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“Histoire” livre de Mme Simone Weil au format PDF - Les Classiques ...

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<strong>Simone</strong> <strong>Weil</strong>, Écrits historiques et politiques. 1. Première partie : Histoire 26Dans la pério<strong>de</strong> qui suivit, les <strong>de</strong>ux hommes qui exerçaient alors la plusgran<strong>de</strong> <strong>au</strong>torité morale en Grèce, Aristaenos et Philopoemen, furent en désaccordseulement pour savoir s'il fallait exécuter n'importe quel ordre donné parles Romains, sans jamais même oser une remontrance, ou si l'on pouvaitparfois se permettre <strong>de</strong> protester, avec la résolution d'obéir si la protestationrestait vaine. Aristaenos disait que, si l'on ne peut pas faire ce qui esthonorable, il f<strong>au</strong>t se résigner à faire ce qui est expédient ; et que si l'on ne peutse montrer capable <strong>de</strong> ne pas obéir, il n f<strong>au</strong>t même pas oser en parler.Philopoemen répondait qu'alors la condition <strong>de</strong>s Achéens ne différerait pas <strong>de</strong>celle <strong>de</strong>s gens <strong>de</strong> Sicile et <strong>de</strong> Capoue, dont la servitu<strong>de</strong> était ouvertementreconnue ; qu'il savait bien qu'à un moment donné les Grecs seraient contraintsd'exécuter tout ce que Rome leur ordonnerait, mais qu'il s'agissait <strong>de</strong>savoir s'il fallait hâter ou retar<strong>de</strong>r ce moment.Lors <strong>de</strong> la guerre contre Persée, l'intérêt <strong>de</strong> la Grèce à ce que la Macédoinene fût pas vaincue était évi<strong>de</strong>nt, et Polybe laisse bien entendre, à travers <strong>de</strong>sréticences d'esclave, qu'à peu près tous les Grecs le sentaient. Mais presque<strong>au</strong>cune cité n'osa agir à cet effet. Rho<strong>de</strong>s offrit sa flotte à Rome et refusad'ai<strong>de</strong>r Persée, même <strong>au</strong> cas d'une agression non provoquée <strong>de</strong>s Romainscontre lui ; mais, une fois la guerre engagée, elle fit <strong>de</strong>s tentatives d médiation<strong>au</strong>près <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux adversaires. Cela suffit pour qu'après la victoire sur Persée leSénat, accusant Rho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> ne pas avoir souhaité cette victoire, délibérât poursavoir s'il fallait lui déclarer la guerre. <strong>Les</strong> délégués <strong>de</strong> Rho<strong>de</strong>s, voyant leursprotestations inutiles, s'abaissèrent <strong>au</strong> <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> la supplication et <strong>de</strong> lasoumission ; Tite-Live leur fait dire que, si Rome leur déclarait la guerre, ilsabandonneraient tous leurs biens intacts et viendraient tous à Rome, hommes,femmes et enfants, <strong>livre</strong>r leurs corps à l'esclavage. En fin <strong>de</strong> compte, grâce àun discours <strong>de</strong> Caton, ils s'en tirèrent avec un châtiment moindre.<strong>Les</strong> Achéens avaient offert une armée à Rome et envoyé à cet effet unedéputation dont Polybe fit partie ; néanmoins, une fois la guerre finie, le Sénatfit venir plusieurs milliers <strong>de</strong> citoyens grecs réputés, parmi lesquels Polybelui-même ; leur crime était <strong>de</strong> n'avoir désiré la victoire ni <strong>de</strong> Rome ni <strong>de</strong> laMacédoine et d'avoir attendu passivement l'issue <strong>de</strong> la lutte. Le Sénat refusaégalement <strong>de</strong> les laisser repartir et <strong>de</strong> les juger, preuve qu'<strong>au</strong>cune accusationne pouvait être portée contre eux ; ils furent dispersés à travers l'Italie, s<strong>au</strong>fPolybe qui fut recueilli à Rome par les Scipion. <strong>Les</strong> cités grecques ne selassèrent pas d'envoyer en leur faveur <strong>de</strong>s députations qui venaient avec <strong>de</strong>srame<strong>au</strong>x <strong>de</strong> suppliants ; mais ce fut en vain. La Grèce resta livrée à Callicrateet à ses amis, tellement haïs que les enfants les traitaient <strong>de</strong> traîtres en pleinerue. La plupart <strong>de</strong>s malheureux astreints à la rési<strong>de</strong>nce forcée en Italie ymoururent ; les <strong>au</strong>tres ne furent libérés qu'après quinze ans et ne recouvrèrentpas leurs droits civiques.Quand Rome déclara la guerre à Carthage, les Grecs tentèrent <strong>de</strong> secouerle joug <strong>de</strong>s traîtres vendus à Rome ; sans doute ils étaient poussés par l'indignation<strong>de</strong>vant une agression si cruelle, et <strong>au</strong>ssi par l'espoir que Rome,occupée en Afrique, ne pourrait exercer <strong>au</strong>cune répression contre eux. Commeil est naturel, les chefs qui s'imposèrent alors ne se trouvèrent pas à la h<strong>au</strong>teurd'une pareille tâche. Rome se contenta d'agir par voie diplomatique jusqu'à la<strong>de</strong>struction <strong>de</strong> Carthage. La terreur où tomba à ce moment la Grèce faitinvinciblement penser, mais en bien plus atroce, <strong>au</strong>x pays sur lesquels s'étend

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