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“Histoire” livre de Mme Simone Weil au format PDF - Les Classiques ...

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<strong>Simone</strong> <strong>Weil</strong>, Écrits historiques et politiques. 1. Première partie : Histoire 74en majeurs et en mineurs. Il y en eut sept majeurs et quatorze mineurs... Maislorsqu'on organisa les arts, be<strong>au</strong>coup <strong>de</strong> métiers <strong>au</strong>xquels s'adonnaient lemenu peuple et la basse plèbe restèrent sans art propre ; et ceux qui les exerçaientfurent subordonnés <strong>au</strong>x arts avec lesquels ils se trouvaient en rapports.Il en résulta que, lorsqu'ils étaient mécontents <strong>de</strong> leurs salaires, ou, d'unemanière générale, opprimés par leurs maîtres, ils n'avaient d'<strong>au</strong>tre recours queles magistrats <strong>de</strong>s arts <strong>au</strong>xquels ils étaient soumis ; et il ne leur semblaitjamais que ces magistrats leur rendissent justice comme il convenait. De tousles arts, celui <strong>au</strong>quel le plus grand nombre d'ouvriers se trouvait subordonné<strong>de</strong> la sorte était l'art <strong>de</strong> la laine ; il était le plus puissant <strong>de</strong> tous et le premieren <strong>au</strong>torité, et nourrissait <strong>de</strong> son industrie, comme il fait encore, la plus gran<strong>de</strong>partie <strong>de</strong> la plèbe et du menu peuple.Ainsi ces hommes <strong>de</strong> la plèbe, ceux qui étaient soumis à l'art <strong>de</strong> la lainecomme ceux qui dépendaient <strong>de</strong>s <strong>au</strong>tres arts, étant pleins <strong>de</strong> ressentiment, et<strong>au</strong>ssi <strong>de</strong> peur à c<strong>au</strong>se <strong>de</strong>s incendies et <strong>de</strong>s vols qu'ils avaient commis, seréunirent à plusieurs reprises, la nuit, en secret, pour parler <strong>de</strong>s événementspassés et examiner les dangers qui les menaçaient. Là l'un d'entre eux, plusar<strong>de</strong>nt et plus expérimenté que les <strong>au</strong>tres, parla <strong>de</strong> la sorte pour animer sescompagnons : « Si nous <strong>de</strong>vions en ce moment délibérer pour savoir s'il f<strong>au</strong>tprendre les armes, brûler et piller les maisons <strong>de</strong>s citoyens, dépouiller l'Église,je serais <strong>de</strong> ceux qui jugeraient que cela mérite réflexion ; et peut-être serais-jed'avis <strong>de</strong> préférer une p<strong>au</strong>vreté tranquille à un gain périlleux. Mais puisque lesarmes sont prises et qu'il y a déjà be<strong>au</strong>coup <strong>de</strong> mal <strong>de</strong> fait, il me semble quenous <strong>de</strong>vons chercher par quel moyen conserver les armes et parer <strong>au</strong> dangeroù nous mettent les délits commis par nous... Vous voyez que toute la ville estpleine <strong>de</strong> rancune et <strong>de</strong> haine contre nous; les citoyens se réunissent, lesprieurs se joignent <strong>au</strong>x <strong>au</strong>tres magistrats. Croyez que l'on prépare <strong>de</strong>s piègescontre nous et que <strong>de</strong> nouve<strong>au</strong>x périls menacent nos têtes. Nous <strong>de</strong>vons doncchercher à obtenir <strong>de</strong>ux choses et assigner à nos délibérations un double but :à savoir d'une part ne pas être châtiés pour ce que nous avons fait les joursprécé<strong>de</strong>nts, d'<strong>au</strong>tre part pouvoir vivre avec plus <strong>de</strong> liberté et plus <strong>de</strong> bien-êtreque par le passé. Il convient à cet effet, à ce qu'il me semble, si nous voulonsnous faire pardonner les f<strong>au</strong>tes anciennes, d'en commettre <strong>de</strong> nouvelles, <strong>de</strong>redoubler les excès, <strong>de</strong> multiplier vols et incendies et <strong>de</strong> chercher à entraînerun grand nombre <strong>de</strong> compagnons. Car là où il y a be<strong>au</strong>coup <strong>de</strong> coupables,personne n'est châtié ; les petites f<strong>au</strong>tes sont punies, celles qui sont importanteset graves sont récompensées. Et quand un grand nombre <strong>de</strong> gens souffrent,la plupart ne cherchent pas à se venger, parce que les injures généralessont supportées plus patiemment que les particulières. Ainsi, en multipliant lemal, nous trouverons plus facilement le pardon et nous verrons s'ouvrir <strong>de</strong>vantnous la voie qui nous mènera vers les buts que nous désirons atteindre pourêtre libres. Et nous allons, me semble-t-il, à une conquête certaine ; car ceuxqui pourraient nous faire obstacle sont désunis et riches ; leur désunion nousdonnera la victoire, et leurs richesses, une fois <strong>de</strong>venues nôtres, nous permettront<strong>de</strong> la maintenir 1 . Ne vous laissez pas effrayer par cette ancienneté dusang dont ils se targuent ; car tous les hommes, ayant eu une même origine,sont également anciens et la nature nous a tous faits sur un même modèle.Déshabillés et nus, vous seriez tous semblables ; revêtons leurs habits, qu'ils1 D'après cette formule, Machiavel concevait l'insurrection <strong>de</strong>s Ciompi commeessentiellement dirigée vers l'expropriation <strong>de</strong>s riches. (Note <strong>de</strong> S. W.)

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