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africa - Institut National du Patrimoine

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Africa XIII/Monastir au 19ème siècle, à propos de la ville et de l'urbanisme arabo-musulman Med Moncef M'HALLA<br />

"La population de Bannen descend de Sidi El Bannani originaire <strong>du</strong> Maroc et dont le<br />

tombeau se trouve dans une Koubba qui porte son nom... Outre cette famille, on trouve<br />

une fraction venue de Sidi Bennour, aux environs de Sfax". Le fondateur de Sayada est,<br />

dit-on, un personnage religieux venu <strong>du</strong> Maroc. Dans chacun de ces cas, on a affaire à un<br />

groupe d'origine commune, ayant un nom collectif, étant formé de descendants d'un<br />

ancêtre fondateur, venu d'ailleurs. Il s'agit d'un lignage, groupe de filiation dont les<br />

membres sont les descendants en ligne agnatique (patrilignage) d'un ancêtre commun,<br />

reconnu comme fondateur historique <strong>du</strong> groupe et vénéré en tant que saint propre (35) .<br />

Pour ces trois villages, mis à part les étrangers, à un lignage correspond un village.<br />

La population de Téboulba est divisée en deux groupes auxquels s'ajoute un<br />

autre, formé d'étrangers dit celui des "barrania-s" rassemblant des Djerbiens, des<br />

Methalith, des c Akara. Chacun des deux groupes, les Ouled Sidi Chebil et les Ouled<br />

Sidi Abdessalem ben c Aiech, ont pour fondateur un personnage originaire <strong>du</strong> Maroc<br />

reconnu par chacun comme saint ayant une zaouia. Il s'agit donc de deux lignages non<br />

apparentés par la filiation avec les "barrania-s", groupés dans des quartiers distincts<br />

autour d'une mosquée commune, qui forment le village.<br />

Voyons Moknine : six groupes se partagent cette localité. Ouled Kebila est<br />

reconnu comme étant le plus ancien ; la légende désigne une femme <strong>du</strong> nom de Kébila<br />

pour ancêtre de ce groupe et fondatrice <strong>du</strong> village. La fraction de Bab Eshak est<br />

d'origine berbère, appartenant aux laouta. Les Ouled Messaoud, noirs, se disent<br />

descendants d'un personnage religieux venu de la Segïa el Hamra. Il en est de même<br />

des Ouled Ahmed. Les Ouled Hmida se rapportent à Hmida fils <strong>du</strong> saint vénéré aux<br />

Béni Hassan. Les Ouled Moussa sont une fraction de la tribu des Souassi. A ceux-là<br />

s'ajoutent, en plus des juifs, les "barrania", étrangers (des gens de l'A c radh, des Ouled<br />

Saïd, des Mouansia...) domiciliés à Moknine. La division de l'espace <strong>du</strong> village est la<br />

projection de celle de la population en lignages occupant chacun un quartier propre.<br />

Ainsi on peut dire que, pour l'ensemble des villages, la filiation (patrilinéaire<br />

évidemment) est le principe de constitution des groupes sociaux répartis en quartiers<br />

"ethniques". La parenté est la charpente de l'organisation sociale.<br />

C'est aussi en terme de parenté et en repro<strong>du</strong>isant le découpage lignager que se<br />

présentent les institutions politiques : celle des "Kbar-s" et des cheikhs. Dans chaque<br />

village - lignage, à Lamta, Bennan et Sayada, , il y a un cheikh par localité. A<br />

Téboulba où il y a trois lignages dont celui regroupant les "barrania" -s, "chaque<br />

fraction a un cheich" nous dit-on. A Moknine, il y a "six fractions ayant chacune un<br />

cheikh", en plus de quatre autres porte-paroles des groupes étrangers soit au total 10<br />

cheikh-s; les juifs ayant à leur tête un caïd. A l'échelle de la communauté villageoise, un<br />

représentant, désigné par le Khalifa, coordonne cette multitude d'autorités, sans se<br />

substituer à elles. On remarque que la structure politique repro<strong>du</strong>it l'organisation<br />

lignagère. Quant au mode d'exercice de l'autorité, il est lié au consentement de<br />

l'assemblée des hommes <strong>du</strong> groupe, sanctionné par une "élection". Le cheikh est en fait<br />

élu par cooptation, avec l'accord de l'assemblée <strong>du</strong> groupe représentée par les "Grands" et<br />

par les porte-paroles des lignées qui le composent. Il l'est peut être pour sa richesse ou<br />

ses qualités (sagesse ou savoir, médiocre <strong>du</strong> reste...). Il a en tout cas une grande autorité<br />

et un prestige, ce qui lui permet, entre autres, de régler les conflits internes.<br />

Le village, comme par ailleurs la tribu, marque la limite au delà de laquelle le<br />

pouvoir central n'intervient pas directement. C'est une entité politiquement autonome,<br />

<strong>du</strong> moins dans son fonctionnement interne. Pour illustrer l'autonomie, somme toute<br />

relative, des villages vis à vis de l'Etat, signalons le fait militaire, celui <strong>du</strong> port d'armes et<br />

de la défense de la communauté villagoise, indice révélateur souligné par Ibn<br />

Khaldoun. A la veille et au cours de l'occupation française, l'intérêt des militaires va<br />

(35) Voir note étude : "Parenté et mariage en milieu oasien", dans Cahiers des Arts et traditions populaires<br />

I.N.A.A. n° 10.<br />

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