Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
tour et prit le corps du consul que lui passa Kurik. Celui-ci le rejoignit et ils rempilèrent les poutres<br />
contre le mur.<br />
— Net et sans bavure, dit Émouchet avec satisfaction en se frottant les mains.<br />
Kurik reprit le corps sur son épaule.<br />
— Il ne manquera pas à sa femme ? demanda-t-il.<br />
— Pas trop, je pense… si c’était bien elle dans la chambre à l’autre bout du couloir. On rentre au<br />
monastère ?<br />
Ils portèrent le corps à tour de rôle et atteignirent les faubourgs de la ville une demi-heure plus tard<br />
après avoir évité plusieurs hommes du guet. Le consul, qui était alors sur l’épaule d’Émouchet, gémit et<br />
s’agita faiblement.<br />
Kurik lui tapa de nouveau sur la tête.<br />
Ils entrèrent dans le cabinet de l’abbé. Kurik laissa tomber l’homme inconscient sur le sol sans<br />
précaution aucune. Il regarda un instant Émouchet, puis les deux hommes éclatèrent d’un rire<br />
incontrôlable.<br />
— Qu’y a-t-il de si drôle ? voulut savoir l’abbé.<br />
— Vous auriez dû nous accompagner, monseigneur, haleta Kurik. Il y a <strong>des</strong> années que je ne me suis<br />
pas autant amusé. (Il s’esclaffa de nouveau.) Le pont fut le bouquet, je crois.<br />
— Moi, la dame toute nue m’a bien plu, protesta Émouchet.<br />
— Vous avez bu, vous deux ? demanda l’abbé, soupçonneux.<br />
— Pas une goutte, monseigneur. Mais ce n’est pas une mauvaise idée, si vous avez ce qu’il faut sous<br />
la main. Où est Séphrénia ?<br />
— Je l’ai persuadée qu’elle devrait dormir un peu avec l’enfant. Quelle femme toute nue ?<br />
— Il y avait sur le toit une femme qui opérait le rituel de fertilité, lui apprit Émouchet en riant<br />
toujours. Elle a plus ou moins détourné l’attention de Kurik, pendant quelques instants.<br />
— Elle était jolie ? demanda l’abbé.<br />
— Je ne saurais dire, monseigneur. Je ne regardais pas son visage.<br />
— Seigneur abbé, dit alors Émouchet avec un peu plus de sérieux, nous allons interroger Elius dès<br />
qu’il sera réveillé. Je vous en prie, ne vous affolez pas devant certaines choses que nous lui dirons.<br />
— Je comprends fort bien, Émouchet.<br />
— Parfait. Très bien, Kurik, réveillons Son Excellence et voyons ce qu’elle pourra nous dire pour sa<br />
défense.<br />
Kurik dépouilla le corps mou de sa couverture et se mit à lui pincer les oreilles et le nez. Au bout<br />
d’un moment, les paupières du consul papillonnèrent. Puis il gémit et ouvrit les yeux. Il les fixa un instant<br />
sans expression, puis se redressa brutalement.<br />
— Qui êtes-vous ? Que signifie ceci ?<br />
Kurik lui tapa fermement sur l’occiput.<br />
— Tu vois, Elius, annonça froidement Émouchet… Ça ne te fait rien si je t’appelle Elius, hein ? Il est<br />
possible que tu te souviennes de moi. Je suis Émouchet.<br />
— Émouchet ? haleta le consul. Je vous croyais mort !<br />
— Voilà une rumeur vraiment exagérée. <strong>La</strong> situation est la suivante : tu as été enlevé. Nous te<br />
réservons un certain nombre de questions. Tout se passera plus agréablement pour toi si tu y réponds sans<br />
rechigner. Autrement, attends-toi à passer une très mauvaise nuit.<br />
— Vous n’oseriez pas !<br />
Kurik le frappa encore.<br />
— Je suis consul du royaume d’Élénie, bégaya Elius en essayant de se protéger l’occiput, et cousin du<br />
primat de Cimmura. Vous ne pouvez me traiter ainsi.