qu'ils étaient libres. « <strong>Les</strong> rois mêmes n'ont pas une puissance absolue ouarbitraire ; quant <strong>au</strong>x chefs, c'est l'exemple plutôt que le comman<strong>de</strong>ment, s'ilssont résolus, s'ils se distinguent, s'ils combattent <strong>de</strong>vant les lignes, c'estl'admiration qui fait leur <strong>au</strong>torité. Au reste, il n'est licite à personne <strong>de</strong> sévir,<strong>de</strong> mettre en prison ou même <strong>de</strong> frapper, sinon <strong>au</strong>x prêtres ; et ils ne le fontpas en guise <strong>de</strong> châtiment, ni sur l'ordre du chef, mais comme par le comman<strong>de</strong>mentdu dieu qu'ils croient présent <strong>au</strong>x batailles... <strong>Les</strong> princes délibèrent <strong>de</strong>saffaires <strong>de</strong> faible importance, le peuple tout entier <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s affaires, mais<strong>de</strong> telle manière que les affaires mêmes qui dépen<strong>de</strong>nt du peuple sont traitéespar les princes... Un roi, un prince, selon l'âge, la noblesse, la réputationmilitaire, l'éloquence <strong>de</strong> chacun sont entendus ; ils ont <strong>de</strong> l'<strong>au</strong>torité pourpersua<strong>de</strong>r plutôt qu'un pouvoir <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>ment. » Il n'y a pas d'impôtsprélevés par contrainte. « <strong>Les</strong> peuples ont coutume d'apporter d'eux-mêmes<strong>au</strong>x princes, chaque homme pour son compte, du bétail ou du blé ; dons reçuscomme un honneur et qui subviennent en même temps <strong>au</strong>x besoins. » <strong>Les</strong>esclaves mêmes sont presque libres. « Ils n'en usent pas à notre mo<strong>de</strong>, pour<strong>de</strong>s services déterminés dans la maison. Chaque esclave est souverain dansson domaine et son foyer. Le maître exige <strong>de</strong> lui, comme d'un colon, une certainequantité <strong>de</strong> froment, <strong>de</strong> bétail ou <strong>de</strong> vêtements ; c'est dans cette mesureque l'esclave obéit... Frapper un esclave, le punir par <strong>de</strong>s chaînes ou <strong>de</strong>strav<strong>au</strong>x est chose rare ; il arrive qu'on en tue, non pour la discipline et commechâtiment, mais dans l'emportement <strong>de</strong> la colère, comme on tue un ennemiparticulier, s<strong>au</strong>f qu'on le peut impunément... Le maître et l'esclave ne sedistinguent par <strong>au</strong>cun raffinement dans l'éducation ; ils passent leur enfance <strong>au</strong>milieu du même bétail, sur le même sol, jusqu'à ce que l'âge sépare ceux quisont libres et que le courage les fasse reconnaître. »Il serait trop long <strong>de</strong> reproduire les vives louanges que fait Tacite <strong>de</strong>smœurs <strong>de</strong>s Germains, <strong>de</strong> leur chasteté, <strong>de</strong> leur hospitalité, <strong>de</strong> leur générosité.« Écarter <strong>de</strong> son toit n'importe quel mortel est regardé comme un crime... Nulne fait <strong>de</strong> différence entre les gens qu'on connaît et ceux qu'on ne connaît pas,quant <strong>au</strong> droit <strong>de</strong> l'hospitalité. Si l'hôte qui part <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quelque chose, lacoutume est <strong>de</strong> le lui donner ; on lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> avec la même facilité. Ils aimentles présents, mais sans <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> reconnaissance pour ceux qu'ils donnent,sans en accor<strong>de</strong>r pour ceux qu'ils reçoivent. »

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!