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Le Figaro: le crépuscule sanglant de l'Algérie Française

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EN COUVERTURE

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h

© AKG-IMAGES/ERICH LESSING. © MAURICE ZALEWSKI/RAPHO.

cessez-le-feu avant un accord politique.

En intervenant comme il le fait, c’està-dire

en se déclarant de but en blanc

pour la négociation, De Gaulle renverse

donc le fameux triptyque molletiste :

«Cessez-le-feu, élections, négociations. »

D’où la joie des dirigeants de la rébellion,

attestée par Jean Daniel alors à Tunis, de

le voir arriver au pouvoir en mai 1958. Et

d’où aussi leur immense déception à la

suite de son discours du 4 juin à Alger et

desoncride«Vivel’Algériefrançaise!»le

6 juin à Mostaganem.

Comment se présente alors

la situation ?

A ce moment de l’Histoire, le cocktail

politique gaulliste est fait du leurre en

cours des partisans de l’Algérie françaiseetdusentimentchezlesdirigeants

du FLN d’avoir été dupés. De Gaulle se

retrouvedoncdanslasituationd’unchef

de guerre contraint de combattre sur

deux fronts. Position intenable. Il lui faut

par conséquent simplifier au plus vite la

situation. Disposant des pleins pouvoirs,

et s’arrogeant personnellement le traitement

de l’affaire algérienne, il va concentrertoutesonactionsurlerenforcement

de l’Etat avec notamment la constitution

d’un staff élyséen.

En quoi consiste-t-il ?

Il est composé essentiellement de

deux indépendantistes affichés : René

Brouillet, directeur des Affaires algériennes,

et son adjoint, Bernard Tricot.

ACCLAMATIONS Ci-dessus et page de droite : le 4 juin 1958, Alger réserve un accueil

triomphal à De Gaulle. La foule des pieds-noirs ovationne aussi Jacques Soustelle, dernier

gouverneur général de l’Algérie, de février 1955 à janvier 1956, et ardent partisan

de l’Algérie française, qui avait œuvré pour le retour du général au pouvoir. En s’adressant

sans distinction aux «10 millions de Français d’Algérie », «des Français à part entière,

avec les mêmes droits et les mêmes devoirs », qui auront à se prononcer bientôt,

dans le cadre d’un collège unique, sur la Constitution en gestation, De Gaulle va dans

le sens de l’intégration souhaitée par les tenants de l’Algérie française.

Ce dernier, d’inclination mendésiste,

raconte qu’ayant refusé par deux fois

le poste, il ne l’a accepté qu’après s’être

assuré auprès de De Gaulle que son travail

viserait à préparer l’indépendance

algérienne, comme lui-même venait de

préparer celle de la Tunisie.

Le staff élyséen s’enrichira plus tard d’un

troisième personnage : François Coulet,

nommé en mars 1960 directeur des

affairespolitiquesdelaDélégationgénéraledugouvernementàAlger,

quiestun

gaulliste inconditionnel. Et puis, bien

sûr, contrôlant en fait tous les services

de renseignement, officiels et officieux,

et, surtout, disposant tous les soirs

d’une heure de conversation en tête à

tête avec le chef de l’Etat, le redoutable

et redouté Jacques Foccart, le véritable

homme fort du régime gaulliste.

Comment les intentions

de De Gaulle échappentelles

à ses proches

comme à l’opinion ?

Jusqu’en septembre 1959 au moins,

la ligne officielle est le maintien de

l’Algérie française, renforcée par les

résultats spectaculaires du référendum

constitutionnel (28 septembre 1958)

et des élections législatives (30 novembre

1958), et plus encore par le choix

d’un Premier ministre – Michel Debré –

emblématique de la défense intransigeante

de l’Algérie française (il avait

jugé, sous la IV e République, qu’un coup

d’Etat serait légitime contre tout gouvernement

qui en consentirait l’abandon).

Elle s’exprime par la proclamation

de la volonté élyséenne de rechercher

pourleproblèmealgérienla«solutionla

plus française », formule magique propreàsemerlaconfusion,etl’annonceen

fanfare,le3octobre 1958, du lancement

du coûteux plan de Constantine pour

rattraper le retard en équipements des

départements d’Algérie.

Tout cela désamorce plus ou moins les

doutes que font naître d’autres décisions

: l’éviction brutale de Salan, commandant

en chef et délégué général du

gouvernement en Algérie, et son remplacement

par deux personnalités favorables

à terme à l’indépendance, Paul

Delouvrier, et le général gaulliste Maurice

Challe ; la mise à l’écart de Soustelle

dans un poste ministériel mineur, l’Information,

quand tout le monde le donnait

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