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Le Métier d'Infirmière Libérale (Tome 2) - A ... - SIDERAL-Santé

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522. Ceux qu’on ménage, celles à qui on demande beaucoup<br />

Pour les infirmières libérales qui vivent en couple et qui ont des enfants – elles<br />

représentent la majorité 226 –, la conciliation entre vie active et familiale non seulement<br />

requiert une capacité d’organisation sans pareil 227 , mais aussi une nouvelle définition des<br />

rôles respectifs de l’homme et de la femme. Ce rééquilibrage, à entendre la plupart des<br />

infirmières interrogées, ne va pas du tout de soi, et c’est à elles de devoir tant bien que mal<br />

jongler en permanence pour remplir les différents rôles à tenir. « Dans la France des années<br />

1990, écrivait en 2000 Magaret Maruani, le modèle dominant n’est pas celui du choix (travail<br />

ou famille), il n’est plus celui de l’alternance (travailler – s’arrêter – retravailler) mais celui<br />

du cumul : pour une mère de famille, il est désormais “normal” de travailler alors qu’il y a<br />

seulement trente ans, il était tout aussi normal de s’arrêter dès la naissance du premier<br />

enfant. Au-delà des statistiques, il s’agit donc d’un basculement des normes sociales de<br />

l’activité féminine ». 228 Pour autant que les femmes travaillent, la répartition des tâches<br />

domestiques demeure très déséquilibrée, même si l’asymétrie est quelque peu atténuée (à titre<br />

d’exemple le temps domestique quotidien des hommes dans un couple mono-actif est de<br />

1 heure 15, celui des femmes de 6 heures 56. Dans un couple bi-actifs à temps plein, ce temps<br />

domestique des hommes est de 1 heure 29 et celui des femmes de 3 heures 51) 229 .<br />

Rares sont, de fait, les infirmières libérales rencontrées qui ont mentionné un fort<br />

soutien de leur conjoint dans la réalisation des tâches domestiques et dans l’éducation des<br />

enfants. On a plutôt entendu une certaine ambivalence de la part d’hommes pas mécontents de<br />

voir leurs épouses travailler (et rapporter un revenu non négligeable), à condition de ne pas<br />

devoir trop assumer à la maison les effets de cet accaparement. Souvent, quand a priori ces<br />

horaires prenants ne posaient pas de problème majeur, il s’agissait de situations assez<br />

particulières. Ainsi en va-t-il de Véronique, dont le mari, après une carrière dans la<br />

gendarmerie, a cessé assez tôt ses activités professionnelles et peut donc assurer au domicile :<br />

« Mari très présent, sinon je ne le ferai pas ». <strong>Le</strong> revenu de cette infirmière est suffisant pour<br />

la famille à condition que son conjoint accepte l’inversion des genres et endosse donc le rôle<br />

qui régulièrement est celui de l’épouse d’un infirmier libéral. Dans d’autres cas, plus<br />

fréquents, le mari lui-même a des horaires irréguliers voire atypiques (ce qui assez fréquent<br />

puisque nombre d’infirmières sont mariées à des artisans voire à des agriculteurs) et accepte<br />

226 Nous avons cité plus haut les paroles de la chanson de l’artiste Clarika, « Patricia ». Cette infirmière libérale<br />

vit seule, ne se préoccupe pas beaucoup de son intérieur. Elle aime les enfants, « Elle a envie des fois, et puis<br />

finalement pas ». Elle part, de loin en loin, en mission humanitaire au Burundi. « Dans la petite poche de sa<br />

banane, la photo de Souleymane. Sera-t-il fiancé ? Aura-t-il oublié ? ». Elle a une liaison avec un homme, là<br />

bas, en Afrique, mais elle est très épisodique, de fait. « Patricia n’a plus de temps. Peut-être trouvera t-elle<br />

ailleurs. Ce qui manque à son bonheur. Patricia s’en va ». Cette femme célibataire, à la vie trépidante, qui n’est<br />

pas sans rappeler les portraits dressés par Jean-Claude Kaufmann dans son ouvrage « La Femme seule et le<br />

prince charmant » (Paris, Nathan, 1999) ne représente en fait qu’une minorité d’infirmières libérales, la plupart<br />

vivant en couple et ayant des enfants. Signalons que, dans notre corpus d’entretiens, figurent deux infirmières<br />

qui vivent avec une compagne : « Je vous parle de mon amie, avec qui je vis. Mais ce n’est pas un ami, c’est une<br />

amie ».<br />

227 Rappelons que nombre d’entre elles ont déjà dû jongler entre les différentes temporalités alors qu’elles<br />

travaillaient en hôpital, et elles ne font donc que prolonger des savoir faire déjà bien en place parfois avant même<br />

de se diriger vers l’exercice libéral. Voir Paul Bouffartigue et Jacques Bouteiller, <strong>Le</strong> temps de travail dans le<br />

temps de l’emploi, op. cit. p. 94-95.<br />

228 Margaret Maruani, Travail et emploi des femmes, Paris, La Découverte, 2000, p. 15.<br />

229 Alain Degenne, Marie-Odile <strong>Le</strong>beaux, Catherine Marry, « <strong>Le</strong>s usages du temps : cumuls d’activités et<br />

rythmes de vie », Économie et statistique, n°352-353, 2002, p. 90.<br />

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