Le Métier d'Infirmière Libérale (Tome 2) - A ... - SIDERAL-Santé
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« Celles qui bénéficient de la PSD (prestation spécifique dépendance) pensent qu’elles peuvent<br />
en demander plus aux infirmiers libéraux ».<br />
Charles<br />
« Il faut parfois leur dire qu’on n’est pas à leur service ».<br />
62<br />
Justine<br />
C’est, une fois de plus, l’autonomie des soignantes qui se trouve menacée ici. Or, la<br />
soignante n’est pas engagée vis-à-vis de ses patients. Aucun cadre légal ne la contraint en<br />
effet à soigner telle ou telle personne. Pour Nathalie Duville, la démographie de la profession<br />
faciliterait le désengagement des professionnelles à l’égard de certains patients et de leur<br />
entourage : « La liberté du choix du praticien par le patient s’est renversée : avec la pénurie<br />
c’est l’infirmière qui peut choisir plus réellement le patient » 100 . En réalité, les paramédicales<br />
ne cessent pas de soigner un malade du jour au lendemain, mais font en sorte d’organiser son<br />
« transfert » vers un autre cabinet :<br />
« Lorsqu’on a des soucis avec les familles, que ça ne convient ni à l’un ni à l’autre, on n’est<br />
pas tenu. Ils peuvent aller chercher un autre cabinet infirmier. Ça doit arriver dans chaque<br />
cabinet. Ça arrive, c’est arrivé une fois ici. C’était toujours une histoire de 5 minutes, de<br />
10 minutes, de ceci et cela et quelque chose de lourd, la critique de celle qui avait précédé le<br />
soir, bon il y a eu un petit courrier et voilà on leur donne quinze jours pour chercher un autre<br />
cabinet infirmier ! Et ça doit arriver dans chaque cabinet ».<br />
Jacqueline<br />
<strong>Le</strong>s relations avec les familles peuvent être rendues compliquées par le fait que les<br />
soins sont dispensés dans un lieu non professionnalisé, le domicile privé. À cet égard, « la<br />
gestion des soins dans la sphère familiale entraîne des perturbations et désorganise le cours<br />
de la vie quotidienne » 101 . <strong>Le</strong>s infirmières hospitalières sont des professionnelles de santé qui<br />
produisent des soins dans un espace spécialisé, alors que les infirmières libérales assurent<br />
cette même production dans un espace non professionnalisé. Aussi, dans un contexte dominé<br />
par les acteurs profanes, ces dernières peuvent éprouver le sentiment de devoir faire avec les<br />
familles. Certaines soignantes peuvent être gênées par cette présence profane et la ressentir<br />
comme une intrusion dans leurs pratiques professionnelles, à l’instar de Luc qui a<br />
l’impression « d’être surveillé par les familles qui empiètent sur son travail ». Cependant, ces<br />
réactions sont très variables d’une professionnelle à l’autre, y compris au sein d’un même<br />
cabinet :<br />
« Il y a des gens chez qui j’aime bien aller et ma collègue n’aime pas aller. La fille n’est pas<br />
sympa, alors que moi je trouve que ça se passe bien. Je pense à quelqu’un, elle reste avec sa<br />
mère pendant les soins, elle est dans la chambre sans rien dire et sans rien faire, elle veut<br />
regarder, et donc ça gêne certaines, mais moi ça ne me gêne pas et je n’ai pas l’impression<br />
d’être… Quand il y a un sujet qui la branche, le contact passe bien, mais ça ne passe pas<br />
toujours avec les autres ».<br />
Françoise<br />
100 Nathalie Duville, « L’exercice libéral des infirmières : une autonomie illusoire ? », op. cit. p. 104.<br />
101 Renée Waissman, « <strong>Le</strong> travail médical de la famille » in Pierre Aïach, Alicia Kaufmann, Renée Waissman,<br />
Vivre une maladie grave. Analyse d’une situation de crise, Paris, Méridiens Klincksieck, 1989, p. 176.