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africa - Institut National du Patrimoine

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Africa XIII/Diae et Action Saïda BEN MANSOUR<br />

en évidence jusqu'à la taille, la dextralité respectée semblable à la représentation<br />

syrienne. Un soin particulier accordé aux détails vestimentaires trahit la noblesse <strong>du</strong><br />

chasseur. Par contre, à Volubilis et à Thina le personnage est naïvement évoqué. Un<br />

trait d'union relie les mosaïque de volubilis et de Thina : ces pavements font allusion au<br />

danger des sources fréquentées par les divinités féminines: la surprise de Diane est<br />

figurée en corrélation avec Hylas et Narcisse.<br />

Par ailleurs, il est toutefois utile d'évoquer, pour ce thème précis, le châtiment<br />

de Tirésias, devenu aveugle parce qu'il a vu, dans la forêt, une divinité nue au bain, la<br />

divinité est non pas Diane mais Athéna ; le châtiment est différent mais le destin de<br />

Tirésias ressemble à celui d'Actéon.<br />

La métamorphose d'Actéon, dans la mosaïque de Shahba, est préfigurée par la<br />

présence d'un cerf au bas <strong>du</strong> pavement. Dans une telle symbolique, il est probable que<br />

l'auteur de la mosaïque de Dougga, ait pensé à une interprétation apparentée en<br />

"synthétisant" artistiquement ses animaux qui suggèrent le "cerf", animal de Diane.<br />

L'attitude des divinités de Dougga et de Thina est semblable à celle des déesses<br />

figurées sur les mosaïques découvertes à Timgad et en Syrie. Par contre sur les deux<br />

pavements mis au jour à Volubilis dans la maison dite <strong>du</strong> "Bain des Nymphes" et dans<br />

celle de "Vénus", Diane est représentée debout dans la source contrairement à la<br />

position classique qu'on a coutume de lui attribuer . A Dougga et à Thina la divinité est<br />

isolée des personnages accessoires de la scène ; alors que sur les monuments de Syrie,<br />

de Timgad et de Volubilis, Diane est assistée de Nymphes servantes. Elle est en outre<br />

parée de bijoux, nimbée ou coiffée d'un diadème. La nature "astrale" de Diane révélée<br />

dans ces dernières mosaïques est suggérée sur le pavement de Dougga où la divinité<br />

"rythme les travaux et les jours des paysans et préside, en quelque sorte, à un calendrier<br />

agreste"; d'où l'évocation d'un paysage à l'aspect rustique qui se tra<strong>du</strong>it par un décor<br />

conventionnel de bergerie (12) . Sur certaines mosaïques, comme c'est le cas en Syrie,<br />

les personnages sont identifiés par les inscriptions qui les accompagnent. Cependant,<br />

dans toutes les interprétations, Diane, la pudeur mêlée à l'agressivité, lève la main droite<br />

qui devait prendre de l'eau pour accomplir le drame d'Actéon.<br />

Bien qu'elle se rapporte à la version de la surprise, la mosaïque de Dougga se<br />

distingue de toutes les oeuvres évoquant le même épisode. Celle-ci demeure, en outre,<br />

plus au moins conforme au récit d'Ovide (13) tra<strong>du</strong>it par une grotte ou simplement une<br />

éminence rocheuse d'où l'eau coule et sur laquelle apparaît Actéon surprenant Diane<br />

dans la source au milieu d'un paysage classique. Par contre, l'originalité <strong>du</strong> pavement à<br />

Dougga est marquée par la fusion de deux tendances artistiques la première,<br />

hellénistique, manifestée par l'arrière plan occupé par Actéon sur une montagne boisée,<br />

l'édicule, la grotte et Diane dans la source ; la deuxième, "réaliste-illusionniste"<br />

prononcée par l'aspect rustique tra<strong>du</strong>it par la représentation des "moutons" et de la<br />

chaumière. Ainsi l'auteur de la mosaïque, tout en restant fidèle aux sources littéraires,<br />

n'a pas manqué de donner à son oeuvre, une interprétation locale indéniable tirée de<br />

sujets réels, en vogue aux IIème et IVème siècles en Afrique. A cette période, les<br />

compositions se libèrent de plus en plus des thèmes rigides tirés de la peinture<br />

pompéienne et adoptent un décor synthétique par la juxtaposition des éléments, très<br />

souvent, sans lien entre eux. D'autre part, sur le plan de l'organisation, la pro<strong>du</strong>ction de<br />

Dougga, réalisée dans une telle représentation conventionnelle, reflète l'influence<br />

alexandrine des mosaïques nilotiques. L'interpénétration de sujets culturels avec ceux<br />

de la vie courante rappelle les compositions synthétiques des pavements d'El Alia (14) et<br />

de Palestrina (15) .<br />

(12) Pairant F.H., Diana Nemorensis, M.E.F.R., LXXXL, 2,1969.<br />

(13) Ovide, les Métamorphoses, T.I, L, III, 137 - 253.<br />

(14) Foucher L., les mosaïques nilotiques <strong>africa</strong>ines, la mosaïque gréco- romaine, Paris, 1965, p. 137 ss.<br />

(15) Giorgio Gullini, I, mosaici di Palestrina, Roma, 1956, p.42, tav. XIX.<br />

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