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— Mais c’est la vérité ! s’indigna l’animal. Il y en a même qui pètent en dormant !<br />
*<br />
Le soir même, les choses se gâtèrent.<br />
— L’hôtesse a l’air drôlement énervé, observa Sébastian. Tu as vu comme elle vérifie les rideaux <strong>des</strong><br />
hublots ?<br />
C’était exact. <strong>La</strong> jeune femme avait <strong>des</strong> gestes fébriles. De temps à autre, elle entrebâillait un rideau<br />
pour jeter un coup d’œil dehors.<br />
— On dirait qu’elle s’assure que personne ne nous colle aux fesses… fit le chien. Ça sent mauvais. Il<br />
serait peut-être temps de manger du chou bleu. Vous n’en avez pas sur vous ? Je m’en ferais bien une<br />
écuelle, comme ça, en passant.<br />
Peggy Sue se redressa.<br />
— Tu crois qu’un tentacule essaye de nous attraper ? demanda-t-elle à Sébastian.<br />
— Ça m’en a tout l’air, grimaça le garçon. L’hôtesse ne nous le dira pas pour éviter la panique, mais<br />
à mon avis, la Bête nous a repérés.<br />
À peine avait-il prononcé ces mots qu’un haut-parleur se mit à grésiller.<br />
— Mesdames, Messieurs, chers passagers, bourdonna la voix nerveuse du commandant, nous allons<br />
couper l’éclairage <strong>des</strong> coursives et <strong>des</strong> cabines pour permettre à l’électricien de procéder à de menues<br />
réparations. Veuillez nous excuser pour cette gêne momentanée.<br />
— Tu parles ! ricana le chien bleu. Mettez le chou bleu à cuire, on va tous en avoir besoin !<br />
L’annonce fit naître une certaine panique parmi les voyageurs. Dès que l’avion fut plongé dans<br />
l’obscurité, les enfants commencèrent à pleurer.<br />
Peggy entendit la voix du petit Antonin qui hurlait, du fond du dortoir <strong>des</strong> premières classes :<br />
— C’est la patte de la Dévoreuse ! Elle approche…<br />
Aussitôt, ce fut la ruée. N’écoutant plus les conseils de l’hôtesse, les gens se précipitèrent vers les<br />
hublots pour voir ce qui se passait à l’extérieur. Peggy Sue joua <strong>des</strong> cou<strong>des</strong> afin d’en savoir plus.<br />
D’abord, elle ne vit pas grand-chose, à cause <strong>des</strong> nuages, puis elle distingua une ombre sinueuse qui<br />
se tortillait dans le ciel, tel un fouet qui claquerait au ralenti.<br />
« Un tentacule de pieuvre, pensa-t-elle tandis que ses cheveux se hérissaient sous l’effet de la peur.<br />
Un tentacule qui sort d’une crevasse de la plaine… »<br />
— Nom d’une saucisse atomique ! haleta le chien bleu, ce truc doit mesurer deux kilomètres !<br />
— Il fouille les nuages en aveugle, remarqua Sebastian. Il tâte au hasard… Il ne sait pas où nous<br />
sommes. Avec un peu de chance il ne nous trouvera pas.<br />
Peggy Sue avait la gorge sèche. L’avion paraissait bien petit comparé à cette énorme patte constellée<br />
de ventouses qui se faufilait tel un serpent au milieu <strong>des</strong> nuées.<br />
À l’intérieur de l’appareil, <strong>des</strong> femmes se mirent à crier tandis que les hommes exigeaient qu’on<br />
prenne de la hauteur.<br />
— C’est impossible, expliqua l’hôtesse, très pâle, nous avons atteint notre plafond de vol. Les<br />
moteurs ne sont pas assez puissants pour nous emmener plus haut. Je vous demande d’observer le silence.<br />
Il est possible que les tentacules soient munis d’oreilles leur permettant de détecter leurs proies. Faites<br />
taire les enfants qui pleurent… Leurs gémissements attisent l’appétit de la Bête. Ce sont eux qu’elle vient<br />
chercher.