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“Histoire” livre de Mme Simone Weil au format PDF - Les Classiques ...

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<strong>Simone</strong> <strong>Weil</strong>, Écrits historiques et politiques. 1. Première partie : Histoire 133giques. <strong>Les</strong> syndicats continuent à régner dans les entreprises ; et, jusqu'ici, ilsréussissent à briser tous les mouvements <strong>de</strong> quelque envergure <strong>au</strong>xquels ilss'opposent. La bure<strong>au</strong>cratie réformiste continue à tenir en main les rouages <strong>de</strong>la production. <strong>Les</strong> ouvriers regimbent, mais elle fait ce qu’elle veut.Que veutelle? Conserver ses bure<strong>au</strong>x. Conserver les organisations, sans se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r àquoi elles servent. Dans cette tâche, les bonzes sont aidés par <strong>de</strong>s militantssincères, qui, à force <strong>de</strong> s'être dévoués pour les organisations, les considèrentcomme <strong>de</strong>s fins en soi. Or, quel danger menace ces organisations, dans lecapitalisme, comme disait ce fonctionnaire syndical, ne peut se passer ? Unseul : la guerre civile. Une insurrection ouvrière commencerait par les balayer,une attaque à main armée <strong>de</strong>s ban<strong>de</strong>s hitlériennes les briserait. Il s'agit doncd'éviter les formes aiguës <strong>de</strong> la lutte <strong>de</strong>s classes, <strong>de</strong> conserver la paix à toutprix, c'est-à-dire <strong>au</strong> prix <strong>de</strong> n'importe quelle capitulation. Accepter un régimefasciste ne ferait sans doute pas peur <strong>au</strong>x bonzes ; d'<strong>au</strong>tant moins peur que lesmesures <strong>de</strong> capitalisme d'État que le fascisme comporte apparaîtraient facilementcomme « un morce<strong>au</strong> <strong>de</strong> socialisme » à <strong>de</strong>s gens pour qui le socialismen'est pas <strong>au</strong>tre chose que le capitalisme d'État. En revanche le front uniqueleur fait peur ; ils savent, comme tout le mon<strong>de</strong>, que Kerensky <strong>au</strong>rait mieuxfait <strong>de</strong> s'allier à Kornilov qu'à Lénine. Rien n'égale le ton <strong>de</strong> haine avec lequelils parlent du parti communiste. Au reste ils répètent leurs belles parolesd'<strong>au</strong>trefois, mais sans conviction ; par moments leurs contradictions prouventqu'ils mentent, et n'ont pas d'illusions. « On ne peut aller <strong>au</strong> socialisme qu'enpassant par la démocratie », disent-ils. Mais, en août, ils ont affirmé que,seuls, les moments <strong>de</strong> crise aiguë sont favorables à la proposition <strong>de</strong> mesuressocialistes. Comme ces moments sont toujours ceux ou la démocratie estsuspendue, et où la social-démocratie n'a nulle part <strong>au</strong> pouvoir, c'est là unaveu d'impuissance. Ils disent <strong>au</strong>ssi : « la question n'est pas : Allemagne fascisteou Allemagne soviétique, mais Allemagne fasciste ou république <strong>de</strong>Weimar ». Ce n'est pas par ces formules creuses que les bonzes peuvententraîner les ouvriers. Mais comment les entraînent-ils ?Quand les ouvriers allemands, sur qui l'on comptait pour assurer la paix dumon<strong>de</strong>, se sont trouvés <strong>de</strong>vant la guerre, leur désarroi a eu pour c<strong>au</strong>se, nonseulement les mensonges nationalistes, mais <strong>au</strong>ssi le fait qu'ils n'avaientqu'une organisation, et que cette organisation les envoyait à la guerre. <strong>Les</strong>ouvriers allemands ont une peine infinie à se résoudre à une action non organisée.Aussi, s'ils étaient dans la même situation à présent, comprendrait-onqu'ils se laissent mener par la bure<strong>au</strong>cratie réformiste. Car la tactiqueréformiste est la seule raisonnable à l'intérieur du régime, et, par suite, pourquiconque ne veut pas ou n'ose pas briser le régime. Cette tactique, c'est, pardéfinition, la tactique du moindre mal. Le régime est m<strong>au</strong>vais ; si on ne lebrise pas, il f<strong>au</strong>t s'arranger pour y être le moins mal possible. Quand labourgeoisie est forcée par la crise <strong>de</strong> resserrer son étreinte, la tactique dumoindre mal est nécessairement une tactique <strong>de</strong> capitulation. <strong>Les</strong> vieux, qui,en pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> crise, continuent à penser comme ils pensaient avant la crise, s'yplient tout naturellement. <strong>Les</strong> jeunes crient qu'ils veulent lutter ; mais commeils n'osent pas engager la lutte pour briser tout le système <strong>de</strong> production, etque chacun sent bien, tout en se gardant <strong>de</strong> le dire, qu'il n'y a pas d'<strong>au</strong>treobjectif <strong>de</strong> lutte, ils acceptent finalement, eux <strong>au</strong>ssi, <strong>de</strong> capituler. Encore unefois, tout cela se comprendrait fort bien dans un prolétariat désarmé, dont lesorganisations seraient <strong>au</strong>x mains <strong>de</strong> ses ennemis.

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