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Le Figaro: le crépuscule sanglant de l'Algérie Française

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EN COUVERTURE

56

h

© AFP. © KEYSTONE-FRANCE/GAMMA-RAPHO.

monterengammeaurythmedesinitiatives

présidentielles.

Lesquelles ?

Deux principalement.

Le 3 avril 1960, c’est la mutation brusquée

de Challe qui va progressivement

se convaincre du «torpillage » de l’affaire

Si Salah par l’hôte de l’Elysée parce que

tout affaiblissement du GPRA le gêne

plusqu’ilnelesert,etprendreconscience

que le plan Challe n’a été qu’un «leurre »

et pas un leurre « destiné à l’étranger, à

l’ONU, mais un leurre destiné à l’armée »

et qu’il ne fallait pas que la victoire soit

totale ni que le «parti de la France » disposant

de sa propre force armée puisse

offrir une alternative crédible.

Le 4 novembre 1960, c’est l’offre solennelle

de négociation politique faite au

GPRA. Evoquant « la République algérienne

», De Gaulle ajoute subrepticementlorsdel’enregistrement:«laquelle

existera un jour ». Cette dernière incidente

ne figurait pas dans le discours

qu’il avait fait lire à Debré. Elle le prend

de court. Or, cette concession sans

contrepartie à la rébellion signe l’arrêt

de mort de tout projet d’association.

STRATÉGIE Ci-contre : le colonel

Si Salah, un des chefs de la wilaya IV.

L’offre de reddition de ce valeureux

maquisard opposé à la direction

du FLN faillit perturber la

démarche gaulliste qui privilégiait

la négociation avec ladite direction.

Page de droite : les généraux André

Zeller, Edmond Jouhaud, Raoul

Salan et Maurice Challe (de gauche

à droite), quittant la Délégation

générale d’Alger après s’être

adressés à la foule, le 24 avril 1961.

Averties des préparatifs d’un

putsch, les autorités politiques ont

laissé faire, assurées qu’elles étaient

de son échec. Mais la dramatisation

orchestrée par le chef de l’Etat

lui a permis de s’octroyer les pleins

pouvoirs en application de

l’article 16 de la Constitution et de

remettre au pas l’armée française.

Dès lors, les démissions se succèdent,

notamment celles de Delouvrier et de

Jacomet, les deux têtes gouvernementales

sur place, qui s’offusquent de le

voirlâcher l’indépendanceavantmême

de l’avoir négociée.

Comment réagit le FLN

à ces nouvelles avances ?

Le message de l’Algérie algérienne a été

bien capté par le GPRA qui se dit prêt à

renouer le contact rompu à Melun, mais

le fait est là : le FLN ne s’impose toujours

pas à la population musulmane, première

victime du terrorisme, et qui ne lui

obéit que sous la contrainte et la terreur.

Ses dirigeants n’étant pas sûrs de sortir

victorieux du référendum d’autodétermination,

on assiste alors à cette chose

assez ahurissante que De Gaulle va

devoir payer de sa personne pour imposer

publiquement le FLN tant en Algérie

qu’en France, où il souffre d’un fort discrédit

dû aux attentats, et porter ainsi le

coup de grâce à l’« ennemi commun » :

les partisans de l’Algérie française. C’est

la raison pour laquelle il se rend en Algérie

en décembre 1960. Il confie à Terrenoire

qui l’accompagne : « C’est une

partie difficile que nous allons mener, et

qui n’a pour moi rien de réjouissant. »

Cette « partie difficile », c’est de faire

en sorte que des manifestations musulmanes

montrent la popularité du FLN.

L’affaire a été montée de main de maître

par François Coulet et des officiers des

SAU (sections administratives urbaines)

qui ont incité les jeunes à crier : «Algérie

musulmane ! Vive DeGaulle ! Algérie algérienne!»La«partiedifficile»s’accompagne

de nombreux débordements puisqu’elle

va faire 112 morts (statistiques

officielles) et plus de 400 blessés. « Pour

la première fois, écrit Benjamin Stora,

qui donne la clé de l’affaire, le drapeau

duFLNflottesurAlger, donnantauGPRA

une légitimité populaire cruciale alors

que s’esquissent les dures négociations

qui vont mener aux accords d’Evian. »

Désormais De Gaulle peut dire et répéterqueleFLN

est «représentatifdesneuf

dixièmes de la population algérienne »

et en prendre l’opinion à témoin. D’où

ce constat mélancolique d’un officier

français : « Nous avons subi un véritable

Diên Biên Phu psychologique (…). Le

16 mai 1958, nous n’avions pas la situation

militaire en main et tout le monde

criait : “Vive la France !” Aujourd’hui,

nous avons gagné sur le plan militaire,

mais on crie : “Vive le FLN !” »

Vous avancez que le putsch

des généraux aurait luimême

été facilité par l’inertie

volontaire du pouvoir…

Les futurs putschistes, parfaitement

identifiables et depuis toujours identifiés,

étaient tous sous surveillance

étroite de la Sécurité militaire du fidèle

ex-FFL Feuvrier, renforcée d’une cellule

d’anciens de la France libre se recrutant

par cooptation. La police politique

est donc assurée et, dans son livre Le

Putsch des généraux, Pierre Abramovici

a recensé il y a maintenant déjà une

dizaine d’années les avertissements

répétés des diverses officines gaullistes,

notamment le Mouvement pour la

Communauté, auprès des autorités.

Contraignantd’ailleursLouisJoxeàintervenir

pour censurer leurs communiqués

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