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catalogue 2007 en .pdf - Festival international du documentaire de ...

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ÉCRANS PARALLÈLESRÉTROSPECTIVE PEDRO COSTAEPPedro Costa, d’arrière <strong>en</strong> avantParmi les visites qu’effectue V<strong>en</strong>tura tout au long d’En avant, jeunesse (2006), il <strong>en</strong> est unequi tranche avec les autres, c’est celle <strong>du</strong> musée <strong>de</strong> la Fondation Gulb<strong>en</strong>kian. Le prétexteest habituel, v<strong>en</strong>ir saluer un <strong>de</strong>s fils – <strong>en</strong> l’occurr<strong>en</strong>ce gardi<strong>en</strong> <strong>de</strong> salle – que l’homme possè<strong>de</strong><strong>en</strong> si gran<strong>de</strong> quantité qu’il n’<strong>en</strong> connaît pas le nombre exact. Le décor diffère toutefois : loin<strong>de</strong> la baraque noyée <strong>de</strong> pénombre qu’il partage avec L<strong>en</strong>to, loin aussi <strong>de</strong>s murs immaculés<strong>du</strong> nouveau quartier, c’est <strong>en</strong>tre un Rub<strong>en</strong>s et un Van Dyck que se dresse le géant taciturne.Pedro Costa a donné une explication à ce rapprochem<strong>en</strong>t. Elle est à la fois souriante etdéfinitive : ce n’est pas par <strong>en</strong>gouem<strong>en</strong>t pictural que V<strong>en</strong>tura – nom <strong>de</strong> l’acteur comme <strong>du</strong>personnage – a voulu poser à cet <strong>en</strong>droit, mais parce qu’il participa à la construction <strong>du</strong>mur sur lequel les <strong>de</strong>ux tableaux sont accrochés, <strong>du</strong> temps où il était maçon.En mêlant le gueux aux ors <strong>de</strong> la peinture flaman<strong>de</strong>, la scène résume l’<strong>en</strong>treprise <strong>de</strong> Costa<strong>de</strong>puis bi<strong>en</strong>tôt vingt ans. Son énoncé suffit à indiquer la place unique qu’occupe celui-ci dansle cinéma contemporain : dédier le luxe <strong>de</strong> l’art à ceux qui doiv<strong>en</strong>t se battre pour obt<strong>en</strong>ir lestrict nécessaire. Le cinéaste portugais filme les démunis, les errants, les drogués,particulièrem<strong>en</strong>t à Fontainhas, quartier lisboète d’extrême misère aujourd’hui détruit, auquelil a consacré une trilogie, Ossos (1997), Dans la chambre <strong>de</strong> Vanda (2001) et En avant,jeunesse. Chaque fois, il accor<strong>de</strong> la pleine puissance d’une œuvre – la si<strong>en</strong>ne – à l’abs<strong>en</strong>ced’œuvre <strong>de</strong> ceux qui, privés <strong>de</strong> travail comme <strong>de</strong> toute pro<strong>du</strong>ction propre, cantonn<strong>en</strong>t leurvie au ressassem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> quelques ri<strong>en</strong>s : la drogue, la plainte, nettoyer un sol ou une tablepromis à une <strong>de</strong>struction prochaine. Sixième et <strong>de</strong>rnier long métrage à ce jour, En avant,jeunesse accomplit cette ambition au plus haut point, jusqu’à donner démonstration <strong>de</strong> toutela majesté dont le “cinéma” est capable. L’éblouissem<strong>en</strong>t est complet : contre-plongéeshéroïques ou vertigineuses ; jeu <strong>de</strong> noirs profonds et <strong>de</strong> blancs explosifs ; hommage cinéphileà F.W. Murnau par l’intermédiaire <strong>de</strong> quelques fantômes puis, aux <strong>de</strong>rnières minutes, d’unebarque glissant sur l’eau.Voici pourtant que V<strong>en</strong>tura interrompt le programme <strong>en</strong> marquant son désintérêt pour leschoses <strong>de</strong> l’esthétique : l’homme préfère la maçonnerie à la peinture. Le plan est certesune nouvelle occasion <strong>de</strong> découper la silhouette <strong>du</strong> Cap-Verdi<strong>en</strong> dans un halo <strong>de</strong> lumière quila magnifie. Mais le mur contre lequel celui-ci s’adosse est aussi une réalité qui déstabilisel’équilibre décrit à l’instant. Cette réalité r<strong>en</strong>voie au métier qu’à la suite d’une mauvaise chute,V<strong>en</strong>tura a <strong>de</strong>puis longtemps cessé d’exercer. Elle évoque aussi d’autres murs : ceux, d’unblanc virginal, <strong>de</strong>s appartem<strong>en</strong>ts qu’un employé municipal fait visiter à V<strong>en</strong>tura, <strong>en</strong> vue qu’ily installe sa large famille.Pedro Costa pourrait sans mal repr<strong>en</strong>dre à son compte le mot <strong>de</strong> Brecht lors d’un dîner àHollywood : que faîtes-vous ? – je fabrique <strong>de</strong>s bijoux pour les pauvres. Avec En avant,jeunesse il est allé plus loin <strong>en</strong>core, taillant un diamant gros comme le Ritz à l’att<strong>en</strong>tion <strong>de</strong>sdélogés <strong>de</strong> Fountainhas. L’opération d’affirmer l’art aux <strong>en</strong>droits où il fait défaut ne sauraitcep<strong>en</strong>dant suffire à définir l’ampleur <strong>de</strong> son travail. En effet, l’art ne manque jamais123

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