Dokument 1.pdf - OPUS - Universität Würzburg
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Das Romanwerk von Jacques Stephen Alexis 66<br />
Zurück in der Stadt trifft er sich unerkannt mit Gaude. Sie ermöglicht ihm durch die Hilfe<br />
ihres Vaters die Schiffspassage nach Frankreich.<br />
Trotz einiger inhaltlicher Vorstöße in Richtung einer selbstbewussten haitianischen<br />
Literatur weist Le Nègre masqué die typische antithetische Struktur der Kolonialromane auf.<br />
Der Roman fußt auf exzessiven Kontrastierungen, die auch das Naturbild bestimmen. Wie im<br />
exotistischen Roman schwankt die Natur zwischen der Pittoreske und der Darstellung als<br />
locus horribilis. Der Prolog des Romans entwirft ein idyllisches Bild von Port-au-Prince in<br />
der Abenddämmerung:<br />
Voici l’heure antiléenne qu’eût aimée Roger Sainclair.<br />
Un soir fauve tombe sur Port-au-Prince et ses trois collines. Il est cinq heures à<br />
l’Horloge paroissiale de Turgeau.<br />
Le silence de ce quartier élégant, n’est troublé, de temps en temps, que de la<br />
trompe d’une auto, ou la voix traînante et musicale de quelque marchande de<br />
fruits.<br />
En bordure des villas, de jeunes femmes passent, en souplesse, vêtues d’étoffes<br />
légères. Il y en a de brunes, trop poudrées; de jaunes, couleur de miel; de claires,<br />
fardées avec excès, pour dissimuler peut-être, les traces du sang de Cham.<br />
Certaines sont silencieuses et ne s’appliquent qu’à rythmer leurs hanches;<br />
d’autres causent à voix basse, et montrent leurs jolies dents. Les hommes qui les<br />
croisent se retournent, en souriant de désir.<br />
En la roseraie d’une villa, un jardinier noir, nu-tête, penche sur des fleurs, un<br />
visage ébloui.<br />
Des paysans, retour du marché, s’en vont vers leurs cases lointaines. Ils rient,<br />
ils crient dans l’air doré.<br />
A l’Eglise il y a office vespéral. Harmonies d’un orgue, confondues avec les<br />
voix argentines d’un chœur féminin. Au coin de la rue, un gamin taquine une<br />
fillette. Un gendarme américain court après lui, avec un fouet, mais le gosse est<br />
agile et lui dédie son derrière.<br />
Six heures. Le flot des voitures envahit les avenues. On voit, sur les coussins<br />
des luxueuses autos, des créoles langoureuses, des américaines froides et belles,<br />
des officiers blancs, sans veste, au profil dur; des fonctionnaires haïtiens; masques<br />
neutres; des commerçants soucieux. Les uns regagnent leur résidence; d’autres<br />
s’arrêteront au Cercle Bellevue, car c’est l’heure du cocktail.<br />
Des Marines-corps, soldats de l’Occupation, abandonnent, en titubant, la<br />
bouche pleine de ‚goddam’, les tables du petit café peint en vert, à la devanture<br />
duquel on lit: ‚Rendez-vous de l’Oncle Sam.’<br />
Une odeur de pistaches, de fruits, de maïs grillé, de friture et de roses, sature le<br />
paysage?<br />
Au long des galeries, des vendeuses nocturnes, arrangent leurs marchandises,<br />
sur des plateaux de planches: bouteilles de tafia, tablettes de sirop noir, mangues<br />
et autres douceurs.<br />
Vers l’ouest, retentit la trompette de l’étranger. Un tambourineur, dans la<br />
montagne proche, comme pour lui donner la réplique, libère un rythme sauvage et<br />
nostalgique.<br />
Et Gaude de Senneville, accoudée au balcon de sa villa, ayant un peu chaud, a<br />
dénoué sa ceinture…