Le Figaro: le crépuscule sanglant de l'Algérie Française
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© BEN BIRCHALL/PRESS ASSOCIATION IMAGES/MAXPPP.
UN MONDE « MEILLEUR »
Ci-contre : à Bristol,
le 7 juin 2020, après avoir
déboulonné la statue
du négrier britannique
Edward Colston (1636-
1721), les manifestants
du mouvement Black
Lives Matter l’ont
jetée dans les eaux
du port de la ville.
Parmi les 260 entrées
du Dictionnaire
du progressisme,
on trouve notamment :
cancel culture,
empathie, homéopathie,
métissage, parité,
selfie, vivre-ensemble
et même Zorglub.
Le fait même que le terme soit dorénavant revendiqué, alors qu’il
était hier inusité ou même proscrit par la droite, marque un
changement de paradigme.
Publié en 2019, Le Dictionnaire des populismes annonçait, par le
pluriel employé dans son titre, le caractère protéiforme de son
objet, car il est impossible de donner une définition unique du
populisme, terme le plus souvent méprisant ou insultant, qui
appartient au vocabulaire de la polémique plus qu’à un concept de
science politique. La tendance, de nos jours, est de qualifier de
populistes des hommes et des partis qui n’ont d’autre point commun
que d’être apparus hors des élites traditionnelles. En effet, quel
rapport entre Napoléon III et Lénine ? Entre les ligues des années
1930etlesgiletsjaunes?EntreMussolinietJean-MarieLePen?Entre
le Serbe Slobodan Milosevic et le Britannique Nigel Farage ? Entre le
mouvement Tea Party aux Etats-Unis et la Lega Nord italienne ?
Troisième volet du triptyque élaboré par Christophe Boutin,
Olivier Dard et Frédéric Rouvillois, Le Dictionnaire du progressisme,
qui vient de paraître, explore en 260 notices toutes les facettes
d’une idéologie dont les origines remontent aux Lumières – l’idée
d’un progrès indéfini, horizon sécularisé de la destinée humaine –,
et dont les développements les plus récents se manifestent à travers
la cancel culture et le courant woke. Derrière la variété des thèmes
abordés dans les pages de ce précieux dictionnaire (antiracisme,
bougisme, cosmopolitisme, droit à la différence, féminisme,
inclusivisme, métissage, résilience, unisexe, vivre-ensemble…) se
déploie une vision du monde basée sur une philosophie et une
anthropologie dont les critères marquent une rupture avecla pensée
réaliste née à Athènes, Jérusalem et Rome : plus rien ne relève
d’un donné permanent, transmis à travers les siècles, tout relève
d’un mouvement perpétuel, d’une évolution sans fin, d’un univers
sans limites,sans barrières et sans frontières. Significativement, cet
univers liquide est envahi par des termes anglo-saxons qui fournissent
autant de notices à ce dictionnaire : anywhere, nudge, open
space,safespace,start-up.Lenéoprogressisme,enréalité,constitue
une double rupture, avec l’ancienne tradition occidentale, mais
aussi avec la pensée issue des Lumières. « L’homme augmenté des
progressistes du XXI e siècle, soulignent Boutin, Dard et Rouvillois
dans leur introduction, se situe au-delà de l’humain – et il y a donc
tout à la fois une continuité avec le progressisme révolutionnaire et
un dépassement de celui-ci. »
Sil’utopieprogressiste eutseslettresdenoblesse,aumoinssurle
plan littéraire, au XVIII e siècle, elle se déconsidère, aujourd’hui, par
l’indigence de sa construction intellectuelle et la pauvreté de son
vocabulaire quand on se situe sur le terrain du woke. De la crise
sanitaire à la guerre en Ukraine, la période récente ne témoigne
d’aucun progrès pour l’humanité, bien au contraire. « On néglige
trop souvent la capacité des hommes à ne pas voir les choses telles
qu’elles sont », observe Frédéric Rouvillois. Qui ajoute avec ironie
que « c’est pourtant grâce à elle que le progressisme a encore un bel
avenir devant lui. » 2
À LIRE
Christophe Boutin,
Frédéric Rouvillois, Olivier Dard (dir.)
Le Dictionnaire du conservatisme,
Cerf, 2017, 1 072 pages, 33 €.
Le Dictionnaire des populismes,
Cerf, 2019, 1 216 pages, 30 €.
Le Dictionnaire du progressisme,
Cerf, 2022, 1 232 pages, 39 €.
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