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La trilogie des Joya..

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— <strong>La</strong> charité, dit-il sur un ton implorant.<br />

Le marchand feignit de l’ignorer.<br />

— Pas trop mal, commenta Talen. Essaie de forcer un peu sur le ton lamentable.<br />

— C’est pour ça qu’il n’a rien mis dans ma sébile ?<br />

— Non. Les marchands ne donnent jamais rien.<br />

— Oh.<br />

Plusieurs ouvriers vêtus de cuir arrivèrent dans la rue. Ils parlaient fort et titubaient légèrement.<br />

— <strong>La</strong> charité, leur dit Émouchet.<br />

Talen renifla et s’essuya le nez sur sa manche.<br />

— Je vous en prie, bons maîtres, dit-il d’une voix mourante. Pouvez-vous nous aider, moi et mon<br />

pauvre père aveugle ?<br />

— Pourquoi pas ? fit l’un <strong>des</strong> ouvriers d’un ton allègre.<br />

Il fouilla dans ses poches, sortit quelques pièces et les considéra. Puis il choisit un sou qu’il laissa<br />

tomber dans la sébile d’Émouchet.<br />

L’un <strong>des</strong> autres ricana.<br />

— Il veut avoir assez pour rendre visite aux filles.<br />

— C’est son affaire, non ? répondit le généreux donateur en continuant sa route.<br />

— Ta première affaire, dit Talen. Mets la pièce dans ta poche. Il ne faut pas qu’il y en ait trop<br />

dedans.<br />

En une heure, Émouchet et son jeune instructeur gagnèrent une douzaine de pièces. L’émulation se mit<br />

de la partie : Émouchet ressentait une petite poussée de triomphe chaque fois qu’il parvenait à soutirer<br />

une pièce à un passant.<br />

Un carrosse décoré tiré par deux chevaux noirs assortis arriva alors dans la rue et s’arrêta devant la<br />

porte rouge. Un jeune valet de pied en livrée sauta de l’arrière, abaissa une marche du véhicule et ouvrit<br />

la portière. Un noble tout vêtu de velours vert <strong>des</strong>cendit. Émouchet le connaissait.<br />

— Je risque de rester un certain temps, mon chéri, dit le noble en touchant affectueusement le visage<br />

juvénile du valet de pied. Gare le carrosse dans la rue et attends-moi. (Il eut un gloussement féminin.)<br />

Quelqu’un pourrait le reconnaître et je ne voudrais pas que l’on crût que je fréquentasse un tel endroit.<br />

Il fit rouler ses yeux et se dirigea vers la porte rouge en se dandinant.<br />

— <strong>La</strong> charité pour un aveugle, geignit Émouchet en tendant sa sébile.<br />

— Hors de mon chemin, filou, dit le noble en papillonnant de la main comme s’il voulait chasser une<br />

mouche importune.<br />

Il ouvrit la porte et entra tandis que le carrosse s’éloignait.<br />

— Bizarre, murmura Émouchet.<br />

— Oui, il est bizarre, hein ? fit Talen avec un large sourire.<br />

— Voilà un spectacle que je n’aurais jamais pu imaginer : le baron Harparine entrant dans un bordel.<br />

— Les nobles ont leurs passions, non ?<br />

— Harparine a <strong>des</strong> passions, certes, mais je ne crois pas que les filles à l’intérieur pourraient les<br />

satisfaire. Toutefois, il pourrait te trouver intéressant.<br />

Talen s’empourpra.<br />

— Qu’il ne compte pas là-<strong>des</strong>sus.<br />

Émouchet fronça les sourcils.<br />

— Comment Harparine peut-il entrer dans un bordel où se trouve Krager ? fit-il d’une voix songeuse.<br />

— Ils se connaissent ?<br />

— Je ne crois pas. Harparine est membre du Conseil et ami intime du primat Annias. Krager est une<br />

crapule de troisième ordre. S’ils se rencontrent ici, je donnerais cher pour entendre ce qu’ils vont se dire.<br />

— Entre donc.

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