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le sourire immobile pdf - Vincent-Paul Toccoli a-nous-dieu-toccoli

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montagnes du fin fonds de la Corée, pour satisfaire un maître sôn en son ermitage! Ce n’était pas fini!<br />

Il ne me lâchait plus: on prit place sur <strong>le</strong> vieux banc de bois pourri par la pluie, au beau milieu du<br />

jardin, et il me confia que fin mai, il se trouverait à Paris, puis qu’il continuerait sur Genève et Zurich,<br />

avant de monter vers <strong>le</strong> nord: “A Oslo!” précisa-t-il, ”pour voir <strong>le</strong> so<strong>le</strong>il en p<strong>le</strong>ine nuit!”, en riant de<br />

ses fines joues glabres et des quelques poils qui lui sortaient des oreil<strong>le</strong>s!<br />

Le doute qui m’a étreint ce matin, pratiquement dès la nocturne, était global, compact et informe. Il<br />

s’est contenté d’abord d’occuper tout l’espace de ma cellu<strong>le</strong>, de mon esprit, et je crois même de mon<br />

corps. Je ne sais comment dire: j’avais une sensation physique de doute. Je ne trouvais pas de position<br />

assise adéquate, mes mains hésitaient à se poser comme ceci ou comme cela, puis ce fut la place de ma<br />

lampe torche, de ma montre et de mes lunettes qui ne convenait pas (je <strong>le</strong>s pose toujours à portée de la<br />

main, pour pouvoir me rendre compte de l’heure dans <strong>le</strong> noir). Et alors, ce fut <strong>le</strong> fameux “ A quoi bon<br />

tout cela?”, qui devait arriver un jour ou l’autre. Mais, comprenez bien: aucune révolte, colère ou<br />

impatience. Plutôt une (véritab<strong>le</strong>?) prise de conscience, ou un (dé) goût de toutes <strong>le</strong>s théories dont mes<br />

études, mes <strong>le</strong>ctures, mes conversations et mes écrits sont p<strong>le</strong>ins, et « qui n’expliquent rien,<br />

n’avancent à rien, compliquent tout plutôt, et sont toujours à relativiser et à ajuster, parce qu’en<br />

définitive la vie n’est pas comme çà et qu’ail<strong>le</strong>urs on a pensé, on pense et on pensera toujours<br />

autrement »! Ouf!<br />

Mais pas de doute sur <strong>le</strong> bien-fondé de ma démarche actuel<strong>le</strong> (expérience de zen/sôn dans LE<br />

monastère coréen par excel<strong>le</strong>nce, sous la guidance personnel<strong>le</strong> et exclusive DU Maître SÔN<br />

actuel<strong>le</strong>ment “availab<strong>le</strong>” sur <strong>le</strong> marché)! Nul<strong>le</strong> velléité de mettre fin à cette histoire, nul ‘ras-<strong>le</strong>-bol’ de<br />

mes exercices, nul rejet de mon jeûne ni de mon confort relatif. Encore moins un ennui venant de la<br />

<strong>le</strong>cture des textes des Maîtres Anciens et Vénérab<strong>le</strong>s: bien au contraire! Rien de tout cela.<br />

Le doute, - puisque doute il y a, - porte, je crois, sur ma capacité structurel<strong>le</strong> à entrer dans cette ‘vision<br />

des choses’ au sein de laquel<strong>le</strong> tout doit pouvoir s’éclairer, ou du moins s’accepter comme appartenant<br />

aux sensibilités et aux évidences implicites que peuvent partager des êtres issus d’une même culture<br />

ou d’une même aire culturel<strong>le</strong>. Par exemp<strong>le</strong>: vivant habituel<strong>le</strong>ment par terre depuis des millénaires,<br />

faire la méditation assis au sol doit, ici, paraître ‘naturel’; ou bien, ayant depuis toujours(?) mangé riz<br />

et kimchi matin, midi et soir, pourquoi, ici, varier <strong>le</strong> menu? De même: héritant ataviquement, à travers<br />

quinze sièc<strong>le</strong>s de bouddhisme, de notions tel<strong>le</strong>s que ‘samsara, nirvana, karma ou bodhi…’ ou bien ‘<br />

dharma, sunyata, anatman ou manas…’, <strong>le</strong>s voici immédiatement sur une longueur d’onde qui ne<br />

dépend pas de <strong>le</strong>ur quotient intel<strong>le</strong>ctuel ni de <strong>le</strong>ur niveau d’études, mais reflète simp<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>ur<br />

représentation du monde! Moi, je dois apprendre à m’asseoir par terre et à y méditer, à manger riz et<br />

kimchi et à (avoir intérêt à) trouver çà bon (car il n’y aura rien d’autre!) et à devenir un peu indien, un<br />

peu chinois et beaucoup coréen, pour tâcher d’accéder à la Voie! Je <strong>le</strong> répète, je doute, aujourd’hui,<br />

d’en être psychosomatiquement capab<strong>le</strong>.<br />

Le hwadu coréen, par exemp<strong>le</strong> (chinois kongan, japonais koan), - au-delà de la beauté esthétique et<br />

paradoxa<strong>le</strong> de sa formulation, - renvoie, pour son fonctionnement structurel, à un background<br />

idéologique syncrétique où s’entraident, pourrait-on dire, pour décontenancer <strong>le</strong> pratiquant, ‘cyc<strong>le</strong>-desmorts-et-des-naissances<br />

(indien), jeux-de-mots-re<strong>le</strong>vant-d’une-syntaxe-de-juxtaposition-et-d’un<strong>le</strong>xique-pictogrammique<br />

(chinois)” et, ici, “coréanisation-d’une-tradition-passée-par-<strong>le</strong>s-stades-del’importation,-de-la-traduction,-de-l’adaptation,-de-la-théorisation,-de-la-<br />

pratique-et-de-l’évolution’!<br />

Moi je trouve que cela fait beaucoup à assimi<strong>le</strong>r pour un seul homme, à mon âge et en mes qualités!<br />

Je suis donc affronté en fait pour la deuxième fois au problème de ma compétence ou de mes<br />

aptitudes. Celui-ci est théorique, - au sens de cérébral, abstrait et idéologique, - <strong>le</strong> premier, - à Séoul et<br />

longtemps après mon arrivée à Songgwang sa, - ayant été d’ordre pratique, puisqu’il touchait ma<br />

conformation physiologique!<br />

J’ai narré comment, à force d’exercice, d’opiniâtreté et de persévérance, je découvris un beau matin<br />

que j’avais acquis assez de soup<strong>le</strong>sse pour remplir mon contrat avec <strong>le</strong> ras du sol! Pourquoi donc ne<br />

pas compter, me direz-vous, avec la même issue pour l’autre partie, encore à force d’exercice,<br />

d’opiniâtreté et de persévérance! Je sais que je vais continuer, là n’est pas la question. Ma question<br />

porte sur la vanité (certaine?) de l’entreprise, car ce n’est plus une simp<strong>le</strong> affaire de musc<strong>le</strong>s à

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