Le Figaro: le crépuscule sanglant de l'Algérie Française
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P ORTFOLIO
Par Albane Piot
des
Le
soleilnoir
pharaons
A partir du 28 avril, une exposition
raconte, au musée du Louvre,
l’épopée fascinante de l’antique Nubie,
au temps des rois de Napata.
Acte III. C’est le moment où tout
bascule. « Di Napata, le gole »,
répète, en un cri, Amounasro, le
roi d’Ethiopie, alors que le général
égyptien Rhadamès vient involontairement
de se trahir, en révélant le lieu par
où passeront ses troupes : les gorges de
Napata. Leurs deux voix, dès lors, se
mêlent, l’un baryton, l’autre ténor, sur
une partition intense et dramatique.
Rhadamès,celuiqu’Aïdaaime,dénoncé
par la jalouse Amnéris, est condamné et
emmuré vivant. Aïda l’Ethiopienne, la
fille d’Amounasro, le rejoint dans son
supplice, pour mourir avec lui plutôt que
de vivre sans lui. O terra, addio…
Avec Aïda, créé à l’Opéra khédivial
du Caire, le 24 décembre 1871, Verdi
signait son triomphe et l’un des opéras
aujourd’hui encore les plus célèbres au
monde. Il lui avait été commandé par le
vice-roi d’Egypte, Ismaïl Pacha, pour
célébrer l’inauguration du canal de
Suez. Pour le scénario et le dessin des
costumes, et par souci de vérité historique,
Verdi avait demandé l’aide du
plus grand connaisseur de l’Egypte
ancienne de l’époque : Auguste
Mariette. L’archéologue y avait révélé
tout l’intérêt qu’il portait à la civilisation
encore bien méconnue des rois de
Napata, dans cette région du sud de
l’Egypte que l’on qualifiait d’éthiopienne,
de aethiops, traduction grecque
de l’hébreu kush : Kouch, fils de
Cham, lui-même fils de Noé, à qui avait
été dévolue cette partie de l’Afrique.
Aethiops,le«Pays-des-visages-brûlés »,
terme par lequel les auteurs grecs de
l’Antiquité désignaient ce territoire
aux contours changeants au sud de
l’Egypte, que l’on appela aussi Nubie
dès le XII e siècle av. J.-C., sur les terres
de l’actuel Soudan.
Pour élaborer le livret d’Aïda, Mariette
s’était précisément appuyé sur les textes
de stèles dont les estampages seront
visibles lors de la grande exposition qui
ouvre ce printemps au musée du Louvre.
Alors que 2022 marque le bicentenaire
du déchiffrement des hiéroglyphes
par Champollion et les douze ans
de l’exposition « Méroé, un empire sur
le Nil », qui vit la première présentation
en ces murs de ces mêmes contrées au
temps de la fastueuse XXVI e dynastie, le
Louvre s’apprête en effet à évoquer le
royaume qui précéda celui de Méroé :
Napata, au pays de Kouch. Ce Napata
dont les rois étaient parvenus à conquérir
toute la vallée du Nil, à unifier une
Egypte fracturée après la débâcle des
SOUS LE SOLEIL EXACTEMENT
Ci-dessus : Tête d’une statue du dieu
Amon-Rê de Thèbes trouvée à Sanam,
XXV e dynastie, règne de Tanouétamani,
quartzite (Oxford, Ashmolean Museum).
Tanouétamani est le dernier souverain
kouchite à avoir régné sur l’Egypte d’où il
fut chassé par les Assyriens en 663 av. J.-C.
Page de gauche : Triade d’Osorkon, or, lapislazuli
et pâte de verre, XXII e dynastie, règne
d’Osorkon II (Paris, musée du Louvre).
Osiris, au centre, est entouré d’Isis, à droite,
et d’Horus. Ce pendentif offert aux dieux
en ex-voto témoigne du prestige encore
réel d’un souverain se réclamant de
Ramsès, cent ans avant la conquête du roi
Piânkhy de Napata, vers 720 av. J.-C.
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