Nouvelle Biographie Nationale - Académie royale de Belgique

MAQUET MAQUET
salons éventrés du Palais, car les travaux furent
si lents qu'ils étaient loin d'être terminés à la
mort de Maquet, fin novembre 1909, et à celle
du Roi, survenue quelques jours plus tard.
L'architecte avait toutefois eu le temps d'intégrer
par des galeries courbes à l'ensemble du
Palais l'Hôtel de la Liste civile du côté de la rue
Ducale et le célèbre Hôtel Belle-Vue, acquis par
le Souverain en 1902, à l'angle de la place
Royale. En revanche, il ne put achever l'exécution
de la magnifique Salle des Glaces, à l'aile
gauche de la façade, ainsi que le grand appartement
dit de Fontainebleau, remplaçant divers
petits locaux du premier étage.
Si Léopold II avait finalement obtenu de l'Etat
le feu vert pour les transformations du Palais au
début de ce siècle, c'est parce qu'il avait réussi à
en lier l'exécution avec celle d'un vaste projet de
transformation du quartier de la Putterie et de
ses abords, voisins du Palais Royal. L'idée de
ces travaux avait commencé à s'imposer dès
1850 mais elle ne devait se concrétiser qu'en
1903, lorsque fut signée entre l'Etat et la Ville de
Bruxelles l'importante convention relative à la
création du Mont-des-Arts et la Gare Centrale.
Auparavant, des centaines de projets avaient
vu le jour sans retenir l'attention des pouvoirs
publics. Henri Maquet lui-même avait élaboré,
dès 1876, un plan considéré comme apportant la
meilleure solution au problème de la communication
entre le haut et le bas de la ville. Il
s'agissait d'ouvrir une rue courbe, future rue
Ravenstein, qui relierait la place Royale au
Cantersteen par une pente considérablement
plus douce que l'ancienne Montagne-de-la-Cour
grâce à son tracé en ellipse. Après de longs atermoiements
et suite à la vigoureuse pression
royale, le projet Maquet fut enfin adopté par la
Ville de Bruxelles, le 19 novembre 1894. Outre
le tracé de la rue courbe, Maquet allait inclure
dans son plan une idée d'Alphonse Balat, visant
à dégager les Musées, ainsi que la Bibliothèque
Royale et les Archives de l'Etat.
Le plan Maquet répondait à une conception
grandiose prévoyant la transformation de la
Montagne-de-la-Cour, l'établissement d'un
bâtiment unique regroupant les institutions
culturelles, la création de terrasses et de jardins
en escaliers et plans inclinés rachetant la différence
de niveau entre la place Royale et le
Cantersteen tout en préservant le panorama de la
ville. Ce plan avait suscité l'adhésion enthou-
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siaste de Léopold II, qui l'avait aussitôt baptisé
Mont-des-Arts. Les plans définitifs et le devis
furent déposés en 1902. Le coût de ce vaste et
magnifique projet était évalué à un total de 27
millions de francs-or pour les expropriations de
la Montagne-de-la-Cour et les travaux de
construction. Le gouvernement ayant obtenu le
feu vert du Parlement, les acquisitions d'immeubles
et les démolitions commencèrent
aussitôt. Mais quand Maquet présenta les plans
définitifs de l'édifice au public, en 1908, un
revirement inattendu se produisit.
Un mouvement puissant s'était fait jour afin
d'abandonner le projet jugé cyclopéen ou au
moins l'amender. Le chef de file de la droite
conservatrice, Charles Woeste, avait mené une
campagne en règle contre le plan qu'il qualifiait
de somptuaire. En septembre 1908, il réussit à
influencer le Sénat qui, à une voix de majorité,
refusa de voter les crédits. C'était échouer au
port! Léopold II fut profondément déçu de la
tournure prise par les événements. Quant à
Maquet, il n'y survécut pas. Sa santé fut
profondément altérée par l'échec de ce projet
auquel il avait travaillé depuis plus d'un quart de
siècle et l'on peut dire qu'il mourut de chagrin le
27 novembre 1909, trois semaines avant
Leopold II.
La perspective prochaine de l'Exposition
universelle de 1910 avait pourtant rendu urgent
l'aménagement provisoire de la Montagne-dela-Cour,
éventrée depuis des années.
L'architecte français Vacherot fut chargé par
l'Etat de dissimuler le chantier par un jardin en
terrasses agrémenté de cascades. Cette
« solution provisoire » survécut plus d'un demisiècle.
Ce n'est en effet qu'après la fin de la
Seconde Guerre mondiale que le projet Maquet
reprit de l'actualité. De nos jours, le Mont-des-
Arts, certes moins grandiose que la vision
conçue par Maquet et soutenue par Léopold II,
en a pourtant sauvegardé l'esprit puisqu'il est
devenu le lieu de rencontre de nos institutions
culturelles, avec le complexe des Musées, la
Bibliothèque Albertine et le Palais des
Congrès; en même temps, il constitue un
belvédère dominant l'un des panoramas privilégiés
de Bruxelles.
Henri Maquet avait été un praticien très
respecté dans sa profession. Il s'était consacré
toute sa vie à la Commission royale des
Monuments dont il avait été successivement