L'autonomisation des ruraux pauvres et la volatilité des politiques en ...

Autonomisation des Ruraux Pauvres et Volatilité des Politiques de Développement en Tunisie
Rapport de Synthèse, Mai 2006
Ce domaine reste cependant confronté à de nombreux problèmes relatifs à la gestion institutionnelle,
socioéconomique et technique des parcours. Certaines expériences permettent cependant de dégager
des pistes de caractère méthodologique et institutionnel pour la promotion des structures de base.
L’administration s’implique fortement dans la création et le fonctionnement des organisations locales,
dont la viabilité dépend largement du degré de son soutien. En effet, ces structures manquent souvent
de ressources financières, matérielles et humaines et souffrent donc d’un manque d’autonomie.
Jusqu’à présent, l’État n’a pas encore su ou pu développer une politique qui entende les aider à devenir
de véritables organisations locales, aptes à répondre aux besoins identifiés par les communautés
mêmes qu’elles sont censées encadrer. Les conseils de gestion des parcours collectifs, pour leur part,
n’ont pas apporté de solutions pratiques au problème de la gestion des terres collectives, ayant limité
leur rôle à l’attribution des parcours privatisés.
A l’heure actuelle, l’administration, comme les autres opérateurs impliqués, n’ont pas une vision claire
des interactions et interfaces entre les Comités de gestion (CG) et les Groupements de développement
agricole (GDA) nouvellement créés. Cela est d’autant plus délicat que les CG ont un caractère social et
sont sous la tutelle de la Direction générale des affaires foncières et juridiques, tandis que les GDA ont
un rôle de développement et de service et relèvent de la Direction générale du financement, des
investissements et des structures professionnelles.
La relation top down continue de prévaloir, dans les activités directes de l’administration comme dans
les projets de coopération. Par manque d’une formation et d’une culture administrative adéquate, qui
comprenne les vrais enjeux de la participation, le défi consiste alors à profiter des avantages offerts en
ne jouant qu’en façade le jeu de l’approche participative, approche par ailleurs limitée à ses purs
aspects techniques au détriment des volets socioéconomiques.
En matière de parcours, les populations locales, traditionnellement organisées autour de l’exploitation
collective de ces derniers, s’individualisent de plus en plus, dans un espace pastoral qui se privatise et
s’effrite. Face à ces réalités, force est de constater que la mainmise de l’administration ne favorise pas
l’éclosion d’organisations locales responsables, susceptibles de concevoir, identifier, exécuter et
évaluer des projets. La synergie fait aussi défaut, et les groupements nouvellement créés souffrent
d’un certain isolement par rapport à leur environnement local et régional (conseils ruraux et locaux,
CDRA, DR de l’OEP), de même qu’ils apparaissent relativement coupés des associations d’éleveurs
de camélidés. Ces constats montrent que les GDA, les associations, les conseils et les administrations
locales manquent encore d’une vision commune de la nécessaire démarche collective.
7.3 De nouvelles orientations pour une autonomisation des populations
pastorales
Les leçons que l'on tire de l'expérience tunisienne incitent à recommander quelques nouvelles
orientations. L'une des mesures importantes serait de doter le pays d’un Code de développement
pastoral, comportant la création d’un « Fonds pastoral » destiné à financer, à des conditions
avantageuses, tout ce qui se rapporte aux parcours et à leur environnement. Il serait par ailleurs
impératif de charger un organisme national de coordonner et harmoniser l’ensemble des activités,
orientations, politiques et approches relatives au parcours.
Il apparaît alors judicieux de se poser la question suivante : en Tunisie, les politiques en matière de
ressources naturelles – en en particulier de parcours – ont-elles favorisé une gestion participative de
ces ressources, associée à une autonomisation des groupes locaux ? La réponse, on l’a vu, est plutôt
nuancée. En effet, la population cible n’est approchée par les techniciens concepteurs des projets que
lorsque les choses ont été déjà élaborées, pour les lui expliquer et obtenir d’elle, en guise d’approche
participative, son intervention aux travaux manuels et sa contribution à l’effort financier.
Chapitre II. Les Politiques de l’État et l’Autonomisation : le cas des politiques pastorales 33