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FRANKENSTEIN - Diogene éditions libres

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« À la nuit tombante, Agatha et l’Arabe se retirèrent les<br />

premières. Au moment de se séparer, Félix embrassa les mains de<br />

l'étrangère et dit : « Bonsoir, douce Safie. » Il veilla encore<br />

longtemps, tout en parlant avec son père. Comme il répétait<br />

régulièrement ce nom, je supposai que leur hôtesse était au centre<br />

de leur conversation. Je désirais de tout cœur les comprendre.<br />

Mais, en dépit de tous mes efforts, ce fut absolument impossible.<br />

« Le matin suivant, Félix partit travailler et, après qu'Agatha<br />

eut achevé ses besognes habituelles, l'Arabe s'assit aux pieds du<br />

vieillard. Elle lui prit sa guitare et se mit à jouer des airs si<br />

étrangement beaux qu'ils m'arrachèrent à la fois des larmes de joie<br />

et de tristesse. Elle chanta et sa voix d'une chaude sonorité s'éleva<br />

aussi douce, aussi pure que celles des rossignols dans les bois.<br />

« Quand elle se tut, elle tendit la guitare à Agatha qui, tout<br />

d'abord, la refusa. Puis, elle joua un air simple et se mit à chanter,<br />

elle aussi, mais sa voix, même si elle était douce, ne ressemblait<br />

pas à celle, merveilleuse, de l'étrangère. Le vieillard parut<br />

transporté de joie et prononça quelques paroles qu'Agatha<br />

s'efforça d'expliquer à Safie – et tout semblait indiquer qu'il tenait<br />

à manifester la joie que lui inspirait la musique.<br />

« Et maintenant les jours s'écoulaient aussi paisiblement que<br />

par le passé, avec cette différence que, sur le visage de mes amis, la<br />

joie avait pris la place de la tristesse. Safie était toujours gaie et<br />

heureuse. Elle et moi, nous fîmes de rapides progrès dans l'étude<br />

du langage, si bien qu'en deux mois je pouvais commencer à<br />

comprendre la plupart des mots utilisés par mes protecteurs.<br />

« Dans l'intervalle, la terre noire s'était couverte d'herbes et<br />

les plaines vertes s'étaient hérissées d'innombrables fleurs, douces<br />

à l'odorat et à la vue, telles des étoiles luminescentes parmi la<br />

pénombre des bois. Le soleil était de plus en plus chaud, les nuits<br />

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