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africa - Institut National du Patrimoine

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Africa XIII/ La céramique médiévale en Tunisie état de la recherche (IXè-Xè siècles) AbdelAziz DAOULATLI<br />

Le Bleu et le Brun Hafside( XIIIè-XVè siècles ): La Kasbah de<br />

Tunis (22)<br />

Les fouilles de sauvetage menées à la Kasbah de Tunis <strong>du</strong>rant les années 70 ont<br />

permis d'exhumer de nombreux vestiges architecturaux et surtout un nombre considérable<br />

de céramiques de toutes époques à partir <strong>du</strong> XIIIème siècle et de toutes provenances.<br />

L'étude systématique de ce matériel est encore loin d'être faite. Seuls environ 2000<br />

tessons peints en bleu et brun sur fond blanc ont pu être triés, classés, restaurés, parmi<br />

lesquels on a pu reconstituer à peu près 530 pièces plus ou moins complètes. Il<br />

s'agit,in<strong>du</strong>bitablement, d'un lot unique en son genre capable de transformer toutes les<br />

données sur la pro<strong>du</strong>ction de la céramique en Ifriqiya au bas Moyen Age. Certes,<br />

plusieurs de ces pièces copient ou imitent les céramiques à reflets métalliques pro<strong>du</strong>its tant<br />

à Malaga qu'à Valencia dont on a découvert une bonne collection d'environ 270 tessons,<br />

ce qui laisserait supposer l'intervention de céramistes d'origine andalouse émigrés lors<br />

des premières vagues des années 1230 et tout au long des XIIIème, XIVème et XVème<br />

siècles. Mais l'originalité de la pro<strong>du</strong>ction tunisienne ne laisse aucun doute.<br />

L'étude stylistique a permis de distinguer trois grandes séries de bleu et de brun:<br />

Une première série de pièces ouvertes d'environ 270 sur les 470, se distingue par le<br />

triomphe de la géométrie pure qui fait appel à deux éléments de base : le rayon et le cercle.<br />

Ces deux éléments employés isolément ou combinés ont dégagé toutes sortes de<br />

compositions que les jeux, de couleurs : le blancs,bleu, brun ont enrichi notamment par<br />

l'usage des effets de l'alternance, de juxtaposition ou de l'opposition.Dans ces jeux la<br />

fantaisie n'est jamais absente comme les pièces à décor à roue tournoyante comme si un<br />

mouvement giratoire est venu l'animer. Puis de plus en plus la ligne pure s'est vue<br />

envahie par une certaine végétation qui peut atteindre parfois une profusion extrême tout<br />

en conservant l'ordonnance rayonnante initiale. La deuxième série suit des schémas<br />

directeurs dans lesquels le décor toujours rayonnant s'organise à partir soit d'un carré<br />

central comme dans les fameux carreaux de Kairouan, soit d'un triangle, soit d'un disque<br />

circulaire, cantonné de lobes réservés en blanc ou remplis d'arabesques ou occupés par<br />

des rameaux fleuris selon les cas. Cette ordonnance a fini par créer le fameux thème<br />

<strong>du</strong>“Tawq” ou couronne à lobes, qui peuvent remonter au milieu <strong>du</strong> plat ou en occuper le<br />

bord ou tourner tout au tour de la panse d'un vase.<br />

L'entrelacs suivant une ordonnance rayonnante ou étalé en arabesque couvrantes n'est pas<br />

absent. Il distingue certains plats peu nombreux mais assez significatifs tout comme<br />

l'ordonnance en tranches triangulaires où l'arbre de vie est alterné avec des triangles<br />

d'arabesques. Ce qui nous rapproche <strong>du</strong> décor des vases dits de l'Alhambra. Une<br />

troisième série est surtout remarquable par la présence d'animaux qui occupent le<br />

milieu des plats en évoluant dans un espace végétal plus ou moins conventionnel tels les<br />

. gazelles, les lièvres, les oiseaux, les poissons. Enfin deux navires sont dessinés avec tant<br />

de précision qu'il était aisé de les dater de la fin <strong>du</strong> XIVème et de les distinguer <strong>du</strong> navire<br />

peint en reflet métallique sur un plat jumeau trouvé également à la Kasbah de Tunis ou<br />

presque de celui trouvé à Malaga et de celui <strong>du</strong> Victoria and Albert Musem. .<br />

Cette céramique hafside bleu et brun ne s'éteindra pas naturellement d'une manière<br />

brutale au XVIème siècle. Elle sera certes envahie par la polychromie au riche décor<br />

végétal de tendance naturaliste. Mais à partir <strong>du</strong> XVIIème siècle, on lui trouvera des<br />

réminiscences dans la pro<strong>du</strong>ction de Qallaline à Tunis. Tout comme le jaune de Raqqada<br />

qui semblait pourtant avoir disparu de la scène au plus tard au XI ème siècle mais qu'on<br />

retrouvera quelques siècles plus tard à Djerba puis à Nabeul bien transformé mais gardant<br />

toujours l'éclat de son jaune ocre ou jaune citron.<br />

Mais l'importance de la céramique ne réside pas seulement dans son aspect<br />

esthétique ou dans sa valeur de témoignage d'une civilisation ou d'un mode de vie . Pour<br />

les hommes de sciences que nous sommes et pour les archéologues , elle constitue un<br />

(22) Idem.pp. 108-110.<br />

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