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africa - Institut National du Patrimoine

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Africa XIII/La conservation de l'héritage culturel: pourquoi, comment ? Naceur BAKLOUTI<br />

présent, un tel discours tombe dans l'insignifiance et le recours au patrimoine restera<br />

stérilet (1) .<br />

C'est pour cela qu'une relecture <strong>du</strong> patrimoine évitera de le considérer<br />

uniquement comme une charge à gérer qui engloutirait d'importants investissements<br />

(alors que d'autres secteurs sont considérés à tort ou à raison comme prioritaire tels le<br />

logement, la santé, l'é<strong>du</strong>cation...), mais en tant que legs culturel susceptible d'enrichir<br />

notre expérience et de nous permettre d'en avoir une vision dynamique et prospective.<br />

Car conserver permet certes de perpétuer les témoins d'une histoire glorieuse, mais cela<br />

ne doit pas con<strong>du</strong>ire à s'extasier devant eux au risque d'aboutir à un immobilisme. On<br />

sait que le savoir humain évolue par accumulation, et la science occidentale moderne en<br />

est un exemple éloquent puisqu'elle a généreusement puisé dans le legs mathématique<br />

greco-arabe (2) . La conservation est, dans cette perspective, une sorte de retour aux<br />

sources qui permettra bien sûr une meilleure connaissance de soi et l'affirmation d'une<br />

identité culturelle spécifique mais qui exprime aussi une certaine vision <strong>du</strong> présent et de<br />

l'avenir, un avenir qui exploiterait le meilleur <strong>du</strong> patrimoine et l'adapterait aux besoins<br />

d'une société en pleine mutation, confrontée aux problèmes de la modernité et <strong>du</strong><br />

développement et menacée par l'acculturation voire la déculturation. Nous pensons en<br />

effet que loin d'être paralysant, le recours au patrimoine dans une perspective de<br />

renouvellement pluridimensionnel permet une meilleure adéquation de l'homme à son<br />

milieu et lui garantit, par le respect dû à ses valeurs, équilibre et épanouissement.<br />

Quand on parle d'héritage culturel, de culture et de patrimoine, on ne peut<br />

s'empêcher de faire un peu de sémantique et de se pencher sur les définitions de ces<br />

termes. Quitte à enfoncer des portes ouvertes et à tomber dans la redite, étant enten<strong>du</strong><br />

qu'une abondante littérature a été écrite sur ce sujet et que bon nombre de spécialistes<br />

ont précisé et affiné ces notions ; mais une rapide digression aiderait peut-être à dégager<br />

quelques points de repères et par conséquent à mieux cerner le sens de ces propos.<br />

Eliminons tout d'abord les définitions limitatives qui ré<strong>du</strong>isent la culture aux<br />

seuls pro<strong>du</strong>its de l'esprit humain et aux aspects uniquement intellectuels de civilisation,<br />

et rejoignons les anthropologues dans leur discours sur la culture (3) . Il apparaît que<br />

celle-ci est un ensemble complexe et cohérent qui comprend toutes les pro<strong>du</strong>ctions<br />

humaines, qu'elles se rattachent aux domaines matériel ou intellectuel, indivi<strong>du</strong>el ou<br />

social ; en plus, elle est l'émanation d'une vision <strong>du</strong> monde et de représentations<br />

symboliques (4) . C'est elle qui, partant de leurs différentes expériences de l'histoire,<br />

distingue les peuples les uns des autres sans exclure les contacts entre eux. Ces contacts<br />

peuvent se limiter aux emprunts réciproques comme ils peuvent se tourner en rapports<br />

d'acculturation. Mais c'est elle aussi qui cristallise l'idée d'égalité entre les peuples.<br />

Alors que la culture est vécue au présent non seulement comme une résultante et<br />

un aboutissement, mais aussi comme une ouverture sur le futur, le patrimoine est perçu<br />

à travers ses différentes manifestations dans sa dimention historique; c'est, selon une<br />

formule lapidaire, la culture accumulée. L'accumulation suppose la transmission et<br />

intro<strong>du</strong>it la notion d'héritage; mais au-delà <strong>du</strong> rapport de synonymie apparent qui lie<br />

patrimoine et héritage culturel, ce dernier se distingue sémantiquement par son caractère<br />

assumé. L'héritage culturel, est en dernière analyse, le patrimoine assumé et pris en<br />

charge. Celui de la Tunisie, pays carrefour situé au centre de la méditerranée, ayant<br />

bénéficié de plusieurs apports de civilisation vite assimilés, est en ce sens riche et varié.<br />

Mais nous nous contenterons dans ces propos d'évoquer rapidement les pro<strong>du</strong>ctions<br />

(1)<br />

Ghanem H., "Autonomie de l'élément culturel", La dimension culturelle <strong>du</strong> Développement, C.E.R.S., Tunis,<br />

1991, pp. 116-117 (texte en langue arabe).<br />

(2)<br />

Moatassime A. "La dimension culturelle <strong>du</strong> développement ; une nouvelle illusion", p.74.<br />

(3)<br />

Malinowsky B. une théorie scientifique de la culture, version en langue française , Paris, Points, 1970, pp.35-38.<br />

(4)<br />

Alpha I, Sow, "Prolégomènes", Intro<strong>du</strong>ction à la culture <strong>africa</strong>ine U.N.E.S.C.O., 10/18, Paris 1977, p. 22.<br />

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