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La Bete des souterra.. - Index of

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— Pour ne pas s’ennuyer, expliqua la jeune femme qui commençait à s’impatienter. Il n’y a pas <strong>des</strong><br />

masses de distractions dans un avion. Et puis ces malheureux ont beaucoup de sommeil en retard… Ils<br />

avaient tellement peur de la Dévoreuse qu’ils ne fermaient plus l’œil de la nuit. Vous comprenez ?<br />

Peggy Sue hocha la tête, peu désireuse de poursuivre cette conversation de fou, et s’allongea sur le<br />

plancher caoutchouté, entre une grosse femme qui dormait la bouche ouverte et un homme qui grinçait <strong>des</strong><br />

dents. Elle se serra contre Sebastian et dit au chien bleu de venir s’installer entre eux.<br />

Un peu plus tard l’hôtesse vint s’agenouiller à son chevet, lui brandissant sous le nez une sorte de<br />

menu qu’elle éclairait à l’aide d’une minuscule torche électrique.<br />

— Vous voulez dormir « léger » ou « pr<strong>of</strong>ond » ? s’enquit-elle. Avec ou sans rêves ? Certains<br />

passagers aiment plonger dans le coma, d’autres veulent faire de doux rêves. Si c’est votre cas prenez de<br />

l’Hypnogodon, c’est un somnifère additionné d’un léger euphorisant. Vous rêverez en bleu et rose, je<br />

vous le garantis.<br />

— Mais nous ne voulons pas dormir, protesta Peggy Sue. Si nous dormons, nous risquons de manquer<br />

l’arrêt de Mandavaar. (Elle se fit la réflexion qu’elle parlait comme une godiche qui monte pour la<br />

première fois de sa vie dans un autocar.) Vous vous posez bien à Mandavaar ?<br />

— Oui, fit l’hôtesse, pour faire le plein. Vous voulez dire que vous avez pris cet avion pour<br />

voyager ?<br />

Elle dévisagea Peggy Sue avec stupeur, referma le menu, puis s’éloigna, abandonnant les trois amis<br />

dans le noir.<br />

Dès que l’appareil eut atteint son altitude de croisière, la température baissa d’un coup, et Peggy Sue<br />

put voir de petits nuages de buée s’échapper de la bouche <strong>des</strong> dormeurs. Le froid ne paraissait pas les<br />

gêner. Assommés par les soporifiques, ils encaissaient les embardées de l’avion sans se réveiller. Peggy<br />

Sue, elle, sursautait chaque fois que le vieux bombardier, aspiré par un trou d’air, perdait de la hauteur.<br />

Les mains crispées sur le ventre, elle s’asseyait, persuadée qu’on allait s’écraser. Y avait-il <strong>des</strong><br />

parachutes à bord ? Allait-on devoir les accrocher sur le dos <strong>des</strong> dormeurs avant de les pousser dans le<br />

vide ?<br />

Ratatinée dans son sac de couchage, elle écouta les bruits suspects de la carlingue. Sebastian et le<br />

chien bleu, eux, avaient fini par s’endormir. Peggy Sue avait du mal à se persuader qu’elle ne rêvait pas,<br />

qu’elle était bien là, près d’une femme qui – à intervalles réguliers – marmonnait dans son sommeil :<br />

— Ça gratte dans le mur… C’est elle… la bête <strong>des</strong> <strong>souterra</strong>ins… J’te dis qu’elle vient chercher le<br />

gosse.<br />

*<br />

Au bout d’un moment, comme ils s’ennuyaient trop, Peggy Sue, Sébastian et le chien bleu quittèrent<br />

les sacs de couchage et partirent en exploration.<br />

L’avion était gigantesque. Des enfants y déambulaient, l’air maussade. L’un d’eux, un garçonnet d’une<br />

dizaine d’années, saisit Peggy par la main et lui demanda :<br />

— Je vous ai vus monter, tout à l’heure… Vous venez d’en bas. Moi je suis né dans cet avion, je n’ai<br />

jamais marché sur le sol… C’est comment ?<br />

Peggy ne cacha pas son étonnement.

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