africa - Institut National du Patrimoine
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Africa XIII/ Sacrifice, sacre et fête aux premiers temps de l'Islam Nabil GRISSA<br />
offerte , et notamment la viande, était le signe même de la générosité des notables<br />
envers les étrangers ou les plus démunis (55) .<br />
Dans tous les cas que nous avons cité, il y a un point commun qui revient<br />
presque toujours, c'est la communion. Ibn Hishâm dit que les Arabes sacrifiaient aux<br />
pieds de leurs divinités et partageaient, ensuite, la viande sacrificielle entre les gens<br />
présents à la cérémonie (51) . Cet esprit de communication par le biais de la nourriture se<br />
retrouve partout dans les récits qu'on nous raconte sur les Arabes de la Djâhiliyya et<br />
même sur ceux des débuts de L'Islam.<br />
Ce phénomène anthropologique est, d'ailleurs, universel et comme le disent bien<br />
certains anthropologues " l'alimentation se trouve devenir le support, le moyen<br />
d'expression d'une série d'états d'âme profonds qui, en retour, donnent au comportement<br />
alimentaire une sorte d'âme que la rationalisation de l'instinct rend indispensable " (52) ,<br />
ou encore à propos des repas " symboles des relations humaines qu'ils codifient en<br />
même temps qu'ils les expriment, en connexion étroite avec les notions de pureté et<br />
d'impureté, ils sont eux-mêmes l'objet d'une réglementation minutieuse, fruit des<br />
représentations collectives les plus riches et des patterns socio-culturels les plus<br />
stables" (52) .<br />
Al-Alûsî nous rappelle, justement, que la Fête chez les Arabes ou Aïd ( ce qui<br />
revient cycliquement) était fondée sur le sacrifice et le repas communiel, en plus des<br />
jeux de hasard (53) . Il nous précise, encore,que les habitants de Médine avaient deux<br />
jours de fête que Muhammad avait remplacé par les deux fêtes islamiques de l'"Idhâ" et<br />
<strong>du</strong> "Fitr" ( fête de la rupture <strong>du</strong> jeûne de Ramadan) (54) .<br />
L'Islam a, donc, élevé le sacrifice au rang d'un acte de piété majeur faisant fi de<br />
l'aspect ludique que lui assignaient les Arabes, tout en gardant certaines de leurs<br />
coutumes ( de sacrifice et de banquets) et en éliminant les types de sacrifice purement<br />
païens ou voués au culte des ancêtres; enfin, l'Islam a défini un sacrifice de modèle<br />
abrahamique qui est devenu le point focal de la vie de chaque Musulman auquel il a été<br />
recommandé, d'ailleurs, d'en faire le déplacement jusqu'à la Mecque, si possible, sous<br />
forme de pèlerinage.<br />
II/Sacrifice et Sacré:<br />
Qu'en est-il, maintenant, <strong>du</strong> rapport entre le sacrifice et la conception <strong>du</strong> Sacré<br />
que se faisaient les Arabes avant l'Islam et aux premiers temps de l'Islam ?<br />
Commençons, d'abord, par regarder <strong>du</strong> côté des anciennes civilisations que nous<br />
connaissons assez bien afin de déblayer le terrain pour une meilleure compréhension <strong>du</strong><br />
domaine arabe.<br />
Sacrifice, Sacré et Fête(s) formaient une trilogie généralement inséparable dans<br />
l'Antiquité, avec - pour axe central - une notion plus ou moins élaborée <strong>du</strong> Sacré suivant<br />
le degré d'évolution de la société dont il s'agit, en partant de la fin de l'époque<br />
néolithique; il s'agit là, en effet, d'une époque décisive dans l'évolution de l'Humanité en<br />
général, époque qui a connu notamment la naissance des divinités chtoniennes et<br />
(50) Ibid, p.137-156 et p.241-242; al-Azraqî, op.cit., p.58, 78, 88-89, 103 etc..L'histoire de Hatim de Tayy' se trouve<br />
par exemple dans: Ibn c Abd Rabbih ( Ahmad ibn Muhammad): Al c Iqd al-Farîd, édition critique de Ahmad Amin et<br />
autres, le Caire, 1965, volume I, p. 334.<br />
(51) Ibn Hishâm, op.cit, p.85-87.<br />
(52) Tremolieres J. et Claudia J., Psychosociologie élémentaire de l'alimentation, dans: Manuel d'alimentation<br />
humaine, Paris, éd. sociales françaises, 1957; cité p.640 dans: L'anthropologie, sous la direction d'André AKOUN,<br />
Paris, Dictionnaire Marabout Université, 1974.<br />
(53) Al-Alûsî, op.cit., p.344-348.<br />
(54) Ibid, p.364-366.<br />
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