L'autonomisation des ruraux pauvres et la volatilité des politiques en ...

Autonomisation des Ruraux Pauvres et Volatilité des Politiques de Développement en Tunisie
Rapport de Synthèse, Mai 2006
individus constituant le corps social et la dynamique proprement dite des groupements. On doit donc
poursuivre les recherches pour mettre au point les instruments qui permettront d'évaluer le potentiel
d'autonomisation d'un groupe à partir de la compréhension et de la mesure des interactions
hiérarchisées et conflictuelles des individus qui, ensemble, "font" et "créent" la dynamique collective.
Mais si cette question théorique de l'interaction entre groupe et individus reste à ce point posée, ce
n'est pas en raison d'un déficit de la méthodologie de la sociologie des groupes mais très certainement
en raison d'une très grande insuffisance de la recherche psycho sociale sur les individus constituant les
groupements ruraux. La priorité accordée à cette dimension par la recherche conduite en Tunisie du
Sud Est, peut aujourd'hui être considérée comme une démarche pionnière. L'approche qui a été mise
en œuvre constitue, en effet, - en Tunisie tout au moins -, une contribution d'une nouveauté absolue.
Pour la première fois, l'éclairage a été porté, en milieu rural, sur les attitudes et les perceptions des
individus composant le corps social, c'est-à-dire, essentiellement sur la dimension "subjective". Cette
recherche voudrait avoir ainsi contribué à jeter premières bases pour réfléchir au plan méthodologique
à la manière dont la recherche devrait être organisée à l’avenir pour focaliser le travail des disciplines
mises à contribution sur l’étude des interactions entre capacités d’agence et structures d’opportunité
(institutions).
A ce stade cependant, la recherche entreprise a déjà permis de saisir au moins une des deux directions
de ces interactions, à savoir, les perceptions, par les individus, des entités externes dans lesquelles ils
se déterminaient. La recherche apporte en effet des réponses sur les attitudes et la perception, par les
individus (et même, par les individus distingués par strates socio-professionnelles), de leur milieu
naturel, de leurs institutions traditionnelles, des groupements nouveaux créés par le projet, des
différents agents représentants les structures de l'administration dite de "commandement". On
remarquera cependant que l'approche mise en œuvre ne pouvait, étant donné son caractère novateur,
s'adresser de la même façon à toute la population. Il est certain, à cet égard, que les femmes (que l'on
s'est efforcé d'atteindre par des approches plus légères constituent l'une des insuffisances que l'on
pourra corriger maintenant que 'on dispose d'outils méthodologiques suffisamment testés.
2. REFLEXIONS SUR LES ATTITUDES ET COMPORTEMENTS DES
AGENTS INDIVIDUELS
L'approche psycho sociale des individus confrontés au processus d'autonomisation s'est focalisée sur
trois concepts fondateurs, l'attitude, le comportement et la perception. On en rappelle la signification.
L’attitude peut être définie comme une tendance psychologique, c’est un état interne du sujet qui
s’inscrit dans une certaine durée, qui s’exprime par le biais de l’évaluation d’un objet avec un certain
degré de "favorabilité". Avoir une attitude, c’est situer un objet attitudinal sur une dimension
évaluative qui peut être d’ordre affectif, cognitif ou conatif. La dimension affective recouvre les
sentiments, les émotions, les humeurs, etc., que suscite un objet attitudinal. La mesure d’une attitude
sur une dimension donnée comporte une direction (soit vers le pôle positif, soit vers le pôle négatif) et
une intensité ( qui peut aller de "pas du tout" à "extrêmement").
Le déterminant immédiat du comportement est l’intention de réaliser ce comportement. Cette
intention s’appuie d’une part sur l’attitude à l’égard du comportement et d’autre part sur les normes
subjectives. L’information n’est pas seulement reçue, elle est recherchée pour sa "validité
fonctionnelle". L’environnement économique est également générateur d’une ambiance, d’un climat
économique, parfois difficile à décrire, mais omniprésent (la morosité, par exemple) qui marque
affectivement l’activité sociale et économique. Il en résulte que l’activité de perception d’un tel
ensemble d’informations est caractérisée par quatre processus en interaction :(i) une réponse
émotionnelle affective ; (ii) un processus cognitif de catégorisation ; (iii) une analyse des systèmes et
des causes ; (iv) une activité exploratoire du sujet.
Les attitudes, perceptions et comportements des individus se déterminent par rapport à leurs
aspirations ou par rapport à leurs projets personnels, d'une part en tant que personnes individuelles
mais aussi, d'autre part, en tant que personnes appartenant de fait à des groupes de sujets susceptibles
de partager des déterminants communs (par exemple, les agriculteurs, les éleveurs, les bergers, les
Chapitre V. Réflexions d’ensemble, enseignements et pistes de recherche 127