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“Histoire” livre de Mme Simone Weil au format PDF - Les Classiques ...

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<strong>Simone</strong> <strong>Weil</strong>, Écrits historiques et politiques. 1. Première partie : Histoire 71mais qui n'en désiraient pas moins voir finir l'État corporatif, et d'<strong>au</strong>tre partpar le peuple. Le duc d'Athènes s'appuya principalement, pendant les quelquesmois qu'il régna, sur les ouvriers, grâce <strong>au</strong>xquels il espérait pouvoir résister àl'hostilité <strong>de</strong> la h<strong>au</strong>te bourgeoisie. Il donna satisfaction <strong>au</strong>x teinturiers, qui seplaignaient d'être payés avec <strong>de</strong>s années <strong>de</strong> retard et d'être sans recours légal,et qui <strong>de</strong>mandaient à constituer un vingt-<strong>de</strong>uxième art ; il organisa lesouvriers <strong>de</strong>s ateliers <strong>de</strong> laine, non pas en une corporation, mais en une associationarmée. Peu après, il fut renversé par une émeute à laquelle presquetoute la population prit part, et où il n'eut pour défenseurs que <strong>de</strong>s bouchers etquelques ouvriers ; l'art <strong>de</strong>s teinturiers ne fut pas créé, mais les prolétaires <strong>de</strong>la laine gardèrent leurs armes et s'en servirent dans les années suivantes. À ladémagogie du duc d'Athènes qui, <strong>au</strong> mépris du droit corporatif, donnaitsatisfaction à toutes les revendications <strong>de</strong>s ouvriers <strong>de</strong> la laine, succédait laplus brutale dictature capitaliste. Aussi les révoltes éclatèrent-elles bientôt. En1343, 1 300 ouvriers se soulèvent ; en 1345, nouve<strong>au</strong> soulèvement, dirigé parun car<strong>de</strong>ur, et ayant pour objectif l'organisation <strong>de</strong>s ouvriers <strong>de</strong> la laine. Lagran<strong>de</strong> peste <strong>de</strong> Florence, qui décime la classe ouvrière, raréfie la maind'oeuvreet provoque ainsi une h<strong>au</strong>sse <strong>de</strong>s salaires telle que l’arte <strong>de</strong>lla lanadoit établir <strong>de</strong>s taxes, rend la lutte <strong>de</strong> classes plus aiguë encore. Après unecrise provoquée par la guerre contre Pise, et qui arrête momentanément lesconflits, le retour <strong>de</strong> la prospérité, par un phénomène qui s'est fréquemmentreproduit <strong>de</strong>puis lors, amène une grève <strong>de</strong>s teinturiers qui dure <strong>de</strong>ux ans et setermine par une défaite, en 1372 ; mais cette défaite ne met pas fin à lafermentation <strong>de</strong>s couches laborieuses.Cette fermentation coïnci<strong>de</strong> avec un conflit entre la petite bourgeoisied'une part, et la gran<strong>de</strong> bourgeoisie, unie dans une certaine mesure à la noblesse,<strong>de</strong> l'<strong>au</strong>tre. <strong>Les</strong> nobles, en tant que classe, ont été définitivement battusquand, après la chute du duc d'Athènes, ils ont tenté <strong>de</strong> s'emparer du pouvoir ;mais la plupart <strong>de</strong>s familles nobles sont alliées à la h<strong>au</strong>te bourgeoisie àl'intérieur du « parti guelfe ». Ce parti guelfe s'est formé dans la lutte, <strong>de</strong>puislongtemps terminée, <strong>de</strong>s Guelfes et <strong>de</strong>s Gibelins ; la confiscation <strong>de</strong>s biens <strong>de</strong>sGibelins lui a donné richesse et puissance. Devenu l'organisation politique <strong>de</strong>la h<strong>au</strong>te bourgeoisie, il domine la cité <strong>de</strong>puis la chute du duc d'Athènes, f<strong>au</strong>sseles scrutins, profite d'une mesure d'exception prise <strong>au</strong>trefois contre lesGibelins et <strong>de</strong>meurée en vigueur pour écarter ses adversaires <strong>de</strong>s fonctionspubliques. Quand, malgré les manœuvres du parti guelfe, Salvestro <strong>de</strong> Medici,un <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> la petite bourgeoisie, <strong>de</strong>vient, en juin 1378, gonfalonier <strong>de</strong>justice, et quand il propose <strong>de</strong>s mesures contre les nobles et contre le partiguelfe, le conflit <strong>de</strong>vient aigu. <strong>Les</strong> compagnies <strong>de</strong>s arts <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt dans la rueen armes ; les ouvriers les soutiennent et mettent le feu à quelques riches<strong>de</strong>meures et <strong>au</strong>x prisons, qui sont pleines <strong>de</strong> prisonniers pour <strong>de</strong>ttes. Finalement,Salvestro <strong>de</strong> Medici a satisfaction. Mais, comme dit Machiavel, « qu'onse gar<strong>de</strong> d'exciter la sédition dans une cité en se flattant qu'on l'arrêtera ouqu'on la dirigera à sa guise ».De la direction <strong>de</strong> la petite et moyenne bourgeoisie, le mouvement tombesous celle du prolétariat. <strong>Les</strong> ouvriers restent dans la rue ; les arts mineurs lesappuient ou laissent faire. Et déjà apparaît le trait qui se reproduira spontanémentdans les insurrections prolétariennes françaises et russes : la peine <strong>de</strong>mort est décrétée par les insurgés contre les pillards. Autre trait propre <strong>au</strong>xsoulèvements <strong>de</strong> la classe ouvrière, le mouvement n'est nullement sangui-

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