Nouvelle Biographie Nationale - Académie royale de Belgique
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COREMANS COREMANS<br />
surtout sous l'impulsion <strong>de</strong> l'Association constitutionnelle<br />
et conservatrice que le Meetingpartij<br />
soutint le parti catholique au Parlement; en<br />
1870, Victor Jacobs <strong>de</strong>vint ministre dans le<br />
cabinet d'Anethan et en 1884 <strong>de</strong> manière<br />
éphémère dans le cabinet Malou. Au Parlement,<br />
le Meetingpartij formait le «banc d'Anvers» :<br />
sept et plus tard huit sièges situés sur les <strong>de</strong>ux<br />
plus hautes rangées à droite, configuration qui<br />
exprimait son autonomie politique.<br />
De 1863 à 1872, le Meetingpartij administra<br />
la ville d'Anvers. De 1863 jusqu'à 1900, date <strong>de</strong><br />
la mise en application <strong>de</strong> la représentation<br />
proportionnelle, elle remporta pratiquement<br />
sans interruption tous les sièges parlementaires<br />
<strong>de</strong> l'arrondissement d'Anvers, les votes ruraux<br />
venant toujours en compensation <strong>de</strong> l'avance<br />
libérale du canton d'Anvers.<br />
La carrière politique <strong>de</strong> Coremans débuta<br />
comme membre du conseil provincial (1864-<br />
1868). En 1866, il succéda à Jan-Baptist Van<br />
Rijswijck - père du futur bourgmestre -, au<br />
conseil communal d'Anvers. Van Rijswijck y<br />
avait présenté sa démission, ainsi d'ailleurs<br />
qu'au Meetingpartij, pour retourner chez les<br />
libéraux, suite à un grave conflit survenu à<br />
propos <strong>de</strong> la vente <strong>de</strong> terrains militaires <strong>de</strong> la<br />
fortification, déclassée en 1859, à l'entrepreneur<br />
parisien Ybry. En 1868, Coremans, alors âgé <strong>de</strong><br />
trente-trois ans, fut élu député, fonction qu'il<br />
exerça pendant quarante-<strong>de</strong>ux ans, jusqu'en mai<br />
1910, six mois avant sa mort.<br />
Quand on décrit la carrière politique <strong>de</strong><br />
Coremans, il convient <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r à l'esprit qu'il<br />
n'a jamais exercé <strong>de</strong> mandat dans l'exécutif. Il<br />
doit donc plutôt être jugé sur ses paroles que sur<br />
ses actes, bien que <strong>de</strong> temps à autre il ait été<br />
amené à faire <strong>de</strong>s choix significatifs. Un <strong>de</strong> ses<br />
traits <strong>de</strong> caractère dominants, est qu'il aimait se<br />
comporter en adolescent libre, en franc-tireur, en<br />
provocateur, s'écartant parfois <strong>de</strong> l'image qu'on<br />
avait <strong>de</strong> lui pour dérouter ses adversaires et ses<br />
amis. Cette liberté d'action et <strong>de</strong> parole, il<br />
croyait pouvoir se le permettre en raison <strong>de</strong> sa<br />
popularité et <strong>de</strong> sa position incontestée dans le<br />
Meetingpartij.<br />
Coremans était un homme politique extraverti,<br />
populaire, d'apparence soli<strong>de</strong> quoique <strong>de</strong><br />
taille moyenne, vêtu en permanence d'un gilet<br />
blanc qu'il arborait comme une sorte <strong>de</strong> marque<br />
personnelle (comme plus tard, le socialiste<br />
Terwagne qui en porta un <strong>de</strong> couleur rouge). Il<br />
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aimait les grands meetings pendant les<br />
campagnes électorales à Anvers. Il avait un style<br />
oratoire direct combatif, parfois brutal et provocateur,<br />
bien adapté à son auditoire et ses discours<br />
étaient truffés <strong>de</strong> comparaisons populaires et <strong>de</strong><br />
locutions anversoises. En outre, il était un parlementaire<br />
redouté, ne perdant jamais le contrôle<br />
<strong>de</strong> soi. On lui reprocha souvent un manque <strong>de</strong><br />
diplomatie et <strong>de</strong> finesse; il est vrai qu'il n'avait<br />
pas le talent <strong>de</strong> tempérer son langage. Très<br />
souvent, il savait faire rire : lors du débat lancé<br />
par Casse à propos du port <strong>de</strong> Bruxelles, le 19<br />
mars 1890, les Annales parlementaires font<br />
mention <strong>de</strong> quatorze interruptions <strong>de</strong> Coremans,<br />
saluées trois fois par <strong>de</strong>s éclats <strong>de</strong> rire. Il avait le<br />
soutien <strong>de</strong>s journalistes qui appréciaient sa<br />
franchise. Dans la presse populaire, il était<br />
surnommé «De Scheer» (les ciseaux) ou<br />
«Scheermans», ayant été condamné en 1869<br />
pour avoir falsifié un acte électoral à coups <strong>de</strong><br />
ciseaux. A la suite <strong>de</strong> quoi il baptisa sa rési<strong>de</strong>nce<br />
d'été à Heist : «Hier is 't in <strong>de</strong> Scheer».<br />
A remarquer que Coremans, chef <strong>de</strong> file<br />
incontesté du Meetingpartij, était non croyant et<br />
anticlérical. Des témoignages divers, entre<br />
autres d'amis intimes, tel qu'A<strong>de</strong>lfons<br />
Hen<strong>de</strong>rickx, confirment cet aspect inattendu. Il<br />
était en même temps connu pour être un expert<br />
<strong>de</strong>s auteurs galants du XVIII e siècle, mais il<br />
lisait également Horace. Il savait réciter par<br />
cœur <strong>de</strong> longs passages <strong>de</strong> Racine, Corneille,<br />
Molière ainsi que <strong>de</strong>s auteurs flamands et néerlandais.<br />
En 1905, il publia une histoire <strong>de</strong> la<br />
littérature néerlandophone en <strong>Belgique</strong> <strong>de</strong>puis<br />
1830.<br />
Coremans incarnait parfaitement les trois<br />
caractéristiques du Ne<strong>de</strong>rduitse Bond, soutenu<br />
surtout par la classe moyenne : le flamingantisme,<br />
l'antimilitarisme et le populisme. Le<br />
Meetingpartij se présentait également comme<br />
défenseur <strong>de</strong>s intérêts anversois, au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s<br />
oppositions traditionnelles, ce qui ne l'empêchait<br />
nullement <strong>de</strong> passer pour un parti<br />
catholique, en dépit <strong>de</strong> ses affirmations <strong>de</strong><br />
neutralité confessionnelle. En effet, un bon<br />
nombre <strong>de</strong> membres du Ne<strong>de</strong>rduitse Bond<br />
étaient <strong>de</strong>s ultramontains, comme cela apparaît<br />
dans leur organe <strong>de</strong> presse, l'hebdomadaire Het<br />
Recht (1874-1893), repris en 1899 sous le titre<br />
Ons Recht (1899-1914). Enfin subsistaient au<br />
sein du Ne<strong>de</strong>rduitse Bond <strong>de</strong>s sentiments assez<br />
virulents d'hostilité envers la dynastie, parce