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L'INCENDIE MILLENARISTE - Basse Intensité

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En 1892, à l'époque des événements de Jerez fut publié un<br />

tract anonyme dans lequel était justifié l'assassinat de plusieurs<br />

paysans «qui bien que n'étant ni riches ni fonctionnaires sont<br />

des "manos blancas"» (Mains blanches : qui ne veulent pas<br />

prendre parti, pas se mouiller) Moral raconte que souvent des<br />

paysans andalous jugés comme délateurs par les anarchistes<br />

étaient exécutés par ces derniers (témoignage oral d'un anarchiste<br />

de Cadiz). Ce qui est également sûr, d'après Moral, c'est<br />

que sous couvert du nom de la Mano Negra furent réglées des<br />

affaires privées dans lesquelles cette organisation n'était pour<br />

rien ; mais surtout, les autorités locales poussées par la terreur<br />

devant les progrès de l'anarchisme se livrèrent à toute une série<br />

d'exécutions sommaires en utilisant la signature «Mano Negra»,<br />

ce qui lui permit de semer le trouble et la démoralisation dans<br />

les rangs des paysans mais aussi d'accuser et éliminer des anarchistes.<br />

La classe dominante sut ainsi tirer le meilleur parti du<br />

caractère sectaire des organisations anarchistes qui prêtaient le<br />

flanc à de telles provocations. Les agissements de la Mano Negra<br />

s'expliquaient pourtant : les «blancas» s'étaient exclus de la<br />

communauté des braceros anarchistes, pire, ils portaient<br />

atteinte à sa cohésion, à son esprit : il fallait donc les éliminer,<br />

surtout s'ils en savaient trop. Et puis l'ennemi ne faisant pas de<br />

cadeau, il était hors de question d'en faire à ceux qui pactisaient<br />

avec lui*.<br />

Cette ténébreuse affaire sonna le glas de la FTRE : celle-ci<br />

condamna sans équivoque en octobre 1883 les actes criminels,<br />

refusant tout lien entre banditisme et action révolutionnaire.<br />

* Dans beaucoup de pueblos andalous existait un code très sévère d'omerta, par exemple à<br />

Benameji, place forte anarchiste «pueblo tristement célèbre dont les citoyens en grand nombre<br />

pratiquaient autrefois la contrebande», où les bandits avaient longtemps rançonné les riches<br />

demeures, et dont on disait qu'aucun crime n'était puni par l'État parce que personne ne parlait.<br />

Iznajar, autre bastion révolutionnaire, était aussi réputé pour son code d'omerta, selon<br />

Julian de Zugasti, ancien responsable du maintien de l'ordre, dans un livre «ElBandolensmo»,<br />

cité par Hobsbawm dans «Lesprimitifs de la révolte... ». Il est probable que les exécutions commises<br />

par la Mano Negra prenaient place dans ce cadre. Il est aussi probable qu'il n'a jamais<br />

existé de groupe ou de société secrète s'intitulant «Mano Negra» ; ce nom a servi à désigner un<br />

ensemble d'actes et de sectes sans nom. Au total, l'ensemble des procès intentés contre les anarchistes<br />

andalous dans l'affaire de la Mano Negra se solda par 300 condamnations au bagne.<br />

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