Le Figaro: le crépuscule sanglant de l'Algérie Française
- No tags were found...
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
Avant de répondre à ces questions, il
convient de situer clairement le processus
d’apparition des « pieds-noirs » dans l’histoire
de l’Algérie colonisée. En effet, les
explications les plus courantes ignorent
la véritable histoire de la conquête et de la
colonisation de l’Algérie par la France.
Même si l’un des soldats du corps expéditionnaire
débarqué à Sidi Ferruch le 14 juin
1830 s’appelait Jean-Baptiste Piednoir, il
est mort à Alger le 2 août avant d’avoir pu
y faire souche. Ce ne sont pas les « piedsnoirs
» qui ont conquis l’Algérie, mais
l’armée française, et les civils qu’elle y protégeait
étaient généralement antimilitaristes.
C’est pour garder à la France la nouvelle
province à conquérir à partir de 1841 que le
maréchal Bugeaud jugea nécessaire d’y
implanter une population française militarisée
aussi nombreuse que possible. Mais il
n’avait pas prévu l’effondrement de la natalité
et de l’accroissement naturel français
révélépar la comparaison entre les résultats
des recensements de 1846 et de 1856 : la
France était en effet le seul Etat d’Europe
dont la population stagnait. C’est pourquoi
Napoléon III avait opté dans les années
1860 pour une nouvelle politique dite du
«royaume arabe », fondée sur l’idée que la
population française ne deviendrait jamais
majoritaire, tandis que ses opposants libéraux
et républicains restaient fidèles à la
politique d’assimilation de l’Algérie à la
France, qui triompha à la chute de l’empire.
L’immigration étrangère ne pouvait pas
davantage franciser l’Algérie. La populationcivile
immigréed’Europe resta en effet
longtemps divisée entre une légère majorité
d’étrangers (Espagnols, Italiens, Maltais,
Suisses et Allemands) et une forte
minorité de Français d’origine (provenant 1
PHOTOS : © IONESCO/GAMMA RAPHO.
ENTRE TERRE ET MER
A droite : une plage de la presqu’île
de l’Amirauté, dans la baie d’Alger, en 1959.
Page de gauche : des colons travaillant
dans des champs de l’Algérois, en 1959.
Loin de l’idée reçue du «colon fumant
cigare et monté sur Cadillac », les Français
d’Algérie étaient dans leur majorité
de condition sociale modeste (artisans,
boutiquiers, employés, fonctionnaires).