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tout d’un bloc. »<br />
Elle ne se trompait pas, la fatigue rattrapait déjà Sébastian. Le jeune homme savait qu’il avait atteint<br />
la limite de ses forces. Dans peu de temps, il allait s’abattre, fauché par le coma, les soldats en<br />
pr<strong>of</strong>iteraient alors pour le tuer.<br />
« Je dois finir ce travail ! se répétait-il. Dégager le couloir et atteindre la porte de la terrasse… vite !<br />
Tant que je suis un surhomme ! »<br />
Le corridor était jonché de blessés. Le chien bleu galopait en avant, les crocs découverts, grondant<br />
comme un démon, et les soldats prenaient la fuite en se demandant s’ils avaient affaire à un simple roquet<br />
ou à un loup-garou. Sébastian bondissait, balayant les tables, les fauteuils, brûlant dans un déploiement<br />
d’énergie fantastique ses dernières secon<strong>des</strong> de conscience.<br />
Les trois amis se trouvaient maintenant tout près de la porte menant à la terrasse. Il leur suffirait de la<br />
pousser pour accéder à l’arbalète. Avec de la chance, tout serait fini dans peu de temps.<br />
— Que se passe-t-il ici ? tonna soudain la voix de Ranuck.<br />
— Seigneur, haleta le centurion, ce sont ces gosses, ils essayent de s’emparer de l’arbalète… Ils nous<br />
ont pris par surprise, le garçon est un vrai démon. Il a la force de dix lions…<br />
— Je vois, gronda le vizir ; et, dévisageant Peggy Sue : tu m’as trompée, petite peste ! Tu n’as jamais<br />
eu l’intention de rejoindre nos rangs, tu obéis à ce vieux fou de Massalia ! Tant pis pour toi ! Puisqu’il en<br />
est ainsi, je vais prendre les choses en main et te punir comme tu le mérites !<br />
Brusquement, le gros homme parut s’enfler tel un ballon dans lequel on soufflerait trop de gaz. Un<br />
craquement retentit et Ranuck se fendit de haut en bas ! Son corps se déchira telle une banane qu’on<br />
épluche. De cette charpie émergea une créature abominable dans laquelle on avait du mal à reconnaître la<br />
physionomie bonasse du grand vizir. C’était à présent un être écailleux, dont l’allure générale rappelait<br />
celle d’une pieuvre. <strong>La</strong> chose se débattait pour se dégager du corps éclaté qui l’immobilisait encore, et<br />
<strong>des</strong> jets de gaz enflammés s’échappaient de sa bouche.<br />
— <strong>La</strong> Dévoreuse l’a remodelé à son image ! balbutia Peggy Sue. Il ne mentait pas, la Bête était bien<br />
en lui. Elle nous surveillait par ses yeux !<br />
Les gar<strong>des</strong> eux-mêmes n’avaient pu réprimer un mouvement de recul. Maintenant la « pieuvre »<br />
bleuâtre se dandinait sur ses tentacules, crachant de courtes bouffées de flammes.<br />
— Tuez-la ! hurla le chef <strong>des</strong> soldats. Mais tuez-la donc !<br />
Les centurions s’emparèrent de leurs arcs pour mettre le monstre en joue.<br />
— Mais c’est le grand vizir, protesta l’un d’eux, on ne peut pas tirer sur lui.<br />
— Ce n’est plus le grand vizir ! rugit leur chef, au comble de la terreur. C’est un monstre !<br />
Les flèches volèrent, se fichant dans le cuir écailleux de la chose sans lui causer le moindre<br />
dommage.<br />
— Regardez ! bredouilla Peggy à l’adresse de ses amis, nous avons sous les yeux le portrait en<br />
réduction de la bête <strong>des</strong> <strong>souterra</strong>ins. Son double, en quelque sorte.<br />
— Pas terrible, admit le chien bleu. En plus, il sent mauvais.<br />
— Il faut en pr<strong>of</strong>iter pour forcer le passage, haleta Sébastian. Allons-y ! Pendant que les sentinelles<br />
se battent avec le monstre, faufilons-nous jusqu’à la porte.<br />
Soudain, d’autres pieuvres bleues surgirent du fond du couloir pour porter secours à « Ranuck ».<br />
Peggy comprit qu’il s’agissait <strong>des</strong> comploteurs dont le grand vizir était le chef. Des jets de feu<br />
s’échappaient de leur gueule. Encore malhabiles, les pieuvres hésitaient à attaquer les gar<strong>des</strong>, mais il<br />
était visible que ce répit ne durerait pas. Dès qu’elles auraient compris comment ne plus s’emmêler les