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FRANKENSTEIN - Diogene éditions libres

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« Oh, mon ami, si vous m'aviez connu alors, vous ne me<br />

reconnaîtriez plus aujourd'hui dans ma déchéance ! Rarement,<br />

j'étais la proie du doute. Mon destin me conduisait au plus haut<br />

jusqu'au jour où je suis tombé pour ne plus jamais, jamais relever<br />

la tête ! Dois-je donc perdre cet être admirable ? J'ai longtemps<br />

cherché un ami, une personne avec laquelle je pourrais<br />

sympathiser et que j'aimerais. Et voilà que je la trouve sur ces<br />

mers désertes mais j'ai bien peur de ne l'avoir rencontrée que pour<br />

la perdre tout aussitôt. J'aurais voulu réconcilier Frankenstein<br />

avec la vie mais il en repousse l'idée.<br />

« Je vous remercie, Walton, me dit-il, pour vos aimables<br />

intentions à l'égard d'un être aussi misérable que moi mais quand<br />

vous me parlez de nouveaux liens et de nouvelles affections,<br />

croyez-vous qu'ils pourraient remplacer ceux que j'ai perdus ?<br />

Quel homme pourrait tenir près de moi la place de Clerval, quelle<br />

femme celle d'Élisabeth ? Même quand cet attachement n'est pas<br />

parfait, les compagnons de notre enfance exercent sur nous un<br />

pouvoir auquel ne peuvent prétendre les amis qu'on se fait par la<br />

suite. Ils connaissent nos penchants juvéniles qui, même s'ils se<br />

modifient plus tard, ne se volatilisent jamais. Ils peuvent juger nos<br />

actes avec plus de discernement car ils en savent les raisons. Un<br />

frère ou une sœur ne peut pas suspecter l'autre de tromperie ou de<br />

duplicité, à moins que ces symptômes-là n'apparaissent très tôt.<br />

En revanche, un ami, quelle que soit la force de l'attachement<br />

qu'on lui porte, peut, à son corps défendant, être l'objet d'une<br />

suspicion. Pourtant, mes amis à moi m'étaient chers, non pas par<br />

l'effet de l'habitude ou de la proximité, mais parce qu'ils avaient<br />

leurs qualités propres. Où que je me trouve, j'entends la douce<br />

voix d'Élisabeth, les paroles que Clerval me glisse à l'oreille. Ils<br />

sont morts et c'est du fond de ma solitude que je dois me<br />

persuader de préserver encore ma vie. Si j'étais engagé dans une<br />

tâche qui serait considérablement utile à l'humanité, je vivrais<br />

pour la mener à bien. Mais mon destin n'est plus là. Je dois<br />

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