le sourire immobile pdf - Vincent-Paul Toccoli a-nous-dieu-toccoli
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‘moi’ doit donc m’apparaître, qui soit ‘mon véritab<strong>le</strong> moi’ ? Avant toute discrimination entre <strong>le</strong> bien et<br />
<strong>le</strong> mal, mais c’est tout simp<strong>le</strong>ment la situation du Jardin de l’Éden, juste avant la ‘tentation de savoir’<br />
et de devenir ‘comme des <strong>dieu</strong>x’! Car l’ (es) Élohim (c’est un pluriel, en hébreu), D/<strong>dieu</strong>(x) de la Bib<strong>le</strong><br />
‘sait/savent’ lui/eux! Sur quoi porte ce savoir? Eh bien, précisément sur la discrimination entre (<strong>le</strong>)<br />
bien et (<strong>le</strong>) mal (Gn 3,5).<br />
C’est sur ce savoir-là que porta, au pays de la Bib<strong>le</strong>, la transgression, faisant de l’être humain ce que<br />
<strong>nous</strong> en connaissons: un être qui sait la différence entre ‘nu’ et ‘pas nu’, c'est-à-dire qui discrimine<br />
entre <strong>le</strong>s genres masculin et féminin. C’est cela la sexualité (qui vient de ‘secare’ = couper, séparer,<br />
distinguer; ‘sectum’ = coupé, séparé, distingué): la coupure; la séparation, la distinction: bref la<br />
‘dualité’ constitutive de l’être humain ‘après’ la transgression. En pays Zen, il <strong>nous</strong> serait donc<br />
demandé de revenir au Jardin de l’Éden, avant la transgression, et de retrouver ‘qui ‘<strong>nous</strong> étions avant<br />
de <strong>nous</strong> découvrir masculin et féminin’, - avant d’être ‘condamnés’ à discriminer sans cesse, à être la<br />
victime de la dualité au sein même de notre être, - ‘incapab<strong>le</strong>s de penser ni à bine ni à mal ‘?<br />
D’après la Bib<strong>le</strong>, sorti de l’acte créateur de Dieu, l’être humain ne sait rien: sait-il même qu’il est<br />
heureux, il faudrait qu’il puisse comparer! A la différence de Dieu, qui lui, sait: mais qui sait quoi,<br />
sinon ce qui provoquera ‘la chute dans <strong>le</strong> temps’ (Cioran) de l’être humain, c’est-à-dire qu’il y a une<br />
dualité! Or, en pays zen/bouddhiste, la dualité est la preuve même que rien ne tient par soi-même et<br />
que se définir par rapport à la dualité, c’est se définir soi-même comme n’ayant pas d’existence<br />
propre. S’il en est ainsi, un tel <strong>dieu</strong> ne peut exister, il n’y a pas eu de création et l’être humain, ne<br />
tenant pas par lui-même, n’a lui non plus aucune existence propre.<br />
Pourtant cette ‘nature non discriminatoire’ est postulée dans <strong>le</strong> hwadu. Cette ‘nature édénique’ d’avant<br />
tout savoir (bien que <strong>le</strong> Bouddha lui-même fasse l’impasse sur <strong>dieu</strong> et la création), serait-el<strong>le</strong> cette<br />
mystérieuse ‘Nature de Bouddha’ que chacun possèderait en soi depuis toujours et dont l’expérience<br />
constituerait fondamenta<strong>le</strong>ment la Bodhi, l’Éveil? Qui, de <strong>dieu</strong> ou du Bouddha, <strong>le</strong> sait, çà?<br />
Eh bien, oui, ‘c’est arrivé’ ! Aujourd’hui 20 avril, après quelque trois semaines de persévérance et plus<br />
d’une centaine d’heures de pratique, je suis enfin parvenu, à la méridienne, à conserver la position<br />
assise au sol, sans bouger ni détendre mes jambes à aucun moment, pendant <strong>le</strong>s cinquante minutes du<br />
p<strong>le</strong>in exercice. Je considère ceci comme un évènement dans mon expérience de méditation zen. Je<br />
peux dire, maintenant uniquement, que ma fatigue et mes dou<strong>le</strong>urs étaient d’une tel<strong>le</strong> intensité hier<br />
soir, qu’il devait inévitab<strong>le</strong>ment se passer quelque chose: je ne pouvais plus continuer de la sorte. La<br />
nuit a été très bonne; je me suis réveillé à trois heures exactement, et je me suis mis aussitôt à la<br />
nocturne, sur <strong>le</strong> bord de mon futon. Cela a marché plus qu’honorab<strong>le</strong>ment. Matutina<strong>le</strong> et<br />
antéméridienne, exécutées sur la terrasse supérieure, ont été éga<strong>le</strong>s à el<strong>le</strong>s-mêmes. Mais cette<br />
méridienne, en la circonstance, est une ‘bascu<strong>le</strong>’: une récompense du Bouddha, de Bodhidharma, de<br />
Huei-neng, de Huang-po, de Chinul et de Kusan, - mal gré qu’ils en aient! Il fallait qu’ils s’y mettent<br />
tous ensemb<strong>le</strong>! Merci!<br />
A l’antévespéra<strong>le</strong>, j’ai eu envie de prendre un bain. Pendant que je méditais, j’ai mis la chaudière en<br />
route et fait cou<strong>le</strong>r l’eau. Une heure plus tard, je me baignais délicieusement, tel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> bassin est<br />
vaste, dans une eau à la température idéa<strong>le</strong>. Je n’ai vraiment plus aucune raison, à part pour manger un<br />
peu, de descendre au monastère. A suivre!<br />
KAM RO AM, 21 AVRIL 1998.<br />
Il est trois heures cinquante sept, très exactement à mon computer. L’eau bout dans la bouilloire, je<br />
vais m’offrir une tasse de thé b<strong>le</strong>u chinois pour fêter <strong>le</strong> renouvel<strong>le</strong>ment de mon exploit d’hier en<br />
méridienne: ma nocturne a été parfaite! Cinquante bel<strong>le</strong>s, bien qu‘encore parfois douloureuses,<br />
minutes d’immobilité complète sur mon coussin de méditation! Attendez, je bois (On a <strong>le</strong> champagne<br />
qu’on peut!).<br />
Quelques remarques physiologiques: la fatigue généra<strong>le</strong> (genre courbatures grippa<strong>le</strong>s) semb<strong>le</strong> avoir<br />
complètement disparu; <strong>le</strong>s articulations (genoux, hanches, aines) n’ont déc<strong>le</strong>nché aucune dou<strong>le</strong>ur;<br />
seuls <strong>le</strong> pied et <strong>le</strong> bas de la jambe gauche se sont ankylosés par deux fois assez douloureusement, mais<br />
pas au point que la dou<strong>le</strong>ur en devienne insupportab<strong>le</strong>: la preuve! La nouveauté: en respirant<br />
profondément, j’ai palpab<strong>le</strong>ment ressenti <strong>le</strong>s contractions et <strong>le</strong>s détentes de la région pelvienne, son<br />
vidage à l’inspir (quand tout l’air absorbé se rassemb<strong>le</strong> dans la région pulmonaire), et son remplissage