L'autonomisation des ruraux pauvres et la volatilité des politiques en ...

Autonomisation des Ruraux Pauvres et Volatilité des Politiques de Développement en Tunisie
Rapport de Synthèse, Mai 2006
- Au centre, on assiste au passage du système pastoral au système agropastoral, voire agricole.
Les parcours collectifs privatisés sont mis en valeur grâce à l’introduction de l’arboriculture
en sec et au développement des périmètres irrigués, et les notions de berger et de pâturage
sont presque obsolètes dans ces réalités. En revanche, on trouve une intégration de l’élevage
dans les nouvelles exploitations agricoles érigées sur les terres de parcours collectifs
attribuées.
- Au Sud, on assiste au passage du système pastoral au système agropastoral extensif. La culture
d’arbres fruitiers - en premier lieu l’olivier - s’y est développée, générant de nouveaux sousproduits,
outre la paille, qui favorisent la complémentarité entre agriculture et élevage en
milieu aride. Ces changements socioéconomiques, édaphiques et climatiques ont entraîné une
nette dégradation de la flore, aussi bien sur le plan quantitatif (sol fortement dénudé, érosion
éolienne, diminution de la production pastorale) que sur le plan qualitatif (diminution des
espèces appétées et des espèces pérennes).
2.3.2 Les problèmes liés à la gestion collective
Avant l’indépendance, les modes et les techniques d’exploitation des parcours reflétaient bien le
savoir-faire traditionnel des pasteurs et leur connaissance du milieu. Les chefs de tribu organisaient en
général le mouvement du cheptel, traçant les lignes directrices à suivre par les pasteurs afin de profiter
au mieux des ressources de la nature. La transhumance pratiquée à l’époque par les éleveurs permettait
d’exploiter la complémentarité entre les régions et, par là même, d’accorder aux parcours laissés au
repos le temps indispensable à leur restauration. En effet, les pasteurs étaient conscients de la fragilité
de ces zones et de leurs potentialités pastorales faibles, inaptes à supporter les troupeaux toute l’année
durant, d’où la pratique traditionnelle de la transhumance.
La sédentarisation des pasteurs et la privatisation des terres collectives se sont accompagnées
d’importantes mutations socioéconomiques ayant touché l’espace physique et social. Celles-ci se sont
traduites par un déclin des solidarités traditionnelles entre les différents groupes sociaux et par
l’émergence de stratégies individuelles, suite au morcellement des parcours. Ce dernier s’est révélé
nuisible, du fait qu’il entraîne souvent des effets pervers préjudiciables à la durabilité des ressources
forestières, végétales fauniques et foncières : en effet, la phytomasse prélevée par les animaux est de
loin supérieure à celle produite par la végétation, d’autant plus que le pâturage ininterrompu pratiqué
actuellement ne permet pas la reproduction et la régénération de cette dernière mais favorise au
contraire sa dégradation, voire sa disparition.
Par définition même, le développement participatif implique la participation des populations à la
détermination des problèmes locaux, à l’identification des solutions et à leur mise en œuvre, afin
d’assurer une durabilité à des programmes établis en commun. On comprend aisément que cette
exigence est d’autant plus fondamentale en ce qui concerne le développement des parcours, du fait de
leur implantation sur des terres collectives. Malheureusement, à l’heure actuelle, la relève du système
social traditionnel n’a pas encore eu lieu et les populations pastorales tunisiennes sont encore en quête
d’une nouvelle forme d’organisation.
Outre les questions de la durabilité et de la gestion des terres collectives, d’autres aspects méritent
d’être mentionnés, notamment celui de la formation inadéquate, qui produit des techniciens très
éloignés des agriculteurs et du terrain, et celui de la recherche, qui ne fournit pas de modèles pratiques
applicables. Il faut aussi souligner que l’État a manifesté une prise de conscience tardive quant à
l’importance des parcours et noter l’absence d’un organe national de coordination dans ce domaine.
Chapitre II. Les Politiques de l’État et l’Autonomisation : le cas des politiques pastorales 23