au shack

mensonges et des regrets, expliqua Jésus. En vérité, puisque ce
sont moins des réalités que des ombres la noirceur les fait
paraître plus grands. Quand la lumière baigne les lieux où ils ont
vécu en toi, tu peux les voir exactement tels qu’ils sont.
— Mais pourquoi gardons-nous de telles cochonneries en
nous ? demanda Mack.
— Parce que nous pensons y être plus en sécurité. Parfois,
pour un enfant qui essaie de survivre, c’est en effet plus
sécuritaire. Ensuite il grandit, mais intérieurement il est
toujours un enfant perdu dans une caverne obscure pleine de
monstres. L’habitude faisant le reste, il continue à enrichir sa
collection de dragons. Nous collectionnons tous des choses
précieuses, n’est-ce pas ?
Jésus faisait allusion à Sarayu et à sa collection de larmes.
— Dans ce cas, comment un homme comme moi, un homme
perdu dans ses ténèbres, peut-il remédier à une telle situation ?
— La plupart du temps, très lentement. Souviens-toi que tu
n’y parviendras pas seul. Certaines personnes s’y essaient par
toutes sortes de mécanismes d’adaptation et de distractions
mentales. Mais les monstres sont toujours là, n’attendant que
l’occasion de se manifester.
— Qu’est-ce que je dois faire, maintenant ?
— Ce que tu fais déjà, Mack : apprendre à vivre en étant aimé.
Ce n’est pas une notion facile à assimiler pour un être humain.
Vous ne partagez rien facilement.
Il ricana avant de poursuivre.
— Alors ce que nous souhaitons de toi, c’est que tu nous
« reviennes », pour que nous puissions entrer en toi et t’habiter,
et ainsi tout partager. Notre amitié est bien réelle ; elle n’est pas
le fruit de ton imagination. Il est dit que nous devons faire
ensemble l’expérience de cette vie, ta vie, en dialoguant, en
épousant un même parcours. Tu dispenseras ainsi ta sagesse, tu
apprendras à aimer par notre amour, et nous… eh bien, nous
pourrons t’entendre ronchonner, bougonner, rouspéter, et…
Mack s’esclaffa et poussa Jésus du coude.
— Stop ! cria Jésus en figeant sur place.
Mack crut l’avoir offensé, mais Jésus regardait au fond de
l’eau.
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