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Jules & Michel VERNE LES NAUFRAGÉS DU ... - MENU GÉNÉRAL

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<strong>Jules</strong> Verne – Édité par Éric Honoré<br />

point de rencontre des deux plus vastes océans du globe,<br />

telle aurait été sa tâche ici-bas.<br />

Elle était belle. Achevée, elle lui conférerait le droit de<br />

penser à lui-même, et de résigner des fonctions<br />

auxquelles, jusque dans ses dernières fibres, répugnait tout<br />

son être.<br />

Si le Kaw-djer gouvernait, s’il était pratiquement le<br />

plus absolu des despotes, il n’était pas, en effet, un<br />

despote heureux. Le long usage du pouvoir ne lui en avait<br />

pas donné le goût, et il ne l’exerçait qu’à contre-cœur.<br />

Réfractaire pour son compte personnel à toute autorité, il<br />

lui était toujours aussi cruel d’imposer la sienne à autrui. Il<br />

était resté le même homme énergique, froid et triste, qu’on<br />

avait vu apparaître comme un sauveur en ce jour lointain<br />

où le peuple hostelien avait failli périr. Il avait sauvé les<br />

autres, ce jour-là, mais il s’était perdu lui-même. Contraint<br />

de renier sa chimère, obligé de s’incliner devant les faits,<br />

il avait accompli courageusement le sacrifice, mais, dans<br />

son cœur, le rêve abjuré protestait. Quand nos pensées,<br />

sous l’apparence trompeuse de la logique, ne sont que<br />

l’épanouissement de nos instincts naturels, elles ont une<br />

vie propre, indépendante de notre raison et de notre<br />

volonté. Elles luttent obscurément, fût-ce contre<br />

l’évidence, comme des êtres qui ne voudraient pas mourir.<br />

La preuve de notre erreur, il faut alors qu’elle nous soit<br />

donnée à satiété, pour que nous en soyons convaincus, et<br />

tout nous est prétexte à revenir à ce qui fut notre foi.<br />

Le Kaw-djer avait immolé la sienne à ce besoin de se<br />

dévouer, à cette soif de sacrifice, à cette pitié de ses frères<br />

malheureux, qui, au-dessus même de sa passion de la<br />

liberté, formait le fond de sa magnifique nature. Mais,<br />

maintenant que le dévouement n’était plus en jeu,<br />

~ 519 ~

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