ÉPIS DE BLÉPour les partisansde l’Algérie française,tout l’enjeu consisteà rappeler que lesdestins de l’Algérie etde la France sont liés.Ce thème de l’unitéde la nation sera reprisen des termes vifs parl’Union pour le salutet le renouveaude l’Algérie française(USRAF) (page dedroite, en haut, 1957),groupe fondépar Georges Bidaultet Jacques Soustelleen 1956, prônantl’intégration desmusulmans dansla République françaiseet qui soutiendraactivement le retourau pouvoir dugénéral De Gaullepour accomplirce programme.Ci-contre : affichede propagande pourl’Algérie françaiseimprimée à Algeren 1958. Page de droite,en bas : couverturedu disque audiode l’allocutionprésidentielle du20 décembre 1960,au cours de laquelleDe Gaulle appelle lesFrançais à voter «un“oui” franc et massif »au référendum dejanvier 1961, qui meten jeu le principed’autodéterminationdes Algériens.
P ORTFOLIOLaguerredesimagesTout au long de la guerred’Algérie, les différents campss’affrontèrent à coup d’affichesde propagande. L’objectif ?Gagner la bataille des esprits.© COLLECTION IM/KHARBINE-TAPABOR. © GRANGER/BRIDGEMAN IMAGES. © COLLECTION GREGOIRE/BRIDGEMAN IMAGES.Dans les années 1950, les affiches, bien que déjà concurrencéespar les médias audiovisuels, demeurent des outils de propagandeefficaces. Le Parti communiste français et le gouvernements’affrontent dans une guerre des images où fleurissent, ici, lesallusions à la paix, là, les appels à la fermeté. Ainsi les communistesappellent-ils à la négociation avec les rebelles algériens à grand renfortd’affiches doucereuses peuplées de colombes immaculées, oùdes mains brunes et blanches se rencontrent dans un élan de fraternité.Les images officielles, quant à elles, s’inscrivent dans la droiteligne de la position gouvernementale lors du déclenchement de laguerre en 1954 : «L’Algérie c’est la France. » (François Mitterrand). Lecombat des jeunes appelés est dès lors magnifié comme un combatpour la défense de la patrie elle-même : « Plus d’Algérie française…Plus de France ! » (ci-dessus). L’œuvre coloniale de la France est poursa part exaltée à travers des affiches représentant de grandes plainescôtières, où s’étendent à perte de vue des champs de blé et où s’activentdes tracteurs rutilants sous le regard bienveillant des colons.L’irruption du général De Gaulle au pouvoir en 1958 insuffle unnouvel espoir dans les rangs des partisans de l’Algérie française,désillusionnés par les hésitations d’une IV e République chétive etpeureuse. L’homme du 18 Juin, qui ne s’est en réalité jamais livré surses intentions réelles, apparaît à leurs yeux comme cet « hommefort » capable de changer le cours des événements. Ils sont loin des’imaginerquel’ancienchefdelaFrancelibre,aumomentmêmeoùil prend la barre et communie les bras levés avec une foule d’Algéroisen liesse, est déjà résolu, selon ses propres mots, à « replier nosdrapeaux » et à dégager son pays « des astreintes, désormais sanscontrepartie, que lui imposait son empire ».Lediscoursdu16septembre1959annoncefinalementlacouleur:les Algériens doivent décider de leur propre destin et construire uneAlgérie nouvelle, appuyée sur l’aide de la France et étroitement unieà elle. Le référendum annoncé pour le 8 janvier 1961 doit permettreau général d’obtenir le soutien explicite de l’opinion publique surcette question. Le 20 décembre 1960, il appelle ainsi officiellementles Français à voter «oui à la France et à l’Algérie », dont on prévoitqu’elles resteront, après l’indépendance, étroitement associées (cidessous,couverture du disque audio du discours). La rupture aveclespieds-noirsestdéfinitive.Enfévrier1961,unepoignéed’activistesfondent l’Organisation armée secrète (OAS) autour du généralSalan. Ils s’engageront de plain-pied dans la guerre des images –notamment par la production d’affiches sérigraphiées appelant lescitoyens à prendre les armes (voir page 96) –, furieux d’avoir étédupés par celui que le général Challe appellera «le plus grand prestidigitateur(…) de l’histoire de France des cinq derniers siècles ».95H