L'autonomisation des ruraux pauvres et la volatilité des politiques en ...

Autonomisation des Ruraux Pauvres et Volatilité des Politiques de Développement en Tunisie
Rapport de Synthèse, Mai 2006
Les préoccupations normatives constituent un autre déterminant de l’intention comportementale.
Autrement dit, nous ne sommes pas insensibles aux réactions potentielles de notre entourage (normes
et valeurs). Ce modèle rend très bien compte du fait que la réalisation d’un comportement peut être
soumise à des impératifs autres que les seules normes ou les seules attitudes. Ainsi, les récompenses
ou les désavantages peuvent contrebalancer d’autres considérations.
Un autre type de contraintes concerne le degré de contrôle que nous sommes capables d’exercer sur
l’exécution du comportement (maîtrise). Depuis une dizaine d’années, la théorie de l’action raisonnée
s’est enrichie d’une nouvelle composante afin de prendre en compte la maîtrise perçue du
comportement. Selon la théorie du comportement planifié (Ajzen, 1988, 1996) 9 , l’intention
comportementale s’ancre également dans le degré de contrôle que nous croyons exercer à l’égard du
comportement. Le contrôle comportemental perçu concerne l’ensemble des facteurs qui interviennent
dans la réalisation du comportement et leur perception en tant qu’éléments facilitateurs ou obstacles
(les ressources, les normes, les lois, l’administration….). En effet, même si l’attitude de l’individu à
l’égard d’un acte donné est très positive, il est peu probable que celui-ci s’engage si la mise en œuvre
du comportement semble voué à l’échec.
Bien entendu, ce que nous venons de dire ne concernent pas que les comportements très généraux.
Prédire un comportement spécifique (pour un berger ne paître que dans les zones permises) doit rester
possible pour peu que l’on s’intéresse à une attitude toute aussi précise.
Une autre façon de mettre en avant les attitudes des agents consiste à rendre ceux-ci davantage
conscients d’eux-mêmes. Les attitudes seront d’autant plus susceptibles de guider les comportements
qu’elles sont ancrées dans une expérience directe avec l’objet attitudinal.
L’évocation fréquente d’une attitude augmente son impact sur le comportement. A terme, on imagine
que l’accès d’une attitude devienne quasiment automatique et constitue une habitude. La seule
rencontre de l’objet attitudinal suffit alors à déclencher la réponse attitudinale.
L’analyse que l'on conduit dans ce chapitre, et que l'on accompagne des mesures obtenues par
traitement de l'enquête, se propose d'identifier et caractériser les effets sur l'autonomisation effective
des individus de leurs attitudes et de leurs perceptions des états de l’agent conformément au modèle
ayant servi de base à cette recherche. Ce modèle, rappelons-le, pose comme hypothèse que le degré
d'autonomie est affecté par cinq catégories "d'états", ceux-ci s'appliquant: (i) aux ressources auxquelles
les agents ont accès, (ii) aux aptitudes et donc aux capacités des individus à faire face à une situation
nouvelle, (iii) aux accomplissements et donc à la mesure de l'évaluation que les agents font de leur
propre expérience de vie, (iv) aux écarts qui mesurent la distance vécue entre les accomplissements et
les attentes personnelles et, enfin, (v) les attitudes des agents vis-à-vis d'un certain nombre d'objets qui
interférent avec leur capacité d'autonomie. La problématique de recherche est restée dans les grandes
lignes de ce modèle mais elle l'a infléchi dans deux directions: d'une part en écartant l'analyse des
aptitudes qui s'est révélée difficile à apprécier de façon pertinente et, d'autre part, en introduisant une
vérification à partir des perceptions de l’effet des objets attitudinaux sur l’autonomie des sujets.
9 Ajzen, I. (1988). Atitudes, personality, and behavior. Milton Keynes, UK : Open University Press
Ajzen, I. (1996). The directive influence of attitudes and behaviour. In P.M. Gollwitzer & J.A. Bargh
(Eds), The psychology of action (385-403). New York: Guilford.
Chapitre III. Analyse et mesure des états des agents individuels et leurs rapports avec l’autonomisation 41