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Cache cache…<br />
Dans le courant de la journée, Peggy Sue perçut de curieux raclements sur bâbord.<br />
— Tu as entendu ? demanda-t-elle au chien bleu. Tu vois quelque chose ?<br />
— Oui, fit l’animal dont la vue était bien plus aiguisée que celle <strong>des</strong> humains. Une ombre…<br />
Peggy plissa les paupières. Des explosions lointaines jetaient <strong>des</strong> éclairs intermittents qui trouaient la<br />
nuit.<br />
« Toujours le méthane, songea la jeune fille. On dirait <strong>des</strong> flashes d’appareil photo. On n’a pas<br />
vraiment le temps de voir grand-chose… »<br />
C’est au cours de l’un de ces « flashes » qu’elle aperçut la main.<br />
D’abord elle détourna la tête, refusant d’accorder le moindre soupçon d’existence à cette ombre qui<br />
se déplaçait derrière la brume. Puis elle se résolut à affronter la vérité et attendit l’éclair suivant. Quand<br />
il se produisit, elle chercha à localiser l’apparition, mais celle-ci s’était déjà évanouie. Peggy demeura<br />
figée, le souffle court. Qu’avait-elle vu ?<br />
Une main ?<br />
Une main gigantesque aux doigts écartés.<br />
— Tu penses à la même chose que moi ? demanda-t-elle au chien bleu.<br />
— Ouais, fit l’animal, ou nous avons été victimes d’un mirage ou bien…<br />
Une heure plus tard, la jeune fille revit la main. Ou plutôt l’ombre de la main.<br />
Elle sursauta, s’emparant de la lorgnette d’approche. Hélas, le temps qu’elle porte la longue-vue à<br />
son œil, l’ombre s’était volatilisée.<br />
« Elle tâtonne, pensa-t-elle. Elle cherche, à l’aveuglette. »<br />
L’ombre revint le lendemain, plus proche cette fois, et Peggy perçut son odeur. Comme<br />
précédemment, elle eut l’impression qu’une main énorme tâtonnait au milieu <strong>des</strong> nuages pour s’emparer<br />
d’eux. Elle s’ouvrait, se refermait, explorant l’espace ; tour à tour s’approchant, s’éloignant…<br />
Accrochée aux cordages, la jeune fille regardait palpiter ces longs doigts crochus dont la forme – au<br />
fur et à mesure qu’elle se précisait – n’avait rien d’humain.<br />
— Tu la vois ? criait-elle à Sébastian. Est-ce que tu la vois ?<br />
— Oui, souffla le garçon. Je sais à quoi tu penses, mais pas de panique ! Il peut s’agir d’une<br />
hallucination. Ne nous emballons pas. Mettons nos masques. L’air que nous respirons est sans doute<br />
chargé de gaz hallucinogène.<br />
Peggy priait pour qu’il s’agisse d’une simple hallucination, mais l’image persista alors même qu’elle<br />
avait coiffé son masque respiratoire.<br />
<strong>La</strong> main…<br />
<strong>La</strong> main avait l’air réelle. Trop réelle.<br />
Et puis il y avait cette odeur. Une odeur de tourbe et de moisissure, une odeur de caveau.<br />
Peggy renifla prudemment, l’odeur ne s’évaporait pas. Cela rappelait l’eau croupie ; un relent qui<br />
venait d’en bas, <strong>des</strong> pr<strong>of</strong>ondeurs du monde, du cœur de l’œuf.