au shack

Tous ses jugements avaient été superficiels, il les avait fondés
sur des apparences et sur des actes, sur toute matière pouvant
être interprétée en fonction de son état d’esprit du moment ou
des préjugés qui étayaient son besoin de s’élever, de se sentir en
sécurité, d’appartenir. La panique le gagna.
Elle interrompit le fil de sa pensée.
— Ton imagination n’est pas très fiable en ce moment.
« Vous m’en direz tant, Sherlock », songea-t-il, mais il ne
parvint qu’à chuchoter « Je ne peux pas aller plus loin ».
— Il est trop tôt pour décider si tu le peux ou non, dit-elle
avec le sourire. Et je ne m’appelle pas Sherlock.
Au grand soulagement de Mack, l’obscurité ambiante
dissimula son embarras. Le bref silence qui s’ensuivit parut se
prolonger beaucoup plus longtemps que les quelques secondes
qu’il mit à retrouver sa voix et formuler enfin la question qui lui
brûlait les lèvres.
— Alors, qui dois-je juger ?
— Dieu.
Silence.
— Dieu et l’espèce humaine.
Elle avait parlé avec désinvolture. Les mots avaient coulé de
sa bouche simplement, comme des banalités.
— C’est une plaisanterie ! dit Mack, ahuri.
— Pourquoi le serait-ce ? Dans le monde où tu vis, nombreux
sont ceux qui méritent d’être jugés, selon toi. Quelques-uns
sûrement sont responsables de la douleur et de la détresse
humaines, non ? Que penses-tu des êtres âpres au gain qui
profitent des pauvres et des démunis ? Que penses-tu de ceux
qui sacrifient leurs enfants à la guerre ? Et des hommes qui
infligent des sévices corporels à leur femme, Mackenzie ? Ou des
pères qui frappent leur fils pour soulager leur propre affliction ?
Ne méritent-ils pas ton jugement, Mackenzie ?
Les conflits non résolus de Mack remontèrent à la surface tels
des raz-de-marée. Il s’adossa à la grande chaise pour ne pas
perdre pied sous l’assaut des images, mais il ne put se maîtriser.
Il serra les poings et, l’estomac noué, il haleta.
— Et qu’en est-il de l’homme qui s’attaque à d’innocentes
petites filles ? Que penses-tu de lui, Mackenzie ? Est-il
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