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Le Figaro: le crépuscule sanglant de l'Algérie Française

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pour les quelque 80 000 qui, grâce à l’appui de certains officiers,

ont réussi à gagner la métropole. Mais c’est pour s’y

retrouver relégués dans des camps de transit (Rivesaltes) ou

des cités d’accueil (Bias ou Saint-Maurice-l’Ardoise) et, après

l’exemple indochinois, laisser béant le sort de ceux qui ont

servi la France les armes à la main.

Un dernier élément concerne le sort des travailleurs d’origine

algérienneétablisenFranceavantmars1962(402310).L’idée

a prévalu, chez les négociateurs, qu’ils n’y étaient qu’à titre provisoire,

ce qui a débouché sur l’instauration de la liberté de circulation

entre l’Algérie indépendante et l’ancienne métropole,

comme leur qualité de citoyen français les y autorisait depuis le

statut de 1947. Ajoutons que la déclaration relative à la coopération

économique et financière prévoyait aux termes de son

article 7 que « les ressortissants algériens résidant en France et,

notamment, les travailleurs auront les mêmes droits que les

nationaux français, à l’exception des droits politiques ».

Or, il n’y a pas eu de reflux conséquent vers l’Etat indépendant.

Au contraire, le chaos de l’été 1962 et les difficultés de la

République algérienne naissante ont entraîné une émigration

d’Algériens vers la France portant la population algérienne y

résidant à 445 000 à la fin d’avril 1963, puis à 535 800 un an

plus tard et 720 000 en 1972. A cette augmentation s’ajoute le

fait qu’il s’agit d’une nouvelle population, car dorénavant ce

ne sont plus des hommes seuls qui traversent la Méditerranée

maisdesfamilles,cequitransformeprofondémentlacommunauté

algérienne présente en France et réoriente la relation

franco-algérienne née de la négociation qui a accouché de

l’indépendance. Numériquement très supérieure à ce qu’elle

était avant l’indépendance, cette population est considérée

comme « immigrée », à la différence des Français d’Algérie et

des harkis, dits eux aussi rapatriés. Mais cette immigration

algérienne marque aussi sa singularité par rapport à d’autres

catégories d’immigrés du fait des dispositions des accords

d’Evian et d’une relation entre la France et l’Algérie que les

gouvernements hexagonaux successifs n’ont jamais voulu

rompre, après cent trente ans de présence française.2

Olivier Dard est professeur d’histoire contemporaine à Sorbonne Université,

à Paris. Il a notamment publié Voyage au cœur de l’OAS (Perrin, « Tempus »,

2011). Il a également codirigé, avec Anne Dulphy, Déracinés, exilés, rapatriés ?

Fin d’empires coloniaux et migrations (Peter Lang, 2020), et Déracinés, exilés,

rapatriés ? Fin d’empires coloniaux et migrations II : S’organiser, transmettre,

mettre en récit (Peter Lang, 2022).

À LIRE d’Olivier Dard

Voyage au cœur

de l’OAS

Perrin

« Tempus »

544 pages

11 €

67

h

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