La trilogie des Joya..

apport au consul élène… un diplomate qui, comme par hasard, est cousin du primat Annias. Une nuit,
très tard, il m’a convoqué. Je me rendais chez lui quand Martel, Adus et Krager, ainsi qu’un certain
nombre de coupe-jarrets du cru, sortis d’une ruelle, me sont tombés dessus. Ils ne pouvaient pas savoir
que je passerais par là tout seul. Ajoutons à cela le fait que Krager est de retour à Cimmura, où sa tête est
mise à prix, et on commence à parvenir à quelques conclusions intéressantes.
— Tu penses que Martel travaille pour Annias ?
— C’est une possibilité, non ? Mon père avait empêché Aldréas d’épouser sa propre sœur, Annias
n’en était pas très content et il a pu penser qu’il aurait les coudées franches en Élénie si la famille
Émouchet s’éteignait dans une ruelle de Cippria. Naturellement, Martel avait des raisons personnelles de
m’en vouloir. Je crois que tu as commis une erreur, Vanion. Tu nous aurais épargné beaucoup d’ennuis si
tu ne m’avais pas ordonné de retirer mon défi.
Vanion secoua la tête.
— Non, Émouchet. Martel était membre de notre ordre et je ne voulais pas que vous risquiez de vous
entre-tuer. D’ailleurs, qui aurait été vainqueur ? Martel est redoutable.
— Moi aussi.
— Je ne prends pas de risques inconsidérés avec toi, Émouchet. Tu as trop de valeur.
— Enfin, il est trop tard pour s’en inquiéter.
— Quels sont tes plans ?
— Je suis censé rester ici au chapitre, mais je pense que je vais me promener un peu en ville pour
voir si je rencontre encore Krager. S’il entre en contact avec un homme d’Annias, je pourrai répondre à
quelques questions brûlantes.
— Peut-être devrais-tu attendre un peu, intervint Séphrénia. Kalten revient de Lamorkand.
— Kalten ? Cela fait des années que je ne l’ai vu.
— Elle a raison, acquiesça Vanion. Kalten est précieux en combat rapproché et les rues de Cimmura
ne sont pas moins dangereuses que les ruelles de Cippria.
— Quand devrait-il arriver ?
Vanion haussa les épaules.
— Bientôt, je pense. Peut-être même aujourd’hui.
— J’attendrai sa venue.
Une idée vint alors à Émouchet. Il sourit à Séphrénia et se leva.
— Que fais-tu, Émouchet ? demanda-t-elle d’un ton soupçonneux.
— Oh, rien, répondit-il.
Il se mit à parler en styrique en effectuant quelques passes devant lui. Quand il eut façonné le sort, il
le relâcha et tendit la main. Il se produisit une vibration bourdonnante, suivie d’un vacillement des
chandelles et un abaissement des flammes dans la cheminée. Quand la lumière redevint brillante, il tenait
un bouquet de violettes.
— Pour toi que j’aime, petite mère, dit-il en s’inclinant légèrement et en lui offrant les fleurs.
— Merci… merci, Émouchet. (Elle sourit en les prenant.) Tu as toujours été le plus attentionné de
mes élèves. Cependant, tu as mal prononcé staratha, ajouta-telle d’un ton critique. Il s’en est fallu de peu
que tu ne te retrouves la main pleine de serpents.
— Je m’exercerai, promit-il.
— N’y manque pas.
On entendit gratter respectueusement à la porte.
— Oui ? fit Vanion.
La porte s’ouvrit et l’un des jeunes chevaliers entra.
— Un messager du palais attend à l’extérieur, seigneur Vanion. Il dit qu’il a reçu ordre de parler à
sire Émouchet.