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Prisonniers <strong>des</strong> ogres<br />
<strong>La</strong> porte franchie, ils se retrouvèrent sur une vaste place dallée de marbre blanc. Une sorte de forum<br />
comme il y en avait à Rome, dans l’Antiquité. De colossales statues de bronze la bordaient.<br />
— C’est désert, s’étonna le chien bleu. Où sont les habitants ?<br />
— Il est tôt ; peut-être se lèvent-ils tard ? suggéra Peggy Sue.<br />
— Entrons dans l’une de ces demeures, proposa Sébastian, nous demanderons de l’aide. Après tout<br />
nous sommes munis d’un sauf-conduit qui nous autorise à rencontrer le roi.<br />
— Tu veux dire un faux sauf-conduit ! ricana le chien. Ne commence pas à te prendre pour un<br />
ambassadeur, ou tu finiras la tête sur le billot [17] .<br />
Ils entrèrent dans une villa bordée de hautes colonnes et qui ressemblait davantage à un temple grec<br />
qu’à une maison. Les murs étaient en marbre blanc. Les paravents de laque, les poteries, la vaisselle d’or<br />
abandonnée sur les tables témoignaient d’une richesse insolente. De belles statues de marbre jalonnaient<br />
les couloirs, mais, comme le reste, elles étaient engluées de poussière et de toiles d’araignée. Les murs et<br />
le sol étaient couverts de fresques représentant <strong>des</strong> combats de gladiateurs.<br />
« On se croirait à Rome, au temps de César, songea Peggy. Cela rappelle ces villas patriciennes où<br />
logeaient les sénateurs. »<br />
Tout était magnifique, mais à l’abandon. Un silence étrange régnait sur les lieux.<br />
— Ou la maison a été désertée par ses occupants, ou personne ne se soucie plus d’y faire le ménage<br />
depuis dix ans, remarqua Sébastian en fronçant les sourcils.<br />
Des instruments de musique, <strong>des</strong> livres, avaient été jetés en vrac au pied d’une bibliothèque. Un peu<br />
partout, de la nourriture achevait de se gâter dans les assiettes, comme si les convives s’étaient levés de<br />
table au beau milieu du repas. Les compotiers débordaient de fruits tavelés qui répandaient une odeur<br />
sure.<br />
Sur un plat d’or, une douzaine de poulets rôtis se décomposaient. Certains d’entre eux portaient <strong>des</strong><br />
marques de morsures… On avait de toute évidence commencé à les grignoter sans trouver le temps<br />
d’aller plus loin.<br />
Le chien bleu s’approcha d’une fenêtre. Les rues étaient désertes, elles aussi, et la ville silencieuse.<br />
Les faça<strong>des</strong> blanches, quoique majestueuses, respiraient la désolation.<br />
— C’est ça, le quartier <strong>des</strong> riches ? murmura l’animal. Une vraie cité fantôme ! À première vue, on<br />
n’a pas l’air d’y rigoler beaucoup plus que dans la zone empoisonnée !<br />
Peggy hocha la tête, pourtant ici on n’apercevait aucune ruine, et la moindre bâtisse croulait sous<br />
l’opulence de son architecture. Dehors ce n’étaient que statues triomphantes dressées sur <strong>des</strong> pié<strong>des</strong>taux<br />
dorés, portiques à colonnes, fontaines à jets d’eau multiples.<br />
« On se croirait bel et bien dans une ville fantôme », se dit-elle.<br />
— Il n’y a pas de crevasses, observa Sébastian. Vous avez vu ? Ni dans les murs ni sur le sol. <strong>La</strong><br />
Dévoreuse n’a pas ses entrées ici.<br />
— Pourquoi viendrait-elle ? siffla le chien bleu, puisqu’elle peut trouver ce qu’elle cherche dans le<br />
quartier pauvre ! Les gens d’ici disposent d’ouvriers et d’esclaves pour boucher les lézar<strong>des</strong> dès qu’il