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Le métro du cauchemar<br />
Au début de l’après-midi, le général vint les chercher.<br />
— Je sais que vous n’êtes pas encore convaincus, déclara-t-il, mais une petite visite dans le métro<br />
devrait avoir raison de vos hésitations.<br />
— Vous avez le métro ? s’étonna Sébastian. Vu la façon dont vous êtes tous habillés, je pensais que<br />
vous viviez plutôt comme au Moyen Age.<br />
— Kandarta n’a pas toujours été ainsi, dit tristement Massalia. Aux premiers temps de sa<br />
colonisation, c’était même une planète fort moderne, mais la Dévoreuse a détruit nos industries, nous<br />
faisant peu à peu régresser. Le métro date de cette époque. Il ne fonctionne plus.<br />
À ce moment, Peggy Sue constata que Massalia portait en bandoulière une puissante lampe à dynamo.<br />
— Les couloirs sont en principe encore éclairés, observa le général, hélas, on est toujours à la merci<br />
d’une panne. Si cela se produit, ne paniquez pas.<br />
Il se voulait rassurant, mais Peggy Sue le sentait nerveux. Ils sortirent du dortoir et gagnèrent une<br />
place au centre de laquelle s’élevait une statue de bronze assez laide dédiée à la mémoire d’un roi oublié.<br />
L’entrée du métropolitain se trouvait là. Banale. Des ordures s’amoncelaient sur les marches d’accès, et<br />
ils durent s’ouvrir un chemin à coups de pied pour parvenir jusqu’à la porte.<br />
Peggy Sue s’était préparée à une déambulation au cœur d’un labyrinthe sinistre. Il n’en était rien. Les<br />
couloirs qui s’étiraient devant elle étaient vi<strong>des</strong> et propres, éclairés par <strong>des</strong> batteries de tubes néon<br />
diffusant une lumière blême qui scintillait sur le carrelage humide. On avait beau tendre l’oreille, on ne<br />
détectait aucun bruit de cavalcade, aucun roulement de rame, aucun claquement de portières. Les ténèbres<br />
ne régnaient qu’à de rares endroits, là où les tubes d’éclairage avaient grillé, mais ces poches de nuit<br />
n’excédaient jamais vingt mètres de long. Peggy Sue ne pouvait toutefois s’empêcher de presser le pas<br />
chaque fois que Massalia leur faisait traverser ces sections obscures.<br />
Au fur et à mesure qu’ils s’enfonçaient, les adolescents prirent conscience que le silence <strong>des</strong> lieux<br />
était illusoire.<br />
Tout en bas, quelque chose rampait, se frottant aux parois.<br />
Cette reptation s’interrompait parfois pour se changer en un grattement féroce comme aurait pu en<br />
produire une main griffant la pierre d’une muraille. Massalia, pâle, ne disait rien. Il avançait moins vite à<br />
présent qu’on avait atteint les quais.<br />
— C’était une erreur d’installer un métro, haleta-t-il au moment où ils débouchaient sous la voûte<br />
d’une station. On aurait dû prévoir que les tunnels constitueraient de merveilleuses voies de circulation<br />
pour la Dévoreuse. Elle s’y est précipitée. C’était ça de moins à creuser ! Elle y a introduit ses<br />
tentacules, s’y déplaçant comme dans un terrier. Peu à peu elle a envahi tout le réseau ferroviaire<br />
<strong>souterra</strong>in, provoquant de nombreux accidents. Les gens ont cessé d’emprunter ce moyen de transport, et<br />
les rames ont rouillé au long <strong>des</strong> rails.<br />
Malgré sa peur, Peggy éprouva le besoin de regarder au fond du tunnel.<br />
— Alors, dit-elle, d’après vous, la Bête est quelque part là-dedans ?<br />
Massalia haussa les épaules.<br />
— Pas tout entière, chuchota-t-il. Seulement certains de ses tentacules. C’est un animal gigantesque<br />
qui se tient assis au centre du monde comme un poussin dans sa coquille. Je vous l’ai déjà expliqué. Elle