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africa - Institut National du Patrimoine

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Africa XIII/ ABOU-FIHR : un monument hydraulique hafside <strong>du</strong> XIIIème siècle : Archéologie et Histoire Adnan LOUHICHI<br />

L'exemple d'Abu-Fihr présente par contre quelques problèmes d'ordre<br />

typologique. D'un côté, il n'offre pas les éléments distinctifs autorisant son classement<br />

dans le modèle abbasside. Il rompt de ce fait avec la tradition kairouanaise. D'un autre<br />

côté, tout en présentant des points communs avec le modèle omeyyade, il nous paraît<br />

peu plausible de l'y classer. En effet, ce modèle <strong>du</strong> haut Moyen Age ne semble pas être<br />

devenu caractéristique de la culture islamique (30) . Il se distingue par des traits et des<br />

caractères spécifiques. G. Marçais pense qu'Abu-Fihr est un exemple annonciateur de la<br />

mode maghrébine de l'agdal (31) .<br />

Mais, il semble que l'agdal désigne surtout un type de jardin aristocratique <strong>du</strong><br />

Maroc moderne (32) . Ses origines se rattacheraient donc à une tradition médiévale dont<br />

les prototypes seraient hafsides tels que le parc de Ras et-Tabiya et Abu-Fihr et,<br />

mérinides tels que les "jardins de lalla Mîna" à Fès ej-Jdid.<br />

Les sources d'inspiration dans la conception d'Abu Fihr sont diverses. Les<br />

créateurs <strong>du</strong> jardin hafside semblent avoir réussi la synthèse d'un répertoire commun à<br />

l'ensemble <strong>du</strong> monde musulman d'alors. Ils auraient aussi puisé dans la tradition<br />

berbère. Cependant bien que cette dimension berbère ne manque pas d'attrait, nous<br />

nous imposons des réserves à son sujet car le terme même d'agdal n'est devenu répan<strong>du</strong><br />

qu'à l'époque moderne et au Maroc plus qu'ailleurs.<br />

"A Marrakech, on l'attribue à un vaste domaine avec des plantations, des pièces<br />

d'eau, des pavillons, des magasins. Dans son état actuel, il peut être considéré comme<br />

une créations de Moulay Abd ar-Rahman et date des environs de 1830" (33) .<br />

Dans les textes médiévaux Abu-Fihr est toujours précédé <strong>du</strong> mot " Jinan " ou "<br />

Bustan " et non point agdal. En outre les données archéologiques en notre possession<br />

sont tellement incomplètes qu'il nous paraît difficile de classer avec certitude le jardin<br />

d'Abu Fihr dans un type bien déterminé. L'agencement <strong>du</strong> pavillon par rapport à la<br />

pièce d'eau nous fait penser à cet autre pavillon nommé Qobba Asarak construit treize<br />

ans avant Abu Fihr. Nous ne le connaissons que d'après la description d'Ibn<br />

Khal<strong>du</strong>n (34) "Cet édifice forme un portique large et élevé dont la façade, tournée vers le<br />

couchant, est percée d'une grande porte à deux battants artistement travaillés en<br />

bois... Dans chacun des deux côtés qui touchent à celui de la façade s'ouvre une porte<br />

semblable à celle que nous venons de décrire. La porte principale donne sur un énorme<br />

escalier d'environ cinquante marches. Cet escalier est aussi large que le portique...<br />

Lors de la présentation des chevaux de tribut et pendant le revue des troupes, ainsi<br />

qu'aux jours de fêtes, le Sultan se tient dans ce pavillon, assis sur son trône, en face de<br />

la grande entrée... " (35) .<br />

Deux éléments attirent notre attention dans cette tribune <strong>du</strong> haut de laquelle le<br />

Sultan assistait au cérémonial de cour : la surélévation <strong>du</strong> pavillon et sa position<br />

saillante par rapport à la cour sur laquelle elle donne. Ce plan correspond à celui de la<br />

pièce d'eau d'Abu Fihr et son pavillon. Le plan de la Qobba Asarak fait penser, estime<br />

(30) Grabar P. 198<br />

(31) Encyclopédie de l'Islam... article Bustan.p.1387<br />

(32) Encyclopédie de l'Islam, GS. Colin,P253 :<br />

"L'agdal, mot berbère, emprunté par l'arabe parlé maghrébin désigne à l'origine un "pâturage naturel dont le<br />

propriétaire se réserve l'usage exclusif. Au Maroc le mot a pris le sens particulier de " vaste éten<strong>du</strong>e de terre de<br />

pacage, entourée de murailles et contiguë au palais <strong>du</strong> Sultan réservée à l'usage de sa cavalerie et son bétail". "De<br />

tels enclos existent dans chacune des villes impériales: Fès, Meknès, Rabat et Marrakech "<br />

(33) Marçais G. " Architecture...", p. 404.<br />

(34) Voir supra.<br />

(35) Ibn Khal<strong>du</strong>n, "Histoire...", p. 339<br />

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