La trilogie des Joya..

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Le docteur Voldi était un petit homme méticuleux d’une soixantaine d’années. Ses cheveux se faisaient
rares sur le sommet du crâne et il les avait soigneusement peignés en avant pour dissimuler cette calvitie
naissante. Il était également évident qu’il les teignait pour cacher son grisonnement. Il ôta sa cape sombre
et Émouchet vit qu’il portait une blouse de toile blanche. Il sentait les produits chimiques et avait de soi
une opinion exagérément élevée.
Il était fort tard quand le petit médecin fut introduit dans le cabinet encombré de l’abbé. Il s’efforçait
sans grand succès de masquer l’irritation que lui causait cet appel tardif.
— Seigneur abbé, dit-il à l’ecclésiastique barbu en effectuant un petit salut nerveux.
— Ah, Voldi, vous êtes aimable d’être venu.
— Votre moine m’a dit que l’affaire était pressante, monseigneur. Puis-je voir la malade ?
— Non, à moins que vous ne soyez prêt à effectuer un long voyage, docteur Voldi, murmura
Séphrénia.
Voldi la dévisagea longuement.
— Vous semblez ne pas être rendor, madame, fit-il remarquer. Styrique, dirai-je, à en juger d’après
vos traits.
— Votre regard est pénétrant, docteur.
— Je suis sûr que vous vous rappelez ce gaillard, dit l’abbé en désignant Émouchet.
Le docteur adressa au grand pandion un regard sans expression.
— Non, je ne… (Puis il fronça les sourcils.) Attendez, ajouta-t-il en rabattant ses cheveux vers
l’avant du plat de la main. C’était il y a une dizaine d’années, n’est-ce pas ? C’est vous qui aviez été
poignardé ?
— Votre mémoire est excellente, docteur Voldi, répondit Émouchet. Mais nous ne désirons pas vous
retenir trop longtemps ; pourquoi ne pas aborder immédiatement notre affaire ? Vous nous avez été
recommandé par un médecin de Borrata. Il vous estime énormément dans certains domaines. (Émouchet
examina le petit homme et trouva judicieux de mettre en œuvre un peu de flatterie.) Naturellement, nous
aurions probablement fini par venir vous consulter, ajouta-t-il. Votre réputation déborde largement des
frontières de Rendor.
— Fort bien, dit Voldi en prenant un petit air satisfait ; puis il prit une expression pieusement
modeste. Il est réconfortant de voir que mes efforts en faveur des malades ont été reconnus.
— Ce qu’il nous faut, cher docteur, avança Séphrénia, c’est votre avis sur le traitement d’une de nos
amies qui vient d’être empoisonnée.
— Empoisonnée ! En êtes-vous sûre ?
— Le médecin de Borrata est catégorique. Nous lui avons décrit dans les moindres détails les
symptômes de notre amie et il a diagnostiqué un empoisonnement par une substance rendor assez rare
appelée…
— Je vous en prie, madame, dit-il en levant la main. Je préfère effectuer moi-même le diagnostic.
Décrivez-moi ces symptômes.
— Naturellement.
Elle répéta patiemment ce qu’elle avait dit aux médecins de l’université de Borrata.
Tandis qu’elle parlait, le petit docteur arpentait la pièce, les mains derrière le dos et les yeux fixés
sur le sol.
— Je pense que nous pouvons exclure le petit mal d’emblée, fit-il quand elle eut terminé. D’autres
maladies, par contre, provoquent effectivement des convulsions. (Il affecta une expression sagace.) C’est
la combinaison de la fièvre et de la transpiration qui est révélatrice. La maladie de votre amie n’est pas